les mauvaises personnes

Veste en cuir

Lui n'était pas un bad boy. Il avait toujours tenu à ce qu'on dise mauvais garçon.
Il n'avait jamais été très à cheval sur l'orthographe. Il n'était ni bon ni mauvais a l'école, mais de toute façon ce qu'il préférait, c'était les maths.
Mais bad boy, c'était un mot qui sonnait faux. Alors que mauvais garçon...
Ça lui faisait penser à Renaud. Il aimait bien Renaud, même si ses potes se foutaient de sa gueule.
La plus part aimait le rap, du rap US dur et pur, de celui qui te racle l'âme et te la passe à la javel.
Hakim avait toujours aimé la chanson française, et ses potes se foutaient de sa gueule, parce qu'il parlait le français comme une vache à lait.
Hakim avait arrêté l'école à 16 ans, et il était content, parce qu'il avait été jusque là.
Il aimait bien, et il aurait bien aimé continuer, mais il fallait qu'il travaille, pour aider sa mère.
Depuis qu'elle avait perdu son père, elle ne bougeait plus. Elle restait prostrée des journées entières dans sa chambre, amorphe.
Le père d'Hakim était blanc, et il s'appelait Jean. Sa mère était noire, elle s'appelait Jeanne, parce qu'elle venait du Congo et que l'on parle français au Congo.
Hakim ne savait pas pourquoi il s'appelait Hakim étant donné que ses parents étaient Jean et Jeanne. D'ailleurs, sa soeur portait le prénom de Rose.
Hakim s'était toujours demandé ce qui n'allait pas avec son prénom.
Le garçon n'était pas vraiment blanc, mais il n'était pas vraiment noir.
Et partout où il allait, il était un étranger. Parce qu'il n'était clairement pas assez blanc, mais pas non plus assez noir.
Une fois, il était allé au Congo, et un homme lui avait hurlé de rentrer chez lui. Il aurait bien voulu que les deux pays s'appellent, pour se mettre d'accord.
De toute façon, Hakim se sentait français.
Rose, elle, n'était pas chez elle. Elle était plus noire qu'Hakim, et plus belle, aussi, même si ce n'avait pas vraiment d'importance.
Elle allait souvent en Angleterre pendant les vacances (il ne savait trop avec quel argent), et un jour, elle n'est pas revenue.
Hakim s'est toujours demandé ce qui n'allait pas avec les pays étranger pour sa famille.
Rose était partie et il était resté seule avec sa mère.
Toute cassée.
Alors Hakim avait arrêté l'école et les maths, et il s'était mît à travailler.
Un patron, avec un prénom tout aussi décalé que le sien (l'homme le plus norvégien du monde s'appelait Kim Tae Hyun), l'engagea dans une fabrique d'allumettes, ou tout le monde ne fait que tousser.
Toute la journée, il mettait ses bouts de bois dans des petites boîtes.
A la fin, il avait mal aux bras et au dos, et sa gorge le démangeait horriblement, mais il ne se plaignait pas.
Pour arrondir ses fins de mois, il jouait les pickpockets avec un de ses amis, encore plus pauvre que lui.
Lui distrayait le touriste, le camarade lui dérobait son portable, ses clefs de voitures ou son portefeuille.
Le jour où sa mère est morte, elle ne prononça pas un mot.
Elle n'avait plus parlé depuis six ans, de toute façon. Hakim ne s'en étonna pas vraiment.
Il fut seul à l'enterrement. Impossible de contacter Rose.
Il envoya une lettre à ce qu'il pensait être son adresse, mais elle resta sans réponse.
Et puis Hakim se fit prendre la main dans le sac. Son camarade était partit ou mort
, alors c'était lui qui dérobait, a présent.
Le gars n'apprécia pas trop qu'on fouille dans le Channel de sa copine.
Hakim rentra chez lui le nez en sang, une épaule démise et deux côtés cassées.
Avec son nez de boxeur, on se mît a l'appeler bad boy.
Il insista: vraiment, il préférait mauvais garçon. Si Renaud consentait a lui prêter une veste en cuir, lui n'avait pas vraiment les moyens de s'en acheter, il était certain que le rôle lui irait à merveille.

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Texte inspiré d'une chanson de Mickey 3D