Chapitre 3

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Quand le bus s'arrêta, il était endormi. Ce fut Lucienne que le réveilla en lui tapotant la main. Il se leva, sortit et découvrit une allée menant sur une très belle cour bordée d'arbres. Lucienne poussa son fauteuil roulant, tout aussi émerveillée que lui vers le grand bâtiment blanc aux larges fenêtres. Quand il arriva devant la porte d'entrée, un médecin en blouse blanche les attendait en écartant ses larges mains pour leur souhaiter la bienvenue. C'était un homme, la quarantaine, aux cheveux poivre et sel, très énergique et accueillant. Aussi, quand il fit une accolade à Hans, ce fut un geste très amical. Hans le trouva tout de suite sympathique. Il se présenta :

« Bonjour, je suis le docteur Simon. Je vous souhaite la bienvenue au centre de rééducation Ally Condie. J'espère que vous avez passé un bon voyage. Je ferai de mon mieux pour que votre séjour se passe dans les meilleures conditions possibles. Malheureusement, c'est la guerre et il reste difficile de vivre comme avant. Chaque semaine, vous devrez faire un exercice d'évacuation avec les autres patients, qui risque d'être fort utile, malheureusement. Bien ! Je vais maintenant vous montrer vos appartements. Vous aurez deux chambres adjacentes reliées par une porte. »

Il se tourna ensuite vers Lucienne :

« Vous serez amenée à aider le personnel soignant car nous sommes en manque d'effectif » lui dit-il.

Il les mena ensuite à leurs chambres. En entrant dans la sienne, Hans remarqua tout de suite le lit qui trônait au centre et la grande fenêtre donnant sur le parc. La pièce était lumineuse et spacieuse. Quand ils se furent installés, le docteur Simon s'éclipsa car il avait une urgence, les laissant tous deux seuls la chambre. Lucienne lui demanda s'il avait besoin de quelque chose puis, quand il lui dit que non, elle s'éclipsa à son tour. Étant très fatigué, il se laissa tomber sur le lit et s'endormit tout de suite.


Le lendemain, il proposa à Lucienne d'aller faire une promenade dans le parc. Ils le parcoururent ensemble, se racontant des souvenirs d'enfance ou de moments joyeux d'avant la guerre. Au fil des semaines, cela devint une routine. Chaque jour, elle se dépêchait de finir son travail pour ne pas être en retard à leur balade quotidienne. Petit à Petit, un lien plus fort que l'amitié se créa. Quand l'un n'était pas là, il manquait à l'autre. Elle le regardait avec douceur, il la protégeait comme il pouvait. Ils rêvaient l'un de l'autre et les journées paraissent infinies avant la joyeuse balade, toujours trop courte.


Un soir, un bombardement eut lieu. Ce n'était pas le premier depuis leur arrivée et ils connaissaient maintenant le protocole par cœur mais Lucienne eut très peur car l'alarme n'avait pas sonnée. Ils étaient chacun dans leurs chambres à ce moment-là et elle le rejoignit, toute tremblante de peur. Elle se jeta dans ses bras, pâle comme un linge. Il la réconforta longtemps. Quand elle fût prête à bouger, il lui prit la main et ils descendirent dans les caves anti-bombardements. Ils se mirent dans leur coin habituel et il l'entoura de ses bras protecteurs. Ils se parlèrent à voix basse, s'apaisèrent l'un l'autre. A la fin du bombardement ils se levèrent et, dans un élan de joie, elle se jeta à son cou et l'embrassa. Réalisant soudain l'ampleur de son geste, elle s'écarta. Il la regarda quelques secondes, puis l'attira à lui et lui donna le baiser le plus merveilleux du monde. Elle passa ses bras autour de son cou et y répondit. Elle fourragea dans ses cheveux et il posa ses mains sur sa fine taille. Haletant, ils se séparaient à contre cœur. Certains personnes présentes les épiaient en souriant de leur amour, d'autres paraissaient choquées, outrées qu'une française puise aimée un allemand. Ils remontèrent ensuite dans la chambre de Hans, s'allongèrent sur le lit l'un contre l'autre et s'endormirent.


Quand ils se réveillèrent le lendemain matin, ils étaient toujours blottis ensemble. Hans ouvrit les yeux et embrassa Lucienne. Celle-ci lui sourit et l'embrassa en retour. Après s'être levée, Lucienne repartie dans sa chambre pour s'habiller. Ils se revirent qu'à leur balade du soir, au parc, main dans la main.

Quelques mois plus tard, le docteur Simon les convoqua :

« J'ai une très bonne nouvelle à vous annoncer : Hans vous pouvez rentrez chez vous. Vous arrivez maintenant à marcher normalement grâce à la prothèse que je vous ai donnée. »

A cet instant, au moment où l'on s'y attend le moins, Lucienne prit la parole :

« Mr Simon, cela fait quelques jours que j'y pense et je voulais vous dire que je démissionne. Hans et moi nous partons nous installer dans les Alpes.

-Je suis très content pour vous ! »

Et il les regarda sortir de son bureau avec un sourire d'adieu.

Soldat, au rapport !Où les histoires vivent. Découvrez maintenant