Il faisait encore jour, Rachid tourna la tête. Il ouvrit de grands yeux, et se mit à courir. Jane se retourna aussi et prit Théo par la main. Il fallait fuir, une créature les avait pris en chasse. Théo regarda derrière lui et vit une antre, sombre, mal éclairée, avec des os jonchant le sol à la devanture de cette grotte, creusée à-même le mur du Labyrinthe. Mais le pire dans cette vision peu rassurante fut le fait de voir des pinces sortant de la pénombre. Des pinces qui faisaient bien la taille de Théo. Le claquement répété de ces-dernières tranchantes comme des rasoirs ne rassurait en rien le petit groupe qui accélérait de foulées en foulées. La créature se détacha de l'ombre de son âtre. Ce qui inquiétait Rachid et Jane au point de courir sortit complètement de la grotte. Un scorpion géant se dirigeait désormais vers eux. Il arrivait rapidement, trop peut-être. Ses pinces continuaient de claquer, son dard était très long. Ses pattes étaient parsemées de petits poils noirs, et se finissaient en une pointe. L'horreur prit le dessus. Théo continua à courir, il fallait fuir, le plus loin possible, et espérer que la nuit vienne vite pour que cette bête retourne d'où elle venait. Cette chose était affreusement grande, elle prenait toute la largeur du couloir, si bien qu'on ne voyait plus ce qui se passait derrière. Rachid, qui était en tête, arriva à un sorte de carrefour. Il avait le choix entre trois couloirs pour continuer sa course. Il opta pour le couloir en face. Jane le suivit et Théo jeta un oeil dans le couloir à gauche. Il vit une silhouette humaine, se détachant de la pénombre qui s'installait au fur-et-à-mesure que le temps passait. Il ne savait pas qui c'était, mais il n'avait pas le temps d'y penser. Il suffisait de courir sans s'arrêter jusqu'à-ce que la nuit tombe. Théo espéra ne pas tomber dans un cul-de-sac, parce-que s'en serait finit pour eux. Leur petit groupe n'y survivrait pas. Théo accéléra, dépassant Jane. Elle le regarda, lui sourit et tourna la tête. Ils ne devaient pas se déconcentrer. La moindre erreur leur serait fatale. Ils continuèrent leur course effrénée à travers les couloirs interminables de ce dédale infernal. Rachid donnait la cadence, il tourna à droite, il priait pour que la nuit tombe rapidement. L'obscurité se faisait de plus en plus opaque. La nuit était très proche. Cependant, la pénombre était un handicap. Ils ne voyaient plus exactement où ils mettaient les pieds. Jane trébucha. Elle s'écrasa sur le sol. Théo se retourna et essaya de la relever. Elle était sonnée. Le scorpion arrivait. Il dût faire un choix. Il la regarda les larmes aux yeux, l'embrassa sur le front et reprit sa course. Il regarda une dernière fois en arrière. Il vit l'énorme forme de cette créature immonde s'arrêter. Il entendit le cri de Jane. Un cri strident, déchirant la nuit. Théo hurla à la mort. Il n'y croyait pas. Puis le silence. Le vent souffla dans le lierre qui tapissait les murs, faisait un bruit qui donnait froid dans le dos. La forme de cette chose fit demi-tour. La nuit était bien là. Ils étaient saufs. Théo pleurait. Pourquoi elle? Pourquoi Jane? Rachid lui tapa légèrement dans le dos et lui dit:
-Ça va aller mec?
-Non putain. Si je l'avais pas doublée, elle serait peut-être pas morte. C'est de ma faute.
-Dis pas ça Théo, c'est pas de ta faute. Tu pouvais pas savoir qu'elle tomberait.
Théo ne répondit pas. Et commença à marcher, ils devaient trouver un endroit pour se reposer. Ils finirent par s'arrêter dans un autre carrefour, ils se mirent à un coin, se couchèrent puis fermèrent les yeux. Il faisait froid. Le bruit du vent qui sifflait sur le coin du mur, inlassablement, les empêchait de sombrer. Puis Théo fit remarquer qu'il ne ressentait pas la faim. Rachid lui répondit que lui non plus. Ils ne comprenaient pas. Théo reposa sa tête, et attendit. Cinq minutes, dix minutes, quinze minutes. Le sommeil ne venait pas. Alors il se laissa aller, il repensa à son frère, puis à Jane. Il l'aimait. Mais il n'avait jamais pu lui dire. Elle était morte avant. Il sanglota en silence. Elle était morte, et ce, presque dans ses bras. Il revoyait son visage souriant les quelques-minutes précédant sa chute. Il entendait encore sa voix, sa douce voix. Il donnerait tout pour la revoir encore une fois pour la serrer dans les bras. Mais il savait que c'était impossible. Il finit par s'endormir. Morphée avait prit le dessus. Il était désormais entre les mains de son subconscient. Il sentit une main qui le secouait. Il ouvrit les yeux. La lumière matinale l'éblouit. Il se releva doucement. Sa tête lui faisait atrocement mal. Il vit Rachid, adossé au mur, il l'attendait. Il commença à marcher, doucement. Il fallait continuer l'exploration, et espérer ne pas retomber sur la caverne de ce scorpion de malheur. Il se souvenait très bien de cette grotte, creusée dans le mur du Labyrinthe. Il y avait des os, des crânes partout. Étaient-ils vrais, ou était-ce un simple montage pour faire peur? Il repensa à la course de la nuit dernière. Au crissement des pattes de cette chose. Son râle rauque. Le claquement de ses pinces. Des frissons lui parcoururent le corps. Il devait passer à autre chose, il y avait d'autres dangers ici. Le soleil n'apparaissait pas encore au dessus des murs du Labyrinthe. Théo était encore sous le choc. Il revit la pince se refermer sur le corps de Jane. Le claquement sec, et le silence qui suivit. Puis le râle de cette chose, reprenant son chemin dans le sens inverse pour retourner à sa grotte. Le cliquetis incessant de ses pattes, et le frottement de ses pinces sur les parois. L'horreur ressentie lorsque le corps de son amie avait disparut avec cette monstruosité. La culpabilité le rongeait. S'il ne l'avait pas doublée, elle serait en vie, et ce serait lui qui aurait été pris à sa place. Si seulement, il n'avait pas accéléré. Rachid lui demanda où ils pouvaient aller, ce qui eu comme effet de le sortir de ses pensées. C'était une bonne question. Où devaient-ils aller? Ils ne n'étaient plus que deux, et ils ne savaient pas comment sortir de ce cauchemar. Théo suggéra de tourner à gauche; mais il ne savait pas si ça les rapprocherait des autres, ou bien de la sortie. Ils étaient confrontés à eux-mêmes, laissés en proie à leurs peurs, leurs émotions, la faim et la soif. Cependant, Théo ne Ressentait pas les deux derniers facteurs. Était-ce la peur qui mettait en arrière plan les besoins vitaux? Il savait que Rachid ne sentait pas non plus la faim. C'était peut-être une simple coïncidence, mais Théo sentait que ça relevait de quelque-chose d'autre, mais cependant, il ne savait pas quoi. Il passa outre, il devait se concentrer sur le Labyrinthe et ses dangers. Les deux garçons tournèrent à droite, ils n'avaient aucune idée d'où ça les mèneraient, mais ils s'en fichaient. Au bout de quelques minutes, Rachid brisa le silence:
-Mec, j'ai l'impression d'être déjà passé ici..
-Rachid, on est dans un Labyrinthe, on peut pas passer deux fois au même endroit, surtout qu'on fait que de marcher en ligne droite.
-Ouais.. T'as peut-être raison..
Ils continuèrent à marcher, toujours tout droit, inlassablement. Théo finit par déclarer que ce couloir était étrangement long. Rachid acquiesça, cela faisait désormais une bonne demi-heure qu'ils n'avaient pas changé de couloir. Théo commença:
-Rachid, dis, ton impression de tourner en rond, ou je ne sais quoi, tu l'as toujours?
-Et comment! Je vois toujours la même fissure sur le sol.
-C'est bizarre... Y'a un truc, genre un piège, je sais pas...
-Ouais, un piège ou un paradoxe...
-Attends, un paradoxe?
-Bah, oui, comme l'escalier d'hier, ou un truc dans le genre.
-Ouais, attends moi là.
Théo recommença à marcher, il avançait, encore et encore, cependant, au bout de plusieurs minutes, il se retrouva à son point de départ. Il comprit que c'était donc un couloir sans fin, et bel et bien un paradoxe. Les deux garçons firent demi-tour. Il ne fallait pas rester là, c'était trop dangereux, car si un monstre les trouvait ici, ils ne pourraient pas fuir. Ils arrivèrent au carrefour où ils avaient choisi ce maudit couloir. Il prirent à droite, et continuèrent à marcher. Après ce qui leur semblait plusieurs heures de marches, ils entendirent un cri perçant. Un appel à l'aide. Ils coururent vers la source du bruit, pour voir ce qu'il se passait. Rachid arriva le premier face à un long couloir. Il vit avec horreur Karl, qui essayait de ramper. Il était recouvert de sang, son sang, exactement. Théo arriva et eut la même vision tragique. Du sang sur le sol, du lierre arraché, recouvert de ce liquide écarlate. De profondes entailles dans les murs,et Karl, amputé de ses jambes, le visage recouvert de griffures profondes. Il n'avait plus ses lunettes, il ne les voyait sûrement pas. Il appelait à l'aide. Théo chercha la cause de cette horreur. Il leva les yeux, et aperçut une forme. Courbée, avec des cornes, de longues griffes acérées, des dents qui dépassaient de la gueule ce cette chose. Une peau fissurée, des petites ailes brisées par endroits. Théo comprit ce que c'était. Une gargouille. Une gargouille vivante qui en voulait à leur vie. Théo recula, accompagné de Rachid. C'était soit Karl, soit eux. Le choix fut rapide. Il firent demi-tour, tournèrent à gauche, et commencèrent à courir, aussi vite qu'ils le pouvaient. Ils entendirent Karl, hurler à la mort, puis le grondement de la Gargouille qui arrivait sur lui. Ils comprirent que c'en était fini pour Karl. Il fallait se faire une raison; beaucoup mourraient ici...[À Suivre]
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Vous trouvez que ce chapitre est assez complet?
Et surtout, que pensez-vous du système de "flashback" que j'ai utilisé pour écrire ce chapitre, et si vous voudriez en avoir d'autres sur d'autres groupes :3
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Le Labyrinthe des Paradoxes: In Carcere
Science FictionAn 2434: Sept adolescents, sept adolescentes, Un Labyrinthe, une sortie. Paradoxes, bêtes hideuses et sanguinaires. Ils y sont emprisonnés, le but du Jeu? Courir, Survivre, Sortir. Bienvenue dans le nouveau jeu Infernal des personnalités dérangées: ...