1-Artémis

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Le problème avec les bals, c'est qu'il faut se fondre dans la masse. Surtout quand on n'a pas d'invitation. Je suis entrée subrepticement par une des fenêtres, réalisant l'exploit de ne pas abîmer ma robe, et de ne pas me faire repérer.

La robe est blanche, taille empire, d'une parfaite simplicité.

Je n'ai pas l'habitude de porter une robe, et encore moins une telle merveille. Mes tenues se composent souvent d'un simple jean et d'un tee-shirt unicolore, parfois agrémentées d'une veste, mais je ne suis pas de nature à craindre le froid.

Je sais que ma soeur est là, quelque part. Elle ne loupe jamais une fête, et est de toute façon toujours au courant de tout. Mais je n'ai pas besoin de la chercher. Comme moi, elle doit être en repérage, cherchant à séparer les bons des mauvais vampires, car nous ne tuerons que les mauvais. S'ils sont restés pures, les vampires ont le droit de vivre. 

S'ils ne sont pas ceux qui ont tué Dann, ils ont le droit de vivre.

-Madame Lockwood. Je n'ai pas eu encore le temps de me présenter, fait un garçon à la maire de la ville, baisant sa main à à peine un mètre de moi.

-Kol Mikaelson, continue-t-il et j'ai un frisson quand j'entend son nom.

Foutue famille nombreuse.

Bien sûr qu'ils sont réveillés, eux aussi. Pourquoi louperaient-ils une telle fête ?

-Espérons que votre charmante ville nous accueillera aussi bien que nous comptons l'adopter.

-Damon Salvatore, se présente un homme habillé en noir qui discutait avec la maire avant l'arrivée de ce Kol.

Encore un vampire. Ils n'en finissent pas, putain !

-On s'est ... déjà vus, je crois, s'avance-t-il en tendant sa main.

Kol Mikaelson l'ignore splendidement, avec un petit sourire narquois.

-On m'a présenté beaucoup de gens, répond-il. Mais je n'ai pas souvenir de vous.

Je manque d'éclater de rire, et Kol s'écarte des deux individus. Ce Damon, je connais sa réputation, et son histoire. Transformé par Katerina Petrova, tout comme son frère Stefan. Tous deux amoureux d'elle, Katerina les a manipulés, allant jusqu'à faire croire à sa propre mort. Katerina, plus communément appelée Katherine, est une vraie sadique, tout comme Damon. Tuant pour le seul et unique plaisir de faire couler le sang.

Mais ce ne sont que des rumeurs. Du moins, pour Damon. J'ai des preuves pour Katherine, elle est donc une cible à éliminer.  Pas pour Damon, ni pour son frère. Ce ne sont peut-être vraiment que des rumeurs, après tout.

En tant que Chasseuse, je me dois d'être juste. Je ne tue un vampire que quand Ivy ne peut pas le faire seule, et quand je suis certaine qu'il est mauvais. Au moindre doute, je lui laisse la vie sauve.

Pour ce Kol Mikaelson, aucun doute. Il est mauvais, mais je ne peux pas le tuer. Pas sans un pieu de chêne blanc, et je ne souhaite pas avoir toute sa famille sur le dos, ensuite. En outre, je n'ai pas le choix : je dois le laisser vivre, et essayer par tous les moyens de calmer ses ardeurs. Mais le problème, c'est que je ne sais pas comment faire.

* * * * *

-Excusez-moi.

Adossée à la rambarde de l'escalier, je regarde les danseurs. Après le discours d'Elijah, j'ai rapidement aperçu ma soeur disparaître par l'une des nombreuses portes, et j'ai décidé de ne pas la suivre. Ce n'est pas nécessaire.

-Oui ?

Je tourne un peu la tête sur la gauche.

J'ai bien sûr reconnu sa voix, mais je ne tiens pas à le montrer. Kol Mikaelson est debout à côté de moi, me présentant docilement son bras. Bizarrement, je ne vois pas la lueur de folie dans ses yeux que tous les meurtriers ont.

-M'accorderiez-vous cette danse ?

Il sourit. Un sourire sincère. Je sais les reconnaître.

Peut-être n'est-il pas si méchant qu'on le dit. Pas tout le temps, du moins. Ou peut-être sourit-il à la perspective de me vider de mon sang ? Je ne sais pas. C'est une possibilité.

Je ne peux que répondre avec le même sourire.

-Avec plaisir.

Il m'entraîne sur la piste, et je suis heureuse de gérer parfaitement la danse avec les talons. J'ai une nette prédilection pour les talons aiguilles, et je marche avec comme avec des tennis. Avec la même aisance.

-Puis-je connaître votre nom ? me demande-t-il poliment, avec le même sourire.

Dieu, que son sourire est beau.

Normal, tout en lui est fait pour attirer sa proie.

En l'occurrence, sa proie, là, c'est peut-être moi. Peut-être. Certainement. Je décide de jouer la carte de la sincérité. Après tout, je n'ai jamais caché ce que j'étais, et Klaus n'est pas le seul à avoir une dague aux pouvoirs magiques. Je pourrais le plonger dans un sommeil profond s'il s'avérait dangereux.

-Si vous jurez de ne pas me vider de mon sang par la suite, vous le saurez.

Il écarquille les yeux, sa nature ainsi exposée. Mais son étonnement ne dure qu'une seconde, et son sourire se dessine à nouveau sur son visage. Tant mieux, il est beaucoup plus séduisant comme ça.

-Comment savez-vous ? Êtes vous aussi une vampire ?

Je rigole. Être une vampire, moi ? Jamais.

-Je suis une Chasseuse, réponds-je simplement. Humaine, aussi. Mais je n'ai pas pour but de vous tuer. Je sais que c'est impossible.

-L'auriez-vous fait, si vous aviez pu ?

J'hésite une seconde, et dis à nouveau la vérité :

-Oui. J'aurais essayé, après m'être assurée que vous êtes méchant.

-Quelle importance, que je sois bon ou mauvais ? s'amuse-t-il. Je suis un vampire. Les Chasseurs tuent tous les vampires, qu'ils soient méchants ou non.

-Ce n'est pas mon cas.

C'est à son tour de rire.

-Eh bien, vous êtes une Chasseuse hors du commun. Autrement, je n'ai jamais eu l'intention de perforer ce joli cou, alors vous avez ma parole que je ne vous viderais pas de votre sang. Quel est votre nom ? ajoute-t-il après une seconde.

-Artémis, souris-je.

Il rit. Encore.

-Artémis, la déesse de la chasse. Est-ce une coïncidence ? Et votre frère s'appelle-t-il Apollon ?

Je déglutis. Mon frère, Dann, a été transformé puis tué par un vampire, et ce n'est pas un sujet que je tiens à aborder. Surtout pas avec un vampire.

-Non, il ne s'appelait pas Apollon.

Il a l'air de comprendre, et je jure avoir vu un éclair de compassion dans son regard sombre. N'est-il pas censé être imperméable aux émotions ? Je n'ai pas envie de l'apprécier, et c'est plus facile de détester un socipathe.

-Je suis déso...

Je ne le laisse pas finir, et dis :

-Je dois m'en aller, ma soeur doit m'attendre.

Non, ce n'est pas vrai. Je n'ai pas eu de nouvelle de ma soeur de la journée. Je me suis réveillée avant elle et j'étais déjà sortie quand elle s'est levée.

-Ne pouvez-vous pas rester ?

-Non, c'est impossible.

Je répète :

-Ma soeur m'attend.

Il soupire, et parait déçu. Mais son petit air triste s'efface rapidement et laisse place à un nouveau sourire. Moins sincère, cette fois.

-Espérons que je vous reverrais, Artémis, déesse de la chasse et de ce bal.

Il embrasse ma main, comme il l'a fait avec Madame Lockwood, mais j'ai l'impression qu'il teinte son geste d'une certaine intimité qui ne me met pas mal à l'aise, étrangement.

Une seconde après, je me suis éclipsée, quittant la chaleur de cette salle et essayant de régulariser ma respiration et les battements de mon coeur.



Bloody KillersOù les histoires vivent. Découvrez maintenant