point de vue de nastia.
- Qu'est-ce-que je fous là ? grommelai-je en m'observant dans le reflet du miroir sale.
La musique de l'autre côté de la porte était tellement forte que je n'entendis qu'à peine le propre son de ma voix, chose qui ne fit que me conforter un peu plus dans ma question. Qu'est-ce-que je foutais dans une boîte de nuit un jeudi soir - alors que je travaillais le lendemain - , dans un quartier qui m'était totalement inconnu, alors que je ne connaissais pratiquement personne ici ? Ah oui. Je n'avais, encore une fois, pas su dire non.
La chasse d'eau se fit entendre, et, de la seule cabine qui était occupée, en sortit une jolie brune bien qu'un peu trop maquillée, avec un style un peu trop vulgaire pour être belle toute en simplicité.- Qu'est-ce-que tu as dis ? me demanda Célia, les sourcils froncés, en se lavant les mains. T'as encore parlé en russe, j'ai absolument rien compris. Ou alors peut-être que j'ai trop bu.
Je me retins de lever les yeux au ciel, exaspérée par le gloussement qu'elle venait de pousser, comme si ce qu'elle avait dit était drôle. Elle ne s'était trompé sur aucun point. J'avais effectivement parlé en russe. C'étai un réflexe quand je me retrouvais seule, de parler dans ma langue maternelle, car, même si je pratiquais le français depuis des années, notamment depuis que je vivais ici, je ne pouvais pas m'empêcher, de temps en temps, de me replonger dans mon pays de naissance. Là où j'avais grandis.
Elle ne s'était pas non plus trompée quand elle avait dit qu'elle était probablement trop saoule. Nous étions là depuis seulement une heure, et elle avait seulement avalé deux cocktails, qu'elle ne marchait déjà plus droit. Encore quelques gorgées, et elle finirait par devoir s'appuyer contre les murs pour être sûre de tenir debout. Petite nature.- Je disais que ça puait le mort ici, mentis-je en passant ma main dans mes cheveux blonds pour essayer de les remettre en place.
- Bah oui, on est dans les toilettes d'une boîte de nuit, pas dans un château de princesse, rétorqua-t-elle en s'essuyant les mains sur sa robe noire beaucoup trop moulante avant d'attraper ma main pour m'entraîner avec elle. Tu viens ? Marc nous attend.
Le rappel du fait qu'elle était accompagnée de son petit copain, ce fameux Marc, ne fit qu'amplifier mon malaise. Merde, pourquoi avais-je accepté de venir ici ? Au fond de moi, je connaissais déjà la réponse à cette question. La vérité, c'était que je m'ennuyais. Et que je me sentais seule. Cela ne faisait que trois mois que j'étais en France, et, si au niveau de la langue, je n'avais eu aucun mal à m'intégrer, au niveau social, c'était totalement différent. Pour être honnête, depuis mon arrivée en France, la seule conversation qui en valait vraiment le coup, je l'avais eu avec Rick, le chauffeur du bus que je prenais presque tous les soirs après le travail, et avec qui j'avais grandement sympathisé. Je n'arrivais pas à aller vers les autres. Je ne savais pas si c'était à cause de mon passé, ou bien tout simplement à cause de ce côté inaccessible et associable que les parisiens dégageaient, mais en tout cas, je pouvais mettre ma main à couper que je m'étais probablement plus parlé à moi-même qu'aux autres depuis que j'étais arrivée en France. Alors forcément, quand l'une de mes collègues, la veille, m'avait proposé de sortir avec elle, je n'avais pas pu refusé, même si je ne connaissais rien d'elle hormis son prénom. Mon manque de vie sociale était tel que j'aurais été prête à sortir avec n'importe qui. Si j'avais su, je me serais abstenue.
Nous n'eûmes aucun mal à retrouver Marc et l'un de ses amis, dont le regard était un peu trop insistant sur mon décolleté, dans la minuscule boîte de nuit dans laquelle ils m'avaient traînés. Quand elle fut assez proche de lui, Célia sauta dans les bras de son petit ami, comme si cela faisait des mois qu'ils ne s'étaient pas vu, alors que ça devait faire une dizaine de minutes à tout casser. Je ne pris même pas la peine de m'exaspérer de nouveau, et, tout en les suivant dans un coin plus tranquille et intime de la boîte de nuit, à une table ou personne ne pouvait nous voir, je cherchais une excuse pour m'éclipser de là. Je compris que ce besoin d'excuse devenait de plus en plus pressant quand l'un des deux hommes, une fois assis à une table, sortit de la poche de son jean un minuscule sachet. La vue de la poudre blanche à l'intérieur fit immédiatement augmenter la température de mon corps, si bien qu'en l'espace de quelques secondes, j'avais l'impression d'étouffer. Ma gorge était serrée, et ma bouche était sèche. Si je restais-là, j'allais tomber dans les pommes d'une seconde à l'autre.
VOUS LISEZ
la fille du bus
FanfictionAssis au fond du bus, j'ai pris un ticket sans arrêt, La tête contre la vitre, je ne pense à rien, je l'admets. Tout d'un coup une fille monte, nos regards ne se croiseront jamais, J'ai pris de quoi écrire et je l'ai décrite dans mon carnet. (loneps...