Chapitre 3

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Il fait sombre et très froid et à vrai dire j'ai très peur toute seule dans ces ruelles . Yacine m'a proposé de me raccompagner mais dans son état je ne pouvais pas le lui permettre. Elle est faible en ce moment et en plus je voulais rester seule juste le temps d'arriver chez moi car une fois que j'y serais je ne compte pas me coucher avant d'avoir clairement parlé avec Ousmane. Ce sera certe une discussion qui va tourner au vinaigre ou pas mais dans tous les cas ceci doit se faire et aujourd'hui même. En tournant la dernière ruelle qui mène chez moi à la sicap dieuppeul, un groupe de garçons de la vingtaine qui sentaient à des dizaines de mètres l'alcool commencent à siffloter et à m'agacer.

-Wow c'est qui cette magnifique créature? S'écrie l'un d'entre eux.

-Magnifique c'est peu dire Ablaye .

-Moooh c'est la cousine de Karim. Lui répond un autre.

-Ha ok !

Il s'approche de moi et me tient par la taille mais je le repousse immédiatement en le giflant.

-Connard ! Ne t'avises plus jamais de me toucher avec tes salles pattes. Espèce d'ivrogne. Tchiiiip.

Je continue ma route tout en me méfiant des soulards qui ne cessent de me lorgner de la tête au pied . En m'éloignant j'entend le garçon que j'ai giflé rouspeter et m'insulter tandis que ses amis se font un réel plaisir de le taquiner.
Il fait 23h passée alors je presse le pas et rentre vite chez moi. À peine ai-je franchi la porte d'entrée que je me vois recevoir une gifle aussi retentissante que celle que j'ai affligé au petit imbécile de tout à l'heure. En fin de compte c'est devenu une mode de gifler les gens pour les accueillir .

-Domaram ! Me crie mon beau-père. Ça fait des heures que ta mère te cherche et tes frères aussi au moment où toi tu déambules dans les rues avec des garçons qui ne font que t'utiliser.

-Non papa tu te trompe je te le jure . J'étais chez Yacine et je n'ai pas vu le temps passer car on était tellement dans notre discussion . Lui dis-je en me massant la joue en même temps.

-Soubhanallah ! C'est encore pire. Ton amie là je t'ai déjà dit que je ne l'aime pas et encore plus maintenant qu'elle s'est faite engrosser par un homme dont elle ignore l'identité.

-Mais papa...

-Il n'y a pas de mais qui tienne et je t'ai reproché maintes fois de me répondre ou de me contredire quand je parle c'est compris? Et puis je commence vraiment à en avoir marre de faire semblant avec toi. Maintenant que tu connais toute la vérité je n'ai plus à faire comme si t'étais ma fille car crois moi je ne t'ai jamais aimé et enfin je peux te le dire. Quand je te regarde je ne ressens que du dégoût envers toi. En plus le pire est que tu prends les traces de ta mère mais au moins elle elle le regrette alors que toi je suis presque sûr que tu te fera le plaisir d'en avoir une dizaine sans aucun regret.

Après sa il me tourne le dos et s'en va dans sa chambre. Là où je suis, devant la porte, je ne peux plus bouger. C'est comme si on venait de me poignarder dans le coeur tellement la douleur que je ressens est indescriptible. C'est vrai qu'il n'est pas mon père mais malgré toutes ses insultes et son mauvais comportement je l'ai toujours considéré comme tel car c'est le seul que j'ai connu malheureusement. Pourtant au fond de moi je ne vois pas ce qu'il y a eu de mal dans toute cette histoire si ce n'est le fait que ma mère ai commis l'erreur de perdre sa virginité. Je ne peux la blâmer car l'amour dit-on est d'une force sans pareille et il peut vous faire faire des choses que même dans vos rêves les plus fou vous ne feriez. Hélas c'est ça que la tradition et la religion exigent. Une femme doit rester chaste jusqu'au mariage et ceci peu importe la situation. Après des minutes qui me semblent une éternité, je me ressaisis et me dirige vers ma chambre pour me coucher. J'avais vraiment prévu de mettre les points sur les I avec mon demi frère mais en ce moment je ne trouve vraiment plus la force d'affronter une autre personne pour des aveux poignants. En traversant le couloir qui mène à ma chambre j'entend quelqu'un renifler, on aurait dit des pleurs mais je ne m'attarde pas sur ça et le met sur le compte de la fatigue mais mon coeur refuse de s'y faire . Alors je m'approche du salon et là le bruit est plus audible. Arrivée dans la pièce je tâtonne dans le noir et allume la lampe une fois que ma main se pose sur le contact.
Si seulement je pouvais retourner en arrière pour juste aller me coucher je l'aurais fait car ce que je vois est la pire chose qu'un enfant puisse voir.
Ma mère était là, coucher sur le tapis le visage inondé de larme. On aurait dit quelqu'un qui vient de perdre un être chère tellement son visage reflète le désarroi.
Sans attendre je me précipite vers elle et la prend dans mes bras. Elle ne se fait pas prier et me serre fort contre elle. On ne peut arrêter de pleurer toutes les deux car je dois avouer que tout ce qui arrive nous affecte l'une comme l'autre.
Après une quinzaine de minutes à pleurer elle se redresse et me prend par les épaules. Elle passe ensuite ses doigts sur mon visage comme si elle veut graver à jamais les traits de celui ci dans sa mémoire et ceci me trouble énormément.

-Ho ma petite Mariama, ma douce et tendre enfant ! L'amour que je te porte est immense et très intense car tu es ma chair et mon sang et surtout le symbole de l'amour que ton père et moi partagions. L'expression de ton visage et la façon dont tu as pris tes jambes à ton coup quand je t'ai raconté l'histoire m'a complètement chamboulé. J'ai failli mourir en te voyant dans cette état à cause de moi. J'espère que tu me comprends et que tu me pardonnera pour cet erreur.

-Ho maman je suis vraiment désolée. À ce moment j'étais hors de moi et j'avais surtout les pensées en vrac. Te dire que je ne t'en veux pas le moins du monde serait mentir car je ne comprends pas pourquoi tu as attendu tout ce temps pour me le dire. Mais bon le mal est déjà fait. Maman , je suis restée des nuits et des nuits depuis mon plus jeune âge à essayer de me rappeler de mon enfance et de ma vie de famille avec toi et mon père mais jamais rien ne venait, aucun souvenir pas même des flashs. Souvent je mettais cela sur le compte de mon manque de discernement à l'époque mais maintenant je comprends pourquoi je n'y arrivais jamais . C'est tout simplement parce que je n'ai jamais vécu cette enfance là.

Ma mère me regarde avec tristesse mais je continue.

-Je me sens mal et ... Je ne sais même pas ce que je ressens en réalité tellement c'est douloureux. J'ai toujours considéré les insultes de mon père Madi comme des injures mais à vrai dire il a parfaitement raison de me dire ces mots car ce sont ceux la qui me qualifient. Je suis malsaine...

Brusquement ma mère se lève et me tire par la main pour que je fasse de même à mon tour. Elle essuie mes larmes avec son foulard et me dit

-Mariama , une femme malsaine se reconnaît dès le premier regard et je peux t'assurer que tu ne l'ai pas. C'est vrai, je suis tombée enceinte de toi hors mariage, mais cela ne fait pas de moi une femme sans dignité car j'ai été éduquée comme il se doit. Mon père n'a jamais failli à sa tâche et en te voyant je crois bien que moi non plus ma fille.

Elle me pousse jusqu'au miroir qui se trouve dans le couloir et allume la lampe pour venir se mettre derrière moi.

-Regardes cette magnifique jeune fille , comment peut on dire qu'elle est malsaine? Tu es ravissante et tu as une force de caractère que moi ni beaucoup d'autres femmes n'ont pas . Tu es une battante et à ton âge tu t'occupes de toute la famille sans attendre rien en retour. Tu es studieuse à l'école et tu fais tout ce que je te demande sans broncher . Alors ma fille, ne t'avises plus jamais de répéter cela et je t'interdis d'y penser . Maintenant vas , vas prendre une douche et manger, ensuite vas te coucher car je vois que tu es exténuée .

À ce moment là je ne trouvais plus les mots . Je bafouillais mais rien . J'étais émue mais également fiere de cette femme qu'est ma mère. Elle en a vécu des choses, mais en la voyant on ne peut que l'apprécier d'avantage. Fervente musulmane, vivement pénétrée des enseignements de son vénérable Khalif Serigne El Hadj Malick Sy , ma mère est une femme juste et très présente pour sa famille dont elle prend soin au détriment de son bonheur. Ha cette femme, je pourrais mourir pour elle.
Sans un mot je l'enlace très fort contre moi et me retourne pour aller faire ce qu'elle m'a dit. Mais ayant été confrontée à tant d'émotions , la fatigue a eu raison de moi et je me suis écroulée sans me déshabiller sur le lit à côté de ma sœur et avec une vive conviction que dorénavant beaucoup de choses vont changer dans ma vie...

Mariama : Un Mariage pour sauver l'honneur.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant