Nos deux compagnons étaient toujours collés sur leur lit respectif, dont l'un était un vieux canapé.
- C'est cool d'avoir un Caméroger à la maison ! Dit Fred. Ca permet d'avoir toujours un objet en double à la maison et qui en plus qui change d'aspect tout le temps ! Trop utile !
- Très pratique en effet ! Abandonna Alexandre.
- Sinon t'as l'heure ? demanda Fred d'un ton placide et léger.
- Tu sais que je craque déjà là ? Explosa Al qui savait dans certains moments prouver que même avec ses lentilles, il pouvait avoir les yeux violets.
Fred, restait pantois, dans cette attitude que lui connaissait très bien Al et qui avait tendance à le faire passer de la colère à l'hystérie. Mais un évènement allait interrompre ce conflit né de n'importe quoi. Improbable et inattendu, comme si nos protagonistes étaient bien au calme installés et détendus dans leur bain : le téléphone sonna. Nous sommes dans une époque où, malgré l'avance technologique prise dans certains secteurs, notamment des loisirs et la technologie, le bon vieux téléphone reste quand même le meilleur moyen de parler à quelqu'un quand il ne se trouve pas vraiment à coté de vous. Et ceci, que l'on appelle de l'immeuble d'en face ou d'un coin reculé de la galaxie d'Alphor du Centiare, dans le système solaire de Kasmoipalé-Rouhpêt, sur la planète Jmatunbon-Philme.
Al, dans un sursaut d'énergie dont il eut été difficile de trouver l'origine, jeta son bras sur le téléphone, sans doute dans le secret espoir de savoir qui appelait à cette heure-ci ou éventuellement à cette heure-là. Car le fin dramaturge et modeste narrateur que je suis, a su et ce malgré les pressions extérieures de mon entourage, tenir le suspense jusqu'au bout quant à cette fichue heure, dont on saura probablement plus tard qu'en fait on s'en fout.
Le combiné à l'oreille, écoutant attentivement, Al bleuit. Il tendit le téléphone à Fred.
- C'est pour toi....
- Hein ? Mais c'est qui ?
- L'horloge parlante....
Alexandre Jardinet est un homme capable de prendre des précautions infinies afin d'être certain de se réveiller à une heure dite le lendemain, alors qu'il n'a rien de particulier à faire ce jour là. De la précision dans l'inutile, ça ne fait pas de mal à l'irrationnel. Ce serait sa devise, si c'était une devise. C'en est peut-être une chez les Métolbulkiens, les fameux nains de la planète Métolbulk, qui sait ?
Mais Alexandre est aussi très doué pour laisser passer un rendez-vous hyper spatial hyper important parce qu'il regarde la 68 524ème rediffusion de X-Files, surtout si c'est l'épisode où Scully apprend qu'elle a un code barre dans le cou, et qu'elle va déclencher du coup la sécurité dans tous les hypermarchés de la nébuleuse de Beltégon-Vert. Sur ce, Mulder meurt de peur, ou, l'air amer, il fait un malheur. Je ne sais plus. En tout cas c'est très difficile à prononcer.
L'horloge parlante a l'avantage de donner l'heure exacte. En tout cas sur Terre et pour un endroit précis. Ça peut changer selon les pays bien sûr. Il n'a pas été possible de déterminer une heure Universelle pour l'univers, justement. Car sur Terre, l'heure fait soixante minutes alors que sur Chonof-Zedèd, une superbe planète romantique de la constellation du Zombie entièrement recouverte de glace bouillante, une heure comporte soixante minutes. C'est pareil me direz-vous, et en fait, oui. Mais si l'on compare la longueur des minutes entre les deux planètes, alors, là, c'est carrément identique. Ce sont les secondes en fait qui ne durent pas du tout le même espace de temps. Une seconde sur Chonof-Zedèd dure en fait quasiment l'équivalent de cinq années sur Terre. C'est étonnant. Ce n'est pas dément. C'est juste que la pulsation du quartz n'existe pas sur Chonof-Zedèd, vu qu'il n'y a pas de quartz du tout et encore moins de pulsation de quoi que ce soit. Lorsque l'on a voulu chronométrer la pulsation du quartz, on a donc envoyé une fusée bourrée de scientifiques sur une planète voisine qui contient ce précieux caillou. Enfin je dis voisine, c'est juste parce que c'est la plus proche, car le voyage dura cinq ans aller-retour. Cinq longues années pendant lesquelles ils en profitèrent pour faire toutes sortes d'expériences sur la meilleure façon de fabriquer de l'alcool à partir des pièces du vaisseau qui ne leur semblaient pas absolument vitales. Quand vint le jour de leur arrivée, ils étaient fins bourrés au vin de tableau de bord. Lorsque l'on demanda au moins comateux la mesure exacte de la pulsation du quartz, à celle-ci il rajouta très sérieusement les cinq ans du voyage. Plus une seconde bien sûr. De nos secondes à nous. De la Terre.
Sur Chonof-Zedèd, lorsque quelqu'un à qui vous demandez d'aller vous chercher un remède à la pharmacie d'à côté - car vous venez d'être piqué mortellement par un insecte dangereux – vous répond : « ok j'en ai pour une minute ! » vous mourez.
Mais en ce qui nous concerne, c'est l'heure de la bonne vieille Terre qui nous importe.
- Alors, dit Al d'un ton légèrement sec, tu sais l'heure maintenant !
- C'est dix heures dix ! s'exclama Fred !
- Oui j'ai entendu, et alors ?
- Et alors rien, je pensais qu'il était un peu plus tôt que ça.
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H3G3 (42?) L'expérience Improbable
HumorFans de Douglas Adams et du Guide du voyageur galactique ? Vous connaissez la signification de la grande réponse ? Ce roman est un hommage a l'absurde et aussi aux Monty Pythons et au café que je suis en train de boire en écrivant ces lignes. Vous a...