la guerre froide (suite)

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Cette sieste, il fallait bien qu'il la termine pour aller voir l'état de sa mère. Adja de son côté l'avait aussi préparé et avait demandé à son mari de l'attendre quelques minutes. Elle avait un petit panier marron où elle avait disposé plusieurs fruits divers de leur nature, mais aussi différents de par le goût. Il ne leur fallut pas moins de quelques minutes pour prendre un taxi et arriver à l'hôpital. Adja marchait fièrement dans les bras de son homme, et elle a bien raison d'être fier, car Abdou Khadre est toute l'incarnation de la beauté au masculin. Et la manière dont il jongle ce corps parfait entre démarche et façon de faire renvoie tout simplement à un gentleman. Ils étaient maintenant face à la cabine 103. Défa qui était là assise s'était levée en tendant à son frère une ordonnance. Elle salua brièvement Adja et se tut. Cette dernière lui tendit le panier en lui adressant ces quelques mots:
-C'est pour maman!
Défa allait prendre le panier mais Awa Coumba venait de les prendre par surprise, et elle avait réagit  plus vite que sa soeur. En effet, elle a prise Adja par  derrière et l'a poussée d'une manière tellement brutale que cette dernière glissa et tomba avec le panier. Tous les fruits s'étaient éparpillés sous le regard indiscret des personnes témoins de la scène. Abdou Khadre accourut de suite vers sa femme l'aidant à se relever:
-Tu n'es pas blessée mon coeur?
Awa, était loin de regretter son acte, elle enchaina:
-"Li dé moy rayla, djalé la, Gor kéne douko topp bamou seuss." (Tu assassines la personne pour après organiser ses funérailles). Tu n'es pas là où tu dois être, la place d'un voyou comme toi c'est la prison.
Abdou Khadre se tourna vers elle et hurla:
-Ça suffit Awa!
Sa soeur recula d'un pas et afficha un grand étonnement. Mais il poursuivit:
-Quand vas-tu enfin cesser de créer des problèmes dans la famille, Quand?

Awa: -Quand tu répudieras cette pute!

Khadre: -Je te jure que si tu répètes ce mot tu vas le regretter... dit-il en s'armant d'une gifle mais sa femme retint sa main.

Awa: - Li dé mossi dessone, Sa Djabar nga gnouye djeundé! (Il ne manquait plus que ça, maintenant ta femme passe avant ta famille).

Ces propos venaient de faire tomber Abdou Khadre dans un désarroi sans limites, son visage était passé d'un coup de la colère à la tristesse. Une tristesse qui l'envahissait petit à petit, le désarmait et l'abattait. Les mots lui manquaient pour exprimer ce qu'il ressentait, mais il prit sur lui pour quand même répondre à sa soeur:
-Ay way khana yereumoma (N'as-tu pas pitié de moi)! Awa Coumba je suis vraiment exténué ,je suis fatigué de ces disputes incessantes qui vont finir par me rendre complètement fou. Je vis problème sur problème ,problème dans mon travail, problème dans ma famille et des problèmes encore et toujours des problèmes. Au nom du sang qui nous unit et pour l'amour de notre mère Awa Coumba fiche nous la paix, je ne te demande rien d' autre juste la paix... dit-il en s'affessant au côté de Defa, abattu et triste.
Adja regardait son homme, impuissante, elle compatissait tant à  sa douleur et à sa tristesse qui le déstabilisait. Elle n'aimait pas voir Abdou khadre dans cet état, Awa Coumba, elle, la regardait avec haine. Il finit par prendre la porte l'ordonnance en main. Adja le suivit en evitant de justesse sa belle-sœur qui ne manqua pas de lui jetter à la figure un tchip phénomènal. A croire que son atrocité et sa méchanceté envers Adja n'était pas suffisante, Awa Coumba couronnait le tout de son eternelle arrogance et de sa langue pendue. Awa Coumba detestait Adja, comme le feu déteste être au contact de l'eau, par sa beauté et sa grace légendaire, par son appartenance à cette dynastie des dieux du fer et de l'enclume et par cette manie qu'elle a de rendre fou son frère, ou la détestait-elle simplement parce qu'elle était elle, la déesse "Teugue". Au même moment les deux tourtereaux marchaient main dans la main vers la pharmacie de l'hôpital dans un silence inconfortable. La file était très longue et l'attente interminable. Adja ne savait pas comment briser cette glace qu'avait créée la dispute, elle ne savait quoi dire. Elle se pencha sur son téléphone titubant les touches sans aucune raison.
-princesse je suis vraiment désolé de la réaction de Awa.
-mon coeur, tu sais bien que j'ai l'habitude, ne t'inquiète pas pour moi.
Le silence reprit place, Abdou Khadre alla au guichet payer l'ordonnance, récupéra les médicaments, puis se tourna vers Adja et ils s'en allèrent vers le service de réanimation. Abdou Khadre remit les médicaments à Défa et voulut rester mais cette dernière lui dit que ça n'en valait pas la peine:
-Le docteur a dit qu'elle n'est pas prête de se réveiller aujourd'hui du fait de l'anesthésie générale. Rentre te reposer, dès qu'elle se réveillera je te tiendrai au courant.
Sans piper mot, il se retourna et sa femme le suivit.

Au delà du Fer et de l'EnclumeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant