Rien qu'une question de

Bon Sens

Je descends la rue Sainte Catherine, mon béret rouge se distingue dans la foule. Mes gestes sont posés, précis, réfléchis. Je stoppe ma trottinette électrique devant la boutique qui m'intéresse. Je range mon codex dans mon sac à dos et pousse la porte de l'Apple Store. J'aborde un des vendeurs robotiques alignés près du mur. Aussitôt, sa petite lumière de veille s'éteint et il s'approche de moi, plaquant un sourire commercial sur son visage parfait.

« Je peux vous aider ? »

Gênée par le vide de sa constance robotique, je débite la raison de ma présence en ce lieu :

« Bonjour ! Je viens chercher un colis au nom de Damien Couey.

- Bien entendu. Puis-je vérifier votre carte ? »

Je présente mon bras, poignet découvert, et il passe un détecteur au-dessus de ma carte intégrée. Pendant l'analyse, j'observe rapidement les lieux. « Votre robot : le meilleur esclave jamais conçu... Par Apple. » Voilà le slogan de l'affiche qui trône sur la porte de la réserve. Un sourire satisfait étire le visage du robot-vendeur quand le voyant vert s'allume avec un peu de retard.

« Tout est en ordre, Mademoiselle. Veuillez me suivre. »

Je m'exécute et en profite pour regarder autour de moi. Je ne viens pas souvent ici, et d'habitude on me donne directement mon colis. Ce robot doit être nouveau, il applique les procédures à la lettre. Un grand 3 sur son front indique sa génération aux heureux acquéreurs qui fréquentent le magasin, et en l'occurrence ce qu'il sait ou ne sait pas faire. Tous les robots commerciaux se doivent d'être étiquetés, pour informer la clientèle qu'elle ne s'adresse pas à un être humain.

Le vendeur revient bientôt avec mon carton. Je retourne dans la rue bruyante, les bras chargés. Mon codex se déplie en remorque, je l'accroche à ma trottinette. Les transformations de ce petit cube noir indispensable sont depuis quelques années relativement incroyables. Il faut que je le mette à jour. Je m'élance d'un rapide mouvement du pied.

Devant ma porte, je tape le code et monte à grandes enjambées, le colis soigneusement glissé sous mon bras alors que ma trottinette est prise en charge par le rangement automatique du placard au rez-de-chaussée. Je déverrouille mon appartement du troisième et entre, encombrée. Ce lieu me tue depuis l'accident de Damien. Je l'ai partagé avec lui durant les meilleures années de notre vie.

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