Et son coeur se consuma

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La nuit, tout avait des accents particuliers. L'ambiance était différente. Magique pour certains, effrayante pour les autres. Lui, appartenait à la première catégorie.

Accoudé au rebord de son balcon, il observait la ville qui s'étendait à perte de vue sous ses yeux sombres. Il adorait cette ambiance un peu électrique qui s'en dégageait. Même la nuit, la ville ne dort jamais. Il suffisait de tendre l'oreille pour écouter les bruits des voitures, les sirènes, les cris des jeunes qui sortent en boite. Les écouter sans vraiment savoir d'où ils viennent. La ville était vivante. Et ça le rendait vivant lui aussi.

Après, il fallait ouvrir l'œil. Admirer les petits points de lumière de toutes les couleurs, sans savoir à quoi est ce qu'ils correspondent. A l'est, cette grande flaque de lumière jaune artificielle, s'agissait-il du stade éclairé? Ou encore ces minuscules tâches disparates au loin. A quel building appartiennent-elles? Il était à la fois amusant et frustrant d'essayer de deviner où elles se trouvent réellement. Parce qu'il ne le saura jamais vraiment. A chaque nuit une réponse différente.

Ensuite, il y avait les sensations. Apprécier le métal froid du balcon sous ses doigts, dont il était sûr que la matière allait imprégner l'odeur sur sa peau. Plisser les yeux devant le vent glacial qui frappait son visage, et frissonner en se maudissant de ne pas avoir pris de veste. Mais il n'avait aucune envie de retourner à l'intérieur, et de retrouver la chaleur rassurante de son appartement. Cela gâcherait toute la magie du moment, comme c'était presque le cas avec la lumière qui transperçait la baie vitrée derrière lui.

A cet instant il y avait juste lui, la nuit, et la ville dans toute sa splendeur.

L'envie de fumer se fit ressentir. D'un geste mécanique qu'il avait déjà exécuté des centaines de fois, il sortit un bâtonnet bicolore de son paquet, et le logea entre ses deux lippes rosées. Le paquet de nouveau caché dans la poche arrière de son jean, il chercha son briquet. Il pesta. Pas moyen de mettre la main sur ce fichu briquet. Enfin, après de laborieuses secondes de recherches, il le retrouva. L'objet était tout simplement coincé entre le paquet de cigarette, et le tissu qui recouvrait son postérieur. Avec un grognement de satisfaction, il pu enfin allumer sa précieuse cigarette.

En tirant la première latte, il songea. Il pensa à son passé, à la raison qui l'avait poussé à allumer sa première cigarette. Il voulait juste faire comme ses amis du lycée, et paraître cool. On ne pouvait nier qu'une personne avait tout de suite plus de charisme avec une clope à la main, plutôt qu'une autre avec les bras ballants le long du corps. Oui, mais eux au moins, leurs poumons sont purs.

Deuxième latte. La fumée s'immisça le long de sa gorge, avant d'emprunter le chemin inverse, pour s'échapper de la où elle était venue. En vérité, il s'agissait à l'époque de se faire accepter par sa bande d'amis. Il était le seul à ne jamais avoir bu, à ne jamais avoir fumé, et à être toujours puceau. Aujourd'hui, il pouvait dire qu'il les battait dans les deux premières catégories. Pour la troisième, c'était un peu compliqué. Même si au final il arrivait à séduire (péniblement) la gente féminine, il avait plus de difficulté à les mettre dans son lit.

Cœur de Plumes [Recueil de nouvelles]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant