Chapitre 7

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La rivière n'était qu'à quelques centaines de mètres derrière la forêt, c'était le seul endroit auquel nous pensions maintenant.

Maman disait dans sa lettre qu'il y avait un passage. Nous y serons peut-être en sécurité ?

Je tenais fort la main de Martin dans la mienne, en espérant qu'elle disait vrai.

Nous courions comme des dératés. Ils nous suivaient depuis qu'ils avaient enfin remarqué que nous avions fuit. C'étaient bien nous qu'ils cherchaient. Et n'avaient pas l'air d'avoir les meilleures intentions. Ils allaient beaucoup trop vite et gagnaient du terrain à chaque seconde. Il fallait que j'arrive à les semer avant de rejoindre la rivière. Les semer dans la ville qui m'avait vue grandir, en empruntant des raccourcis qu'eux ne connaissaient pas.

Nous traversâmes l'avenue du centre à vive allure en évitant quelques voitures qui nous klaxonnèrent. Je jetai un coup d'œil à Martin, il n'eut pas l'air aussi haletant que Julia et moi, il ne fumait pas lui. Il me regarda apeuré.

Mon dieu qu'est-ce qu'il se passe ?

À l'angle de l'avenue Eiffel, je tournai d'un coup, entraînant mon frère du bout du bras. Des bribes des jours précédents me passèrent en tête malgré moi. La mort de maman, la photo, le mot de Raphaël, l'homme à la gare, la mort d'Hector, et comment ils l'avaient tué. Tout ça était trop confus.

Juste après avoir prit l'angle, je tournai encore une fois pour entrer dans l'étroit passage séparant les deux gares et ainsi revenir sur l'avenue du centre. Un mal de tête me prit, ils étaient tout proches je le sentais. Mais hors de notre vue. J'espérai qu'ils ne penseraient pas que je puisse revenir sur mes pas. Nous courûmes aussi vite que nous le pouvions et nous nous réfugiâmes dans la cage d'escalier du dentiste, dont heureusement je connaissais le code par cœur. Je savais qu'il y avait une autre sortie du côté inverse du bâtiment qui menait au parking du centre commercial, ce qui nous permettrait de prendre un raccourci jusqu'à la forêt et je l'espérai, les semer.

Je me retournai encore et ne les vis plus. J'eus l'impression que mon subterfuge avait marché. Nous marquâmes alors une pause pour se remettre de la course.

Je pris Martin dans mes bras pendant que le rythme de nos souffles ralentissait.

— Mais qu'est-ce qu'il se passe ? demanda Julia, paniquée.

— Ils ont tué Hector, constata mon frère désolé.

— Je sais Martin, c'est horrible, répondis-je en lui caressant les cheveux, sa petite tête enfouie contre ma poitrine. Mais il faut leur échapper, on va essayer de les perdre dans la forêt et après on appellera la police. D'accord ?

Mais qu'allais-je dire à la police ?

Nous reprîmes notre course. Nous dévalâmes les escaliers du parking et nous sortîmes par le bâtiment qui se trouvait de l'autre côté de l'avenue.

Il donnait sur un énorme parc où j'avais l'habitude d'emmener Martin jouer, quand il était encore en âge de le faire. Il faisait nuit noire. Je me retournai et ne les vis pas, mais il fallait faire attention, le terrain était très dégagé, il aurait été facile pour eux de repérer trois personnes qui couraient. Même dans l'obscurité. Julia et moi décidâmes alors d'un regard de longer les murs des immeubles entourant le parc.

Nous arrivâmes au niveau de l'étendue d'herbe décorée d'une énorme statue représentant deux géants de pierre attablés autour d'une tasse de thé. Ils étaient cassés, la tête d'un des deux, était avachie par terre. Ils avait toujours été comme ça pour ce que je m'en souvienne, cela devait être une volonté du sculpteur. J'adorais cette œuvre quand j'étais enfant, maintenant je la trouvais immonde.

Je n'étais pas revenu dans ce parc depuis des années. Il me paraissait si vaste avant. Je me rendis compte, à présent, à quel point il était bien plus petit que dans mes souvenirs. Je me rappelai Julia et moi recueillant des chatons dans les buissons, de Raphaël me taquinant, du bras que je m'étais cassé à deux pas d'ici. Cet endroit était tellement chargé d'histoire pour moi. Au loin on pouvait apercevoir un labyrinthe fait de buissons dans lequel j'avais joué des dizaines de fois, dans lequel j'avais emmené Martin également. Nous passâmes devant en courant, ils ne semblaient plus nous suivre. Je me calmai un peu. Derrière l'air de jeux qui longeait le labyrinthe, se trouvait un tunnel en forme de boite de conserve allongée, fait de taule rouillée pour ses contours et de boue pour son sol. Nous l'empruntâmes et arrivâmes, enfin, dans la forêt.

Et aucune trace de nos poursuivants.

L'Origine des MondesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant