Pantin [BoyxBoy] ✔

V

Nous arrivions devant une grande maison de campagne, environ une vingtaine de minutes plus tard.

Je sortais lentement de la voiture, ma main toujours présente dans celle d'Ellen avant de me diriger vers l'entrée, mon sac pendant sur mon épaule.

Une fois à l'intérieur, Ellen m'entraina à l'étage avant de me pousser doucement dans une chambre.

Elle était composée de deux lits, dont l'un semblait occupé, ainsi que d'une large armoire, appuyée contre l'un des murs.

Un papier peint bleu clair avait été posé sur les murs, ce qui me fit sourire et m'apaisa en un clin d'œil.

Le bleu clair avait toujours été ma couleur favorite.

- Tu accepterais de partager cette chambre avec moi ? Me demanda Ellen, qui était resté dans l'encadrement de la chambre.

Il n'y avait aucune supplication dans sa voix et pourtant, lorsque je me tournais vers lui, je sus, en plongeant mon regard dans le sien, qu'il fallait que je reste là.

Avec lui.

Et puis, de toute façon, je n'avais pas imaginé un seul instant, occuper une autre chambre que celle-ci.

Je déposais mon sac sur le lit inoccupé et commençais à ranger, avec l'aide d'Ellen, le peu d'affaires que j'avais pris avec moi.

Je refermais l'armoire, une fois toutes les affaires rangées et je m'installais sur le lit, vite rejoint par Ellen.

Il me faisait l'effet d'un petit enfant fragile, qu'il fallait à tout prix protéger.

Mais tout comme moi, il n'avait plus depuis longtemps, la carrure d'un enfant.

Après une légère caresse sur mon épaule, Ellen quitta en silence la chambre, retournant au rez-de-chaussée.

Il me laissa seul dans cette pièce, comme s'il souhaitait que je m'imprègne des lieux, sans présence parasite.

Je n'avais pourtant rien dit mais il semblait avoir compris que j'avais besoin d'être seul un moment.

Je souriais et m'allongeais en silence, m'endormant rapidement sur ce lit que je m'appropriais peu à peu.

J'étais totalement vidé.

Epuisé.

Et ce, malgré que je n'aie rien fais de spécialement épuisant.

Car j'étais tout simplement épuisé psychologiquement.

La voix de Tane, informant toute la maisonnée qu'il partait faire les courses, me réveilla et je sortis de la chambre en m'étirant, rejoignant Ellen au rez-de-chaussée.

Ellen était à genoux sur le sol du salon, entre les canapés.

Ses coudes étaient appuyés sur la table basse et il remuait doucement les doigts de sa main droite.

Je m'approchais lentement de lui pour ne pas le surprendre et me postais à ses côtés, observant ce qu'il faisait.

A chacun de ses doigts, une ficelle était accrochée, menant chacune à un membre rembourré.

Un pantin.

Un foutu pantin désarticulé qu'Ellen manipulait avec une aisance malsaine.

Ellen ne tarda pas à détacher son regard de son pantin, pour le poser sur moi.

Je le laissais me détailler sans rien dire, mon regard se baladant sur son visage.

J'avais l'impression de n'avoir aucun secret pour lui.

A son expression, il semblait me connaître par cœur.

Doucement, il détacha les ficelles de ses doigts, sans me lacher des yeux et il se leva, faisant craquer ses genoux ankylosés.

Il avança vers moi, un sourire grandissant sur ses lèvres fines et fourra son pantin de tissus dans la poche de son jean.

- Jouons Wynaël.

Il me tendit sa main, que je m'empressais de prendre et le suivais lorsqu'il quittait le salon, son sourire ne quittant pas ses lèvres.

Il ne se stoppait que devant la porte de la cave avant de se tourner vers moi, son sourire ayant disparu de ses lèvres.

Je le regardais avec interrogation mais ne récoltait qu'un vague haussement d'épaules, avant qu'il ne déverrouille la porte avec la clé qui pendait au bout de la chaîne présente autour de son cou.

Un frisson d'angoisse me traversa alors, me ramenant subitement à une certaine réalité.

Je ne sais absolument rien à son sujet, ni à celui de Tane d'ailleurs et pourtant, je les suis aveuglement.

Ne serait-ce pas eux, qui, au final, m'utilisent et me réduisent à l'état de marionnette ?

Une satanée marionnette n'ayant plus aucune liberté d'expression.