01- La Moisson des Jeux

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Je m'appelle Matt.
Comme tous les ans depuis désormais deux siècles, les nobles s'amusaient à regarder leur célèbre jeu; le Labyrinthe des Paradoxes. Chaque année, ils envoyaient les Chasseurs, un groupe de l'armée impériale, pour venir chercher sept filles et sept garçons de 15 ans jusqu'à 19 ans. Chaque année, on voyait des gens, comme vous et moi,  s'effondrer sur l'estrade, et emmenés par les Chasseurs dans des camions. On n'en n'avait jamais revus un seul. On racontait bien des choses sur ce qui leur arrivait, qu'ils étaient déchiquetés, dévorés, mis en pièce par des bêtes assoiffées de sang. Mais on n'en savait rien. Alors chaque année, on priait pour que ça n'arrive qu'aux autres, on perdait notre humanité pour un instinct de survie. On espérait qu'on allait pouvoir retourner à notre petite vie, tranquille, jusqu'à l'année suivante.
Mais cette année, je ne retrouverai pas la quiétude de mon lit, de ma chambre, de ma petite maison. Cette année, j'avais été choisi. Choisi pour participer aux Jeux. Alors je montai sur cette estrade, sachant pertinemment ce qui allait m'arriver. J'attendis la fin de la Moisson, et inévitablement, avec les treize autres, nous nous écroulâmes. Je finis par immerger dans ce qui semblait être une cellule, il y avait un peu de paille au sol, j'étais enfermé dans une cage, seul, comme un animal. Je m'approchai des barreaux et essayai de voir, il y avait toute une rangée de prisons semblables à la mienne, je vis que beaucoup étaient dans le même état que moi, regardant partout, espérant des réponses, les pupilles dilatées par la peur et la panique.
Ce fut alors qu'un homme, richement habillé, un noble qui-plus-est, commençait à s'approcher de nous, en nous scrutant comme pour nous évaluer. Puis il commença à parler:

Je suppose que vous savez pourquoi vous êtes là.
N'ayant aucune réponse il continua:
Non? Ah pardon, c'est vrai, personne n'a pu vous expliquer, excusez-moi. Donc, pour mon plus grand plaisir, moi Henry Greenfield, je vais vous éclairer sur la raison de votre présence. Vous allez être envoyés dans un Labyrinthe.
Il lança un regard circulaire sur toutes les cellules.
Je disais donc, vous allez être envoyés dans un Labyrinthe gigantesque, pour ravir les riches et les nobles. Libre à vous de choisir de travailler en équipe ou partir seul, mais la seule règle, c'est de sortir. Vous allez sûrement être poursuivis par nombre de choses, horribles, visqueuses, poilues, griffues. Mais toutes seront sans pitié pour les faiblards. Sur ces mots, il nous regarda satisfait d'avoir lancé un vent de panique, et enchaîna:
Des questions?
Personne ne répondit, tellement nous étions abasourdis. Nous allions être lancés dans un Labyrinthe dit gigantesque, avec des atrocités qui allaient nous poursuivre, à la recherche d'une sortie qui n'existait peut-être pas. Et ce, avec le risque qu'un de nos coéquipiers se fasse bouffer devant nous. Alors, cet Henry tourna les talons et quitta la pièce. Un silence de mort régnait. Alors, un des garçons brisa le silence.
J'propose qu'on fasse connaissance, si on doit travailler en équipe, faut au moins qu'on sache qui est qui... Donc moi c'est Phil.
-Moi c'est Enola, répondit une fille à l'autre bout de la pièce.
-Rachid
-Jane
-Tobias
Une multitude de noms, à la suite. Quand vint mon tour, j'essayais de dire avec la voix la plus claire possible mon prénom:
Moi c'est Matt...
-Karl
-Minata
-Aneeta
-Talia
-Joshua, mais appelez-moi Josh
-Théo
-Mary
-Et moi, c'est Elianor, heureuse de faire votre connaissance.
Alors on commença à discuter. Je voyais bien qu'il y avait déjà des prédisposition pour de potentielles alliances. Il fallait que je m'intègre à l'une d'elles. Avant même que j'ai le temps de dire mot, Phil m'interpella, il était face à moi et me demanda de manière assez basse, si ça ne me dérangeais pas qu'on fasse alliance lui et moi, ainsi qu'avec Talia et Minata. Je répondis que non, et que ça me rassurait. Tout le monde était près des barreaux, sauf une, Enola. Je compris alors qu'elle comptait faire cavalier seul. Je sentis notre véhicule (un train pensais-je) ralentir, puis s'arrêter complètement. Puis de nouveau, nous nous écroulâmes sur le sol, drogués par une fumée sortant du plafond.
Quand je repris connaissance, j'étais dans une chambre, seul. La télévision s'activa quelques-instants après. Je vis de nouveau la tête repoussante de Henry Greenfield, qui expliqua que nous devions mettre les habits qu'il y avait dans notre placard, de nous préparer, et de sortir de notre chambre à huit heures précises.
Le soleil brillait déjà, et le ciel dégagé offrait une vue imprenable sur le paysage désertique. Je me retournais vers mon armoire, l'ouvrit et attrapais les vêtements qu'elle contenait, un t-shirt gris, un short gris, et des chaussures de course, avec des chaussettes et un caleçon propre. Je vis que j'avais une salle de bain. J'y entrais et pris une douche. Ça faisait déjà une bonne journée que la Moisson avait eu lieu, et je n'avais pas pu me laver depuis. J'avais l'impression de renaître. Je sortais de la salle de bain, m'habillais, essayais tant bien que mal de me discipliner les cheveux, et regardais l'heure, il me restait environ cinq minutes tout au plus. Alors je m'assis sur mon lit, profitant du dernier confort que l'on m'offrait avant de me jeter dans un dédale mortel...

[Note de l'Auteur: Merci d'avoir lu ce premier chapitre (: ]

Le Labyrinthe des Paradoxes: In CarcereOù les histoires vivent. Découvrez maintenant