L'ami d'Al et son ami: Al.

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Le deuxième œil s'ouvrit finalement. Alexandre Jardinet est un homme habituellement plein d'humour, de charme et de classe. Mais là, il lâcha un gaz qu'il devait bien retenir depuis quelques semaines tellement j'en sens moi-même les effluves nauséabondes.
« C'est pas de moi ça ! » se dit-il sérieusement, comme s'il venait d'être en contact avec la plus grande énigme de l'univers...
Un gémissement, issu d'un vieux canapé, qui aurait probablement été en cuir dans une autre dimension, le rassura immédiatement et fit remonter à sa mémoire tout un tas de souvenirs, dont celui de sa soirée passée dans son bar préféré du coin de la rue, à s'enfiler des bières apocalyptiques avec son pote Fred Practor, l'heureux propriétaire du gaz susnommé. Le bruit venait donc de l'ami d'Al.. Pas étonnant pour un gaz.

Al se révolta : « Tu sais que c'est probablement l'heure du petit-déjeuner ? Comment tu peux me faire ça ? »
- Avec mon arrière train! Comment tu veux que je fasse ?
- Bon, ben on va dire que j'ai rien dit...
- C'est quelle heure ?
Al jeta un œil (celui encore bien endormi, vous savez, le gauche) sur le merveilleux réveil qui trônait sur une sorte de table de nuit rétrograde et anti-conformiste de style Louis XVI après la guillotine.
- J'y vois flou ! dit Al, qui aimait bien être concis parfois.
- Quelle heure ? s'exclama Fred chez qui « J'y vois flou » aurait pu s'apparenter à « midi douze ».
- Attends j'arrive pas à faire les réglages ! Qu'est ce que j'ai bien pu faire de mes lentilles ?
- Tu portes des lentilles toi ? Tu ne m'as jamais dit que tu portais des lentilles ! Fred semblait tomber des nues devant cette nouvelle...
- Ben, si tu veux, je n'ai pas les yeux violets d'origine...
- J'aime pas ça moi les lentilles ! Dit Fred un peu bougon, allez savoir pourquoi.
- Pourquoi ça te donne des gaz ?
Fred regarda son ami d'un air interdit. Un peu comme s'il tombait sur un panneau de signalisation obligeant à tourner à droite, alors qu'il n'y a pas de route à gauche et qu'en plus on est à pied. Un silence lourd et pesant, dans le genre pas très léger, régna durant les quelques secondes que mit Fred à comprendre que les mots que Al venait de prononcer formaient en fait une phrase et que cette phrase était une question. N'étant pas à même d'analyser cette question, il décida arbitrairement de répondre par la même question.
- Les lentilles ça donne des gaz ? Finit-il par lâcher, son cerveau ayant bien du mal à appréhender la conversation.
- Laisse tomber... Dit Al, bien peu enclin, quelle que soit l'heure, à entamer une explication de texte sur ses blagues douteuses de début de journée.
- Sinon t'as une idée de l'heure ? Insista Fred.
- Mais qu'est-ce que ça peut bien te faire l'heure qu'il est ? Ca va faire deux ans que tu es au chômage, t'as une envie soudaine et irrépressible de pointer ou quoi? Quand tu donnes rendez-vous à quelqu'un tu arrives avec une heure de retard ou d'avance à tel point qu'on se demande si t'es pas branché en permanence sur l'heure solaire !
- Hé ho ! Ca va ! Du calme ! Tu te défouleras sur ton animal domestique, ton machin là, j'sais plus la marque...
- C'est un Caméroger ! Pas compliqué à retenir quand même ! Et je te signale que je n'arrive pas à mettre la main dessus vu qu'il s'est transformé en un objet de la maison et je ne sais pas lequel !
- Trop fort ce qu'on t'a offert ! Et quand t'as ouvert le paquet cadeau il ressemblait à quoi ton machin?
- A un paquet cadeau bien sûr ! J'ai cru à une blague ! C'est quand j'ai voulu ouvrir le deuxième paquet qu'il m'a mordu et que j'ai compris !
- Il t'a mordu ? Avec quoi il t'a mordu ? Ca fait mal une morsure de paquet cadeau ? T'as soigné ça au Bolduc ?
- Oui, je sais, je n'ai pas compris moi-même ! Mais on ne maîtrise pas grand chose avec ces animaux ! Et comme j'ai plein de trucs en double à la maison...
- Ah oui quand même ! Si déjà tu ne collectionnais pas les jeux de Mikado, ça pourrait faciliter les recherches...
- Ben voilà t'as compris, j'ai même pas cherché.
* * * * *




Al n'était pas vraiment un collectionneur. Disons qu'il avait commencé très jeune un nombre incalculable de collections, des plus classiques, comme les timbres, les places de cinéma, celles également des concerts auxquels il avait assisté, les films en cassettes vidéo, les cartes téléphoniques, les bandes dessinées de super héros,  les sous bocs, les films en laserdiscs, les pin's, les copines qui veulent jamais être plus que des copines, les films en DVD, les disques de hard rock, les jeux de société qu'il inventait lui-même et donc lui seul connaissait les règles, les petits soldats, les films en Divx, aux plus délirantes comme des pots de yaourt à boire dédicacés par ses amis, les transistors et autres résistances récupérés sur de vieilles télés définitivement en panne, les couverts en plastique de restaurants d'autoroute, les capsules de canettes, les bocs*, les films en FDFQCPJMO**




* Ne pas confondre. Il y a les sous bocs qui se glissent sous les verres dans les bars, et les bocs. Un boc est une expression typiquement Terrienne et française des années quatre vingt qui a totalement disparu de nos jours et qui signifie : « Se prendre la honte devant tout le monde ». Un peu comme se prendre une veste, même quand on n'a pas froid.



** Format Du Futur Qui Changera Plus Jamais ? Mon Œil !

H3G3 (42?) L'expérience ImprobableWhere stories live. Discover now