Elle n'était pas belle. Je ne l'ai pas trouvée belle la première fois.
Ce n'était pas à cause de sa petite taille, ni de ses jambes potelées, ni de ses seins trop gros, ni de son ventre loin d'être plat, ni de ses cheveux en pagailles, ni de son maquillage inexistant, ni de la goutte de morve pendue à son nez, ni de ses vêtements détendus et décolorés, ni de ses doigts boudinés.
Je ne sais pas ce que j'ai trouvé laid, en vérité. J'ai toujours aimé ceux qui ne me ressemblaient pas.
J'aime les peaux mates, j'aime les yeux clairs, j'aime les belles formes, j'aime les petites mains et les petits pieds, les bouches pulpeuses et les sourires rieurs.
Elle ne me ressemblait pas.
Elle était aussi petite que j'étais grande, aussi grosse que j'étais maigre, aussi ouverte que j'étais renfermée.
J'étais plus belle qu'elle, mais elle était la plus heureuse.
Alors, je l'ai trouvée laide.
Il fallait bien que je me venge.Nous nous sommes rencontrées dans une bibliothèque. Elle était vêtue de ces affreux vêtements et ne cessait de renifler. Elle portait une pile de livres gigantesque dans les bras, si haute qu'elle lui cachait les yeux.
Ce qui devait arriver arriva: La pile s'est écroulée.
Elle s'est assise sur le sol, au milieu des bouquins, et les a patiemment empilés. Je la regardais faire, a l'autre bout du rayon, du côté philosophie. Elle, était vers les polars.
Je la trouvais laide, et je n'arrêtais pas de me dire ça.
« Elle est laide. »
Et je la pensais simplette: pourquoi avait-elle un sourire si épanoui, si ridicule ?
Quand ses livres formaient de nouveau une maquette de la tour de Pise, elle les arepris et à marché tout droit dans ma direction.
Je me suis vivement écartée, mais comme un fait exprès, elle m'est rentrée dedans. Nous ne sommes pas tombées, mais les romans, si. Ils se sont écrasés sur le sol dans un bruit de tonnerre.
J'ai rouspété.
— Tu vas les abîmer !
Elle s'était penchée pour ramasser les livres.
— Oui, s'est elle excusée dans un sourire. Je devrai faire plus attention.
Je ne l'ai pas aider à ramasser ses foutus bouquins. Je la regardai faire de haut, s'agiter dans tous les sens, absolument pas efficace. J'étais énervée, tellement énervée ! Je ne savais ni contre qui, ni pourquoi. Je pense que c'est son calme qui a réveillé ma colère, une colère restée si longtemps enfouie.
— Putain, mais arrête de sourire ! Pourquoi tu souris comme ça ?
Elle a levé des yeux emplis de bonté vers moi.
— Je souris parce que je suis heureuse.
Je suis partie, excédée.
Nous nous sommes revues plusieurs fois à la bibliothèque, et je ne sais pourquoi, parce que je la trouvais laide et parce que je la trouvais conne, mais j'ai fini par obtenir son numéro de téléphone. Je ne connaissais toujours pas son prénom.
Et je ne sais pas pourquoi, parce que je la trouvais laide et que je la trouvais conne, mais j'ai fini par l'embrasser.
Elle est le genre de fille à dire:
« C'est un beau jour de pluie. », a sourire à la vie et à écouter les contes de son grand-père, les yeux grands ouverts.
Elle est le genre de fille à lire des livres, de tonnes de livres.
Elle est le genre de fille à apprendre à parler une langue inconnue dont personne n'a jamais entendu parler.
Elle est le genre de fille à vouloir sauver le monde entier et a aimer son prochain.
Elle est le genre de fille que je n'aime pas.
Pourquoi je l'aime ?
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les mauvaises personnes
Short StoryC'est bien connu, il y a les bon'gens et puis les étrangers, les lopettes et les catins. Les mauvaises personnes.