Chapitre trois

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J'ouvrai les yeux. J'avais un mal de crâne pas possible, ce qui me fit lâcher un juron très déplacé. Du genre "putain de bordel de merde" (comme ça c'est dit). Je regardai autour de moi et remarquai que j'étais dans le couloir de mon immeuble, juste devant ma porte. Je suis somnambule ou ça se passe comment ? En plus, dans ce genre de situation, on se réveille à l'hôpital ou chez soir, normalement. Vous savez, comme dans les films. Sauf que ma vie ressemblait plus à du dramatique que de l'eau de rose où un prince charmant s'occupait de moi sans que je le sache. Avant que je le baise, fallait qu'il prenne la fuite, puisque j'avis trop bu pour avoir toutes mes capacités de réflexion. Même s'il était plus âgé, j'aurais encouru pour viol.

Car oui, fallait bien reconnaître que c'est quelqu'un qui m'a amené jusqu'ici, et donc, il sait qui je suis en plus de savoir où j'habite. Etait-ce le gars de la veille qui voulait m'aider ? Peu importe, je le remercie pour toute la peine qu'il a eu à me traîner jusqu'ici, puisque j'empestais l'alcool en plus de peser mon poids (façon de parler, puisque je ne mange plus trop depuis quelque temps). Je fouillai mes poches et sortis mes clefs pour ouvrir mon appartement. Je m'y engageai puis allai directement prendre une douche. Avec la chaleur du jet d'eau, tous les événements de la veille me revinrent en tête.

-Putain. J'suis au chômage, c'est vrai.

Contrairement à toutes les personnes qui se laissent aller à la décadence et qui choisiront de se prostituer, je choisis plutôt de garder la tête sur les épaules, comme je l'ai toujours fait, et optai pour la solution la plus sage : chercher un autre travail. Par contre, un petit repos s'impose quand même avant de m'y mettre. C'est-à-dire... un mois. Minimum. Je le méritais bien ! Avec un patron hyper chiant et des collègues qui ne sourissent même pas, fallait bien que je récupère des forces.

Je sortis de la salle de bain et allai prendre de l'aspirine pour faire passer la gueule de bois. Je soupirai tout en séchant mes cheveux dans la serviette, en attendant qu'elle se dissout dans le verre d'eau. Le médicament dégueulasse avalé, j'allai choisir des vêtements simples pour passer la journée en mode pépère : un t-shirt gris avec un jogging en laine noir. Et si j'allais me dépenser ? Ca fait longtemps que je n'ai pas été courir. Je vérifiai l'état de la batterie de mon téléphone. Jugeant qu'elle était suffisamment pleine pour aller faire une heure de musique, je cherchai mes écouteurs, les branchai, puis sortis de chez moi. Je fis quelques échauffements dans les escaliers et posai un pied après l'autre sur les boîtes aux lettres pour étirer mes jambes. La dame qui m'épiait l'autre jour choisit de revenir du marché à ce moment-là. Elle rumina quelque chose d'incompréhensible dans sa barbe, ce à quoi je répondis très cordialement :

-On est au même stade maintenant : seule et sans activité. Bientôt la fin, n'est-ce pas ?

Elle poussa un cri scandalisé avant d'accélérer le pas pour rejoindre son appartement. Je ris sous cape avant de sortir de l'immeuble, direction le parc de la ville. Je ne croyais pas à ce genre de roman où les joggeurs se rencontraient en se rentrant dedans et que par la suite, ils auraient une histoire. Un homme l'avait fait exprès un jour, mais je l'ai gentiment envoyé chier.

Trois quart d'heure étaient passés. Je continuais de courir dans le parc jusqu'à choisir de revenir à la maison. Ca faisait du bien de sortir prendre l'air en plus de se dépenser un peu, ça permettait de voir que l'on avait toujours la forme et le bon souffle. Toujours paré à l'attaque, dans quelconque situation qui surgirait des méandres du malheur que la vie me réserve. Elle me lance sans cesse au défi, me mettant constamment à l'épreuve. Je tapai du pied dans un arbre qui se trouvait malencontreusement à côté de moi, surmené par cette putain de vie.

-Pourquoi moi, putain ?!

Je donnais un coup de poing dans le végétale. J'étais à bout, mais je n'avais pas le choix. Je devais continuer de me battre, puisque telle était ma destinée. Je devais me montrer plus forte de jour en jour, afin de ne jamais glisser dans une vie encore plus dure. Je devais soutenir son poids, et ne jamais céder, sinon elle ne ferait de moi qu'une bouchée. Et il en était hors de question. Je collai mon front contre l'écorce, à bout de souffle. Soudain, j'ouvrai les yeux. Et si je m'inscrivais à des cours de boxe ? Ça me permettrait de me défouler un peu, en plus d'apprendre à me défendre s'il m'arrivait un jour de me battre. C'est fortement utile, surtout dans mon cas.

Une fois rentrée chez moi et une seconde douche prise, je me mis à l'aise dans mon canapé avec l'ordinateur sur les genoux. Je cherchai un club de boxe pas loin, et il y en avait un en face du centre commercial. Je n'avais jamais fait attention, mais il est vrai qu'un local portait une inscription en lettre gothique "club de boxe". Je cherchai le numéro de téléphone et, une fois ce dernier trouvé, je contactai le club.

-Bonjour monsieur, je suis intéressée par votre club et j'aimerai m'y inscrire... Cet après-midi ? C'est parfait, merci... à toute à l'heure.

Je raccrochai, le sourire aux lèvres. Trouver une activité qui cassait notre quotidien était un atout, il faut simplement trouver celle qui nous plait. Je posai l'ordinateur sur la table basse et passai dans la cuisine pour aller grignoter quelque chose. Je choisis des nouilles instantanées que je plongeai dans de l'eau chaude puis les dégustai dans le silence de la cuisine. Alors que je me levai pour débarrasser, mon pied marcha sur quelque chose qui émit un petit bruissement sur le carrelage froid de la cuisine. Je me penchai et haussai un sourcil : la fameuse lettre anonyme.

Je la saisis du bout des doigts puis la ramenai à moi. Je me décidai enfin à l'ouvrir, me demandant ce que c'était. Mon cœur se mit à battre quand je pris connaissance de son contenu : des billets de 100, par dizaine. Prise de panique, je plaquai l'enveloppe sur la table. Qui m'a envoyé ça ? Pourquoi ? Qu'ai-je fait pour obtenir une telle somme ? Les mains tremblantes, j'attrapai fébrilement l'enveloppe et comptai. Il y avait 100 billets de 100. Soit une somme de 10 000 €. Je remis tout dans l'enveloppe et allai la cacher dans ma chambre, en-dessous d'une des lattes de mon parquet. La cachette est plutôt simple, je sais, mais sur le coup j'ai du mal à réfléchir. Mettez-vous à ma place quand même, putain !

Je m'assis sur mon lit, les pensées toutes retournées. J'avais beau chercher dans mes souvenirs les plus éloignés, jamais je n'avais joué à la dealeuse ou quoi que ce soit. Alors comment se fait-il que j'ai reçu une telle somme ? Putain de bordel de merde. Qu'est-ce que je fais maintenant ? J'en profite ? Personne n'en saura rien, après tout. A part celle qui m'a envoyé cette enveloppe. Et si je liquidais le plus vite possible cet argent, je pourrais très vite mentir en disant que je n'ai rien reçu si quelqu'un qui est au courant de cette somme venait à me poser la question.

Ma décision était prise. J'allais pleinement en profiter. A commencer par mon inscription au club de boxe.

C'était avantOù les histoires vivent. Découvrez maintenant