Elysea

Prologue

Cette nuit-là, le vent était déchainé, la pluie battante résonnait contre les tôles en acier qui constituaient le toit d'une immense villa ou était perché la silhouette d'un homme immobile. Si immobile, qu'il était en réalité impossible de déceler sa présence. D'autant plus qu'il avait arrêté de respirer, pour qu'aucun indice ne puisse le trahir. Cela faisait plus d'une heure qu'il était caché, guettant le moindre indice suspect.

L'endroit dans lequel il se trouvait était magnifique. La villa était a seulement quelques mètres de l'eau d'un lac assombrie par la nuit. Les grandes baies vitrées de la villa laissaient apparaître un intérieur sobre mais luxueux. Deux faibles lumières provenant d'appliques fixées au mur éclairaient faiblement une chambre. Un immense lit était disposé au centre de la pièce où l'on pouvait deviner, d'après les nombreux plis du drap, deux personnes profondément endormies. Sans aucun doute, ils étaient loin de se douter de ce qui allait se passer cette nuit-là.

Malgré la position inconfortable de l'homme sur le toit, toujours tapis dans l'ombre, il n'avait toujours pas repris sa respiration. La position qu'il occupait lui permettait d'avoir une vision partielle du lac. Situé juste au-dessus de la chambre où dormait les deux inconnus, l'homme se tenait prêt à bondir à la moindre alerte. Alors que la pluie tombait de plus belle, il devait se concentrer pour entendre les bruits suspects et compenser le vacarme que produisaient les énormes gouttes d'eau sur le toit en acier. C'est à ce moment-là, qu'un bruit quasiment imperceptible le crispa entièrement. Un simple remous de l'eau, à plus de trente mètres, lui avait paru douteux. Il plissa alors les yeux, afin de distinguer la cause de ce bruit inattendu au milieu de la pluie battante.
Il remarqua alors que quelque chose sortait de l'eau. Une montée d'adrénaline lui parcouru le corps tout entier. Tout en fermant les yeux, une simple inspiration lui suffit pour le calmer. Erreur fatale. En une fraction de seconde, l'étranger qui était en train de sortir de l'eau se retrouva derrière lui dans un bruit électrique.
L'homme jura dans sa tête. Il venait de se trahir en reprenant sa respiration alors même qu'il avait réussi l'exploit de rester en apnée plus d'une heure. Il se releva alors en un instant et fit demi-tour pour faire face à l'individu qui venait de se téléporter derrière lui. Ce qu'il découvrit n'avait rien d'humain.

- Pourquoi es-tu là? demanda-t-il à la créature qui se tenait devant lui.

En guise de réponse, la bête lui sauta dessus avec une rage incontrôlée.
Pour éviter le coup mortel, l'homme du disparaître, se matérialisant à quelques mètres de sa position précédente. L'attaquant, qui n'avait pas vu l'esquive venir, percuta avec violence le rebord du toit, entraîné par l'inertie du coup qu'il venait de porter. Profitant de la désorganisation adverse, l'homme disparut une nouvelle fois, pour réapparaître dans la chambre légèrement éclairée. Le craquement électrique qu'avait produit sa téléportation fut suivit quelques secondes après par un second craquement. La créature l'avait suivi. Le vacarme produit par ses deux rematérialisations réveilla alors l'une des deux personnes qui était encore endormi quelques instants plus tôt. Un jeune homme ébouriffé, encore groggy par la fatigue.
Il n'eut même pas le temps de crier de stupeur qu'un éclair traversa la pièce dans sa direction. Au moment de l'impact, un bruit assourdissant accompagna le flash de lumière. Le souffle produit par l'explosion avait propulsé à terre l'homme, qui était quelques minutes plus tôt, en planque sur le toit. Sans réfléchir, il se releva rapidement pour voir où était la créature, auteur de l'attaque. Elle était là, à quelques mètres de lui, gisant sur la moquette de la chambre, inanimée.
Soulagé de ne plus avoir à livrer bataille, il se précipita pour porter secours aux cibles de l'attaque dévastatrice. En un coup d'oeil, il observa que la personne qui dormait encore pendant l'attaque, une jeune fille, était morte, elle aussi. Seule la cible principale respirait encore faiblement.
L'homme s'empressa de sortir l'individu du lit. Il le chargea sur ses deux avant bras, et dans un fracas sourd ils disparurent tous deux.