▷ Chapitre 16 ◁

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Je n'avais pas vu Kimberley durant les vacances d'hiver. Et je n'avais pas essayé de reprendre contact avec elle. Je ne savais pas quelle tournure avait pris notre amitié après le bal. C'est pour cela qu'en descendant du bus ce matin j'avais une énorme boule de noeuds au creux de mon ventre. Mes jambes étaient du coton et je crus que j'allais embrasser le sol. Heureusement Paul arriva bien vite vers moi avec un sourire idiot, comme toujours. Il me changerait sûrement les idées.

- Dis moi donc espèce d'ingrat ! Ça t'amuse de ne donner aucun signe de vie pendant deux semaines !!

Il avait cet air faussement énervé que seul les vrais amis adoptaient pour traduire leurs inquiétudes.
Au bout de quelques secondes de silence à se regarder dans le blanc des yeux le visage de Paul s'adoucit. Il me pris dans ses bras subitement et je mis du temps avant de réagir.

- Je me suis inquiété idiot, souffla-t-il.

Je resserais mes bras autour du corps de mon meilleur ami me sentant terriblement coupable d'avoir été un idiot. On se relâcha et nous nous rendîmes en cours.

Je sortais de deux heures d'histoire et me rendais sur le toit du lycée avec Paul qui me racontait ses exploits de skieur. Je ne l'écoutais que d'une oreille car autre chose me trottait dans la tête. On s'assit sur le rebord les jambes dans le vide.

-...et là un hippopotame bleu a donné naissance à une licorne des Pyrénées !

Je levais des yeux surpris vers mon meilleur ami qui déblatérait des absurdités.

- Surtout tu le dis si je t'ennuis ! S'exclama Paul vexé.

Je rigolais du nez face à sa gaminerie.

- Je t'écoutais Paul, pas attentivement mais j'ai perçu quelques bribes de ton monologue passionnant, me moquai-je.

Il soupira en rigolant doucement et son expression était un mélange de désespoir et de suspicion.

- Qu'est-ce qu'il c'est passé ? Demanda-t-il entre deux soupirs.

- De quoi tu parles ? Questionnai-je en feignant d'avoir compris.

Évidemment que je savais de qui il parlait. J'espérais juste pouvoir retarder cette conversation. Vous savez quand on dit qu'un garçon n'est pas doué avec les mots, c'est pas juste des paroles en l'air clichées.

- Fais pas l'imbécile Dada ! Pas avec moi, dit-il en pointant son index vers moi, l'œil méfiant.

Je baissais les épaules en signe de défaite et soufflais un bon coups.

- Ok..., je fis une pause regardant mes pieds se balancer dans le vide, c'est normal d'avoir toujours eu envie d'embrasser une personne qu'on aime, mais lorsque celle-ci vous fait comprendre qu'elle le veut aussi, de fuir ?

Mon visage se déforma à cause de la gêne. Quant à celui de Paul, son sourcil s'était levé d'un air dépité.

- Tu vois ce que je veux dire ? Renchéris-je.

- Tu vas devoir être plus précis parce que là je n'arrive pas à me servir de ma super et grandiose imagination, répondit-il en secouant ses boucles emmêlées.

Je lui racontais la soirée du bal de l'hiver en détail. Son visage passait par plusieurs émotions et je me disais qu'il avait un certain talent de mime mais n'en dit rien pensant le moment inapproprié. Une fois que j'eus fini mon récit il hochais doucement la tête en plissant légèrement les yeux. Je le regardais faire pendant une vingtaine de secondes en perdant patience.

- Dave, es-tu réellement amoureux d'elle ?

Je restais consterné par sa question. Je ne m'y attendais pas du tout.
En voyant mon incompréhension il continua.

- Tu connais cette fille depuis que tu es un bébé fœtus, tu ne penses pas que tu l'as peut être idéalisé. Il fit une pause en attendant une quelconque réaction de ma part qui ne venait pas. Mmmh...comment expliquer ça..., il claqua des doigts en ayant trouvé, ne penses-tu pas que tu l'aimes simplement parce que c'est l'une des seules filles que tu fréquentes ?

Okay, j'ai pas beaucoup d'amis mais quand même...

- Est-ce que tu es en train de me dire que j'ai inventé cet amour ?

- Plus ou moins, hésita-t-il

- Plus ou moins ? Répétais-je plus fort.

- Eh bien il y a des sentiments mais d'amitié seulement. Sinon pourquoi aurais-tu reculé devant un baiser ?

C'était censé. Je connaissais Kim depuis longtemps et j'étais toujours avec elle. J'ai peut-être simplement cru que je l'aimais. Parce que c'est logique dans certaines mentalités qu'un garçon et une fille qui reste toujours ensemble finissent par sortir ensemble. Mais parfois il n'y a que de l'amitié. Et peut-être qu'il en était ainsi pour nous.

- Tu sais que je t'aime toi ! M'exclamai-je à l'intention de Paul.
- On peut s'embrasser alors ? Demanda-t-il en faisant un bisou avec ses lèvres, image très peu attirante soit disant passant.

Je rigolais et frappais amicalement l'épaule de cet idiot qui perdit légèrement l'équilibre. Ce qui lui fit une petite frayeur étant donné que nous étions à une bonne quinzaine de mètres du sol. Il me lança un regard apeuré avant de rigoler nerveusement. Et je me joignais à son rire.

Comme tous les soirs je rentrais chez moi, déposais mes affaires dans ma chambre et redescendais dans le seul but de dévaliser la cuisine. Et j'aurai dû en faire de même ce soir s'il n'y avait pas eu cette lettre sur mon lit. Je me rapprochai et m'assis en tailleur devant la lettre. L'écriture était soignée. Sûrement une fille, car c'est bien connu : les filles écrivent bien. Je prenais délicatement l'enveloppe entre mes mains et la retournai mais ne vis aucuns nom. Je commençais à déchirer l'enveloppe avec le plus grand soin et en sortis un papier plié en deux. Je le dépliai avec toujours autant de prudence que le reste de mes mouvements. L'écriture était la même que sur l'enveloppe. Je pris une respiration profonde et commençais à lire.

Cher Dave,

Je t'aime. Je t'aime tellement. Je t'aime et c'est horrible. Je t'aime et c'est pour cela que je pars.
Je ne peux pas rester avec toi et faire comme si nous pouvions filer le parfait amour. Nous ne le pouvons pas car je ne suis qu'un fardeau à ton bonheur. Une ancre qui t'empêche de t'épanouir et d'aimer.
J'ai été idiote de penser que tu pourrais me pardonner de t'avoir abandonné ainsi alors que tu avais besoin de quelqu'un. Je croyais qu'avec le temps tu oublierais et que tu m'aimerais pleinement comme je t'aime. Mais on ne peut pas oublier une trahison.
Je n'arrivais plus à te regarder dans les yeux sans penser à ce que je t'avais fait. Le pire c'est que je suis revenue vers toi comme si jamais rien ne s'était produit. Quelle idiote je suis !
J'aurais dû partir plus tôt. Dès les premiers signes. Mais j'espérais que tu partageais les mêmes sentiments que moi. Foutus espoirs !
Je suis partie aujourd'hui. Je suis partie pour ton bien ou pour le mien tout dépend du point de vue. Mais sache que ce que je fais c'est pour toi. Tu as suffisamment de fantômes pour en plus de ça devoir me supporter.
Je t'en supplie n'essaye pas de me chercher.

Je t'aime.
Kimberley.

Je posais la lettre et son enveloppe sur ma table de chevet et m'allongeais les bras derrière la tête. Je fixais mon plafond ne sachant quoi ressentir suite à la lecture de sa lettre. Trop de sentiments se bousculaient en moi et trop de questions aussi. Des questions sans réponse.
Alors elle était partie. Pour moi. Elle m'aimait. Mais est-ce que il en était de même pour moi ? Et maintenant qu'elle n'est plus là comment pourrais-je le savoir ?

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