Jour 3
Une troisième nuit blanche. Je n'arrive pas à dormir malgré le silence oppressant qui règne dans cette pièce. J'ai finalement décidé de retourner dans mon lit, au milieu des quatre autres enfants avec qui je partage la chambre. L'un d'eux, un garçon noir allongé dans le lit à côté du mien, m'a parlé il y a quelques heures, avant de s'endormir. Il m'a demandé mon prénom, et mon histoire. Mais je ne savais pas quoi lui répondre. Alors je lui ai menti ; je lui ai dit que je ne me souvenais de rien du tout, que tout avait disparu de ma mémoire car un objet était tombé sur ma tête durant l'un des tremblements de terre. Lui s'appelait Konan, et était dans le groupe 3. Je ne lui avais jamais parlé, je n'avais même aucun souvenir de lui. En fait, je n'avais jamais fait attention aux autres enfants, seuls mes amis comptaient pour moi. Mais à présent je me rends compte qu'il faut que je les protège tous, car ils sont tous coincés ensemble dans le même endroit. Ce qui arriverait à Colin, Luke, ou Isas, arriverait en fait à tous. C'est à cause de nous qu'on leur a effacé la mémoire, à cause de nous qu'ils pensent être des orphelins, n'avoir aucune famille... On leur a enlevé leurs souvenirs. Et je ferai ce qu'il faut pour ne pas aggraver la situation, même si je devrai faire des choses qui me répugnent, qui me brisent le cœur. Je suis sûr qu'ils le feraient tous s'ils étaient à ma place. Colin le ferait.
Konan m'a raconté les quelques bribes de souvenir qu'il lui restait de l'été dernier. Il se souvenait du sourire de sa mère, de l'odeur de la tarte aux pommes qu'elle faisait tous les dimanches. Il ne savait pas à quel point il était chanceux de se rappeler de ces petits détails. J'aurais voulu lui raconter mon histoire, la vraie, lui dire comment je suis arrivé ici, tout ce qu'il s'était réellement passé. Mais je ne pouvais pas. Je ne peux pas. Alors je vais l'écrire ici, dans ce journal, et peut-être qu'un jour quelqu'un le lira, je ne sais pas, peut-être que je le lirai pour me souvenir...
Ca s'est passé un mercredi, au milieu du mois d'Août, je ne me rappelle plus de la date exacte, ou en tout cas je préfère ne pas m'en rappeler. Ce n'est pas comme si je comptais fêter l'anniversaire de ma venue ici, après tout. Je me souviens m'être levé le matin et avoir entendu un cri provenant de la télévision que mes parents regardaient. Au moment où j'étais entré dans le salon, ils l'avaient éteinte. Mais j'ai quand même eu le temps de voir un homme allongé au sol, dans un mauvais état. Je pensais qu'ils regardaient un film, que ce n'était que de la fiction. Aujourd'hui je me rends compte que je me trompais. Ca fait du bien de me souvenir de comment j'étais avant, à quel point j'étais insouciant, à quel point j'étais encore un enfant. J'ai changé, je le sens, je ne vois plus les choses de la même façon. C'est vraiment très étrange comme sensation. J'ai l'impression que WICKED nous a volés notre enfance, ils nous ont obligé à devenir des adultes à seulement 6 ou 7 ans. Et personne n'a essayé de les stopper. Pas même nos parents. D'ailleurs, je suis certain que les miens n'ont même pas tenté quelque chose.
Anne, ma tante, avait toqué à notre porte en début d'après-midi, vers 14 heures je dirais. Pour une fois, ma mère l'avait laissé passer sans dire un mot. Elle s'était approchée de moi, m'avait pincé la joue en souriant puis avait posé sa main sur mon dos pour m'emmener au salon. Elle m'avait alors expliqué qui elle était, pourquoi je ne l'avais encore jamais vu et ce qu'on allait faire ensemble durant toute l'après-midi. Elle m'avait dit qu'on allait faire du shopping pour acheter un beau cadeau d'anniversaire pour ma mère. Et je l'ai cru. Je suis entré dans la voiture de mon plein gré, sans dire au revoir à mes parents, sans leur dire adieu. Après plusieurs heures de route, je m'étais endormi, et quand je me suis enfin réveillé, je me trouvais devant un grand bâtiment sur lequel le mot « WICKED » scintillait. C'est à ce moment-là qu'Anne m'avait annoncé que mes grands-parents étaient décédés et qu'il valait mieux que je coopère si je ne voulais pas que mes parents les rejoignent. Je suis toujours encore choqué par son manque de délicatesse. Sur le moment, je l'ai détesté. Mais elle faisait partie de ma famille, et sa présence ici me rassurait de quelque façon. Elle était ensuite devenue ma tutrice et j'ai pu apprendre à mieux la connaître, à mieux l'aimer.
Jour 4
Ce matin, je me suis réveillé vers 10 heures, j'ai finalement trouvé le sommeil quelques minutes après avoir écrit dans ce journal. Personne ne m'a réveillé ce matin, les autres enfants ont pris l'habitude de ne pas s'occuper de moi et de m'ignorer. Quelqu'un avait dû leur dire que je n'assistais pas aux cours avec eux pour l'instant. D'ailleurs, je ne sais pas si Jacob me le permettra. Après tout, la seule chose qui l'intéresse est de trouver ce fichu remède alors m'empêcher d'avoir une bonne éducation est le moindre de ses soucis. Pourtant, je ne vois pas comment on pourrait les aider si on ignore tout de la science. Je ne comprends pas.
Aujourd'hui, j'ai revu la psychologue, elle voulait voir mon journal pour être sûre que j'avais écrit dedans, mais j'ai refusé. Je ne veux pas qu'une personne du WICKED lise ce que j'ai écrit. Même si je me doute bien qu'ils savent que je ne fais pas leur éloge dans ce carnet. Elle ne semblait pas déçue ou vexée que je ne lui permette pas de le lire, elle a juste haussé les épaules. On a ensuite discuté de tout et de rien, comme si tout était normal. Je me suis dit qu'il valait mieux que j'entre dans son jeu, que je paraisse le plus calme et joyeux possible pour qu'elle me lâche les baskets. Je ne détestais pas nos entretiens, mais ils paraissaient bien trop « hors du contexte ». Comme si une psychologue allait réparer toutes les mauvaises choses que Jacob avait faites. Comme si elle allait me retourner le cerveau et me « convertir ». Mais s'ils voulaient croire que ça marcherait, je vais les laisser espérer. Après tout, il vaut mieux qu'ils pensent que je suis de leur côté. Il vaut mieux que tout le monde le pense. Je pourrais ensuite faire comme bon me semble sans que personne ne me soupçonne. C'est la seule stratégie qui pourrait marcher sur le long terme. Je dois faire profil bas, comme Colin me l'avait déjà conseillé. Il faut que je fasse ce que Colin ferait à ma place.
Cette après-midi, j'ai pu voir Deedee et parler avec elle. Je ne sais pas si elle aussi joue un jeu, comme moi, ou si la psychologue avait vraiment réussi à lui retourner le cerveau. Elle paraissait détendue, calme... heureuse. Comme si elle avait enfin trouvé ce qu'elle cherchait depuis qu'elle était arrivée dans ce bâtiment. Elle ne parlait que du virus, des personnes malades à l'extérieur, des idées que les scientifiques avec qui elle avait discuté avaient pour fabriquer un remède. C'était comme si elle avait oublié tout ce qu'il s'était passé, ce qu'ils avaient vécu tous ensemble, avec leurs amis. J'étais, et je suis toujours, confus. Je ne sais pas ce qu'il se passe dans sa tête. Je la sens doucement glisser du côté de WICKED et je refuse de la laisser faire. J'ai besoin d'elle. Je ne sais pas encore dans quel sens, mais je ne sais pas si je pourrai tenir tout seul. Combattre WICKED seul.
Je dois réfléchir... Trouver un moyen de la faire changer d'avis, de lui ouvrir les yeux.
Sinon, cette journée était plutôt calme, les soldats et les scientifiques nous laissent tranquille pour l'instant. Evidemment, ils ne veulent pas nous « bousculer ». Quelle ironie ! Mais je ne vais pas me plaindre ; quelques jours de repos ne peuvent me faire aucun mal, surtout que je ne dors pas très bien ces derniers temps. En plus, j'ai le droit de visiter les laboratoires scientifiques dans une partie qui est interdite aux autres enfants. Et Isas en est bien au courant ! Enfin, il l'était... Bref.
Il est encore tôt, mais je suis déjà dans mon lit. A vrai dire, je m'ennuie beaucoup. C'est pourquoi j'ai emprunté un livre sur le cerveau humain, en espérant qu'il m'apprenne à mieux comprendre comment il fonctionne et, surtout, qu'il m'aide à m'endormir.
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L'Enfance de Newt - Journal de Stephen
FanfictionChers lecteurs de l'EdN, êtes-vous curieux de savoir ce qu'il s'est passé durant les 8 années qui séparent la première partie de ma fanfiction de la deuxième? Si oui, vous êtes bien tombés ; je viens juste de retrouver le journal intime de Stephen d...