Chapitre 1

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- Nicolas si tu ne t'actives  pas, je te jure que tu vas te démerder pour  l'internat tu m'entends? Tu m'entends? Nicolas?!
Chloé hurle, au rez-de-chaussé, et je ne peux m'empêcher de rigoler tout bas. C'est tout ma sœur ça, s'exciter,  monter dans les tours, seule, sans que personne n'ai besoin de l'aider.  Cependant, je ne suis pas un monstre, alors je ferme ma BD, et me redresse dans mon lit, observant du coin de l'œil la neige tomber dehors. Le trajet des flocons est lent, hypnotique.
Il doit faire froid.
Des pas résonnent dans nos escaliers , et bientôt ma sœur apparaît dans l'encadrement de ma porte, et je grimace.
- Tu comptes sortir dehors habillée comme ça?
- Pourquoi ça te dérange? s'enquit-elle  en tournant sur elle-même.
- Non, mais tu vas avoir froid. On est plus en été Chloé...
Elle exhale par le nez et tire sur le bas de sa jupe courte en marmonnant dans sa barbe des bribes de paroles injurieuses.  A ma direction j'imagine. Comme d'habitude au final...
Je me lève enfin complètement, m'approche de la fenêtre, l'ouvre et ferme les lourds volets en bois. Notre maison est vieille. Une ancienne ferme que nous avons totalement réaménagés. Ça a été assez compliqué, car je ne cacherai pas que passer à travers le plancher du premier étage est assez perturbant lorsque l'on emménage.
Je secoue la tête, amusé en y repensant, et me tourne vers Chloé qui a saisit  ma valise, et est prête à quitter ma chambre.
- Tu n'as rien oublié?  Parce que tu repars tout de même pour un trimestre...
- Non, ne t'en fais pas. Et dans le pire des cas, j'ai ma carte bancaire avec moi, donc si il me manque quelques chose, je pourrais  toujours me l'acheter!
Elle hoche doucement la tête, et je m'approche d'elle pour déposer un baiser sur son front.
Ma sœur et moi, c'est compliqué. Ça l'a toujours été. D'ailleurs, je dis "sœur ", mais il serait préférable de dire "demi-sœur " . Nous n'avons en commun que notre mère . D'où les cheveux noirs, les yeux bleus et le teint pâle. A la base, nous ne nous aimions pas du tout. Car  après tout, chacun défendait son partie, son père respectif. Même si avec le temps, elle a finit par reconnaître la bêtise affligeante de son paternel. Mais bien sûr, le mal était déjà fait. Elle avait déjà prit ses mauvaises habitudes, comme le vol, la violence, la monter en pression rapide. Alors que moi, j'étais selon Chloé, "monsieur parfait". Toujours sage, obéissant, calme.
Le contraste entre nos deux caractères à d'ailleurs énormément étonné nos professeurs. Lorsque l'on est habitué à Chloé, me voir moi est assez déstabilisant.
- Nicolas, tu rêves la!  Allez, viens, si tu veux qu'on ai le temps de s'arrêter manger en route!
J'acquiesce, et la suit dans le couloir.
Me voilà repartit point un trimestre. Ça va être long. Très long. J'aime bien le lycée, l'internat, mais sans plus. J'y ai mes amis, mes marques, mes repères, maus ça s'arrête là. Je ne peux pas avancer nourrir une grande joie d'y  retourner à chaque trimestre. Çe serait mentir.
Notre vieux pick up est gare dans la cour, attendant sagement le moment où nous aurons besoin de lui. Le seul pouvant nous aider à sortir de Sempton. Notre vieux patelin perdu au milieu de nulle part. A l'époque raconte t-on, on utilisait des chiens et des traîneaux pour se déplacer' tant le temps était mauvais. De la neige, les trois quart de l'année.  Génial.
J'enfonce mon bonnet  sur mes mèches rebelles et prend place à côté de Chloé. Elle a au moins enfile un blouson, c'est un bon début. Reste plus qu'à lui faire  comprendre  que en hiver, on met des collants sous une jupe.
En plus, elle est mal épilée.

                       ...

Après environ une heure de route, nous trouvons un fastfood rétro, une vieille chaîne ayant presque totalement disparue. Un McDonald's. Le parking est presque désert hormis quelques scooter des neiges et une ou deux voitures brinquebalantes.
Le vent glacial nous mort la peau avec force, et je suis obligé de fermer un peu plus mon blouson, me donnant ainsi une apparence d'esquimaux.
Chloé rentre presque en courant, et je la suis plus posément, alors que les regards se tournent vers nous.
Pas étonnant. Un petit mec de dix-sept ans, avec une fille de vingt-trois ans, habille bien trop légèrement, et arrivant en plein milieu d'une tempête de neige, un dimanche soir, perdus entre Sempton et Terena...
Ça peu paraître bizarre, oui.
Alors que nous nous approchons du comptoir, je remarque un homme, seul, occupé à reluquer Chloé avec attention. Sans me faire remarquer par ma sœur , je lui coule un regard meurtrier avec un haussement de sourcil significatif.
Rapidement, nous faisons commande, et partons nous asseoir dans un coin du restaurant.
L'homme nous observe toujours. Je sens que ça va vite m'énerver  cette histoire.
Alors que nous mangeons en discutant, la porte de l'entrée du fastfood s'ouvre à nouveau, sur un groupe d'homme parlant plutôt fort, et habillés vraiment très légèrement.  Ils portent tous le même tee-shirt, accompagné d'un pantalon blanc.
Il doit s'agir d'un groupe de forains. Tout en eux me porte à croire que la supposition pourrait être plausible.
Ils commandent assez de nourriture pour nourrir un bus de joueur de foot alors qu'ils ne sont que cinq, et s'assoient à la table derrière nous. Leur âge m'a l'air de varier entre vingt et trente ans, peut être un peu plus.
Celui qui semble être le plus jeune d'entre eux m'interpelle; il semble sur la retenue, tentant visiblement de retenir un trop plein d'énergie.  Ses mains tremblent légèrement alors qu'il pioche dans son sachet de frites.
- Nico, tu m'écoute?
Je cesse d'observer le forain et braque mes yeux dans ceux de Chloé.
- Tu disais?
- Je disais, reprend t-elle  légèrement irritée, que tu devras te faire raccompagner à la maison aux prochaines vacances, parce que je serai en déplacement en Espagne, pour le boulot.
Un soupir m'échappe, et je laisse s'échapper une rondelle de tomate de mon sandwich.  Je n'aime pas quand Chloé part ainsi, loin, pour son travail. Journaliste est un métier noble, mais comporte tout de même des risques.  Depuis la troisième guerre mondiale, les journalistes se font rares. En même temps, la menace de se faire enlever plane toujours. Les journalistes du début du millénaire ont mal finis pour la plupart. Décapités par des groupes religieux extrémistes , ou corrompus puis tuer par les différents pôles d'affrontement durant la guerre...
Je ne peux m'empêcher d'avoir peur. Petite nature que je suis.
- Tu y vas pour quoi cette fois-ci?
- Un reportage sur un mafieux à Rome, qui faut beaucoup  parler de lui récemment. Rien de bien méchant, ne t'en fais pas.
- Tu feras attention hein?
Elle tend sa main aux obvies parfaitement manucurés vers moi et me relève le visage.
- Nicolas, ne t'en fait pas pour moi, je suis une grande fille.
Elle me sourit, avec convainquant, mais je reste stoïque.
- J'ai déjà perdu papa et maman, je veux pas te perdre toi aussi..., je marmonne en buvant mon thé glacé avec lassitude.
- Tu ne me perdras pas idiot ! Je compte bien te pourrir la vie encore quelques années! 
Elle explose de rire, et emporté avec elle les forains derrière nous. Son rire est communicatif, mais j'ai du mal à rire.  Entre elle et moi, la notion de perte est différente. Pour elle, qui a toujours vécu dans la rue,  avec son père, bandit, elle s'est habitué à la peur, à la violence, à la mort.  A l'idée que d'un instant à l'autre on pouvait mourir.
Alors que moi...
Lorsque  le gendarme, ce soir-la, a sonné à notre porte, pour nous annoncer que papa et maman ne rentreraient pas, j'ai un peu mal réagis. Du genre crise d'angoisse, évanouissement, urgences médicales.  Ma sœur, heureusement, a été la pour me soutenir ce soir-la.
Mon téléphone dans ma poche vibre, et je sursaute.
"Nicooo! Tu arrives quand? Tu devrais te dépêcher, il neige beaucoup à Terena!"
Je souris pour moi même en lisant le message de Raphael . Raff, c'est mon coloc de chambre à l'internat, et à la base, tout le monde pensait qu'on était frère. Peut être à cause des cheveux sombre? Sans doute même.
Une belle relation s'est tissée entre nous, désormais, je le considère un peu comme mon frère, en paradoxe à ce que tout le monde croyait à la base.
"J'arrive dans une heure à peu prêt. Il neige aussi de mon côté. À toute à l'heure Raff"
- Raphaël ? demande Chloé .
- À ton avis?
- Raphaël , conclut t-elle.
On échange  encore quelques bribes de conversation avant de terminer notre repas et de quitter  le restaurant.
Dehors, il neige encore plus fort que d'habitude, et en courant récupérer notre pick up, mon regard se porte sur une camionnette de cirque blanche de laquelle pendent lamentablement des affiches de spectacle.
La neige la recouvre presque entièrement. Les forains devraient se dépêcher, où ils auront la mauvaise surprise de retrouver non pas leur véhicule, pays un tas de neige!

                       ...

Comme d'habitude, et malgré la neige, les fumeurs sont devant le portail de l'internat, discutant sans aucun doute de tout et de rien, portes par la chaleur de la nicotine dans leur gorge. Je sors du pick up, resserre mon blouson autour de moi, et me frictionne les bras. Chloé ne sortira pas ; on s'est dit au revoir dans la voiture.
Rapidement, je récupère ma valise, mon sac de cours et mon sac de voyage et traverse la route avant de saluer quelques garçons et quelques filles que je connais dans le lot des fumeurs.  La grille d'entre passé, je longe un grand bâtiment nous servant et de cafétéria et de bibliothèque et soupire devant la salve de marche s'élevant devant moi.  Génial, avec ma petite valise pesant approximativement la moitié de mon poids, ça va encore être simple cette affaire!
C'est alors que j'entend des râles de mécontentement, provenant de quelque part dans l'ombre des marches. Je redresse vivement la tête, et avant que je n'ai pu réagir, une valise dégringole les escaliers  et atterrit à mes pieds, ouverte.
- Ok..., je susurre en observant le bagage éventré.
- Et merde!!
Des pas résonnent alors qu'une silhouette émerge de l'ombre et saute jusqu'à moi, survolant une bonne dizaine d'escaliers avant de se réceptionner à mes côtés.
- Excuse-moi!  J'ai été déséquilibrée par cette foutue valise, et c'était soit moi soit elle, alors j'ai préféré la laissé tomber! Je ne t'ai pas fait peur?
Je regarde, éberlué, la jeune fille devant moi comme si c'était la première fois que je rencontrais un autre être humain sur cette terre.
Cependant, voyante son silence et son regard insistant posé sur moi, je bafouille rapidement une réponse.
- Euh, non, non ne t'en fais pas. C'est juste que...wouah. Il est presque vingt-deux heure et je m'attendais pas à voir une valise tomber du ciel...
Elle éclate de rire et commence à ramasser ses affaires en continuant de glousser.
Profitant de ce moment de flottement, je la détaille un peu plus. La peau mate, de longs cheveux blonds très clairs,  presque blancs à la lueur de cette lune pleine de décembre.
Elle est grande et élancée, et porte un ensemble aux teintes claques faysqnt ressortir sa peau.
Intéressant. Je n'ai jamais vu cette fille avant. Elle doit être nouvelle.
Je penche la tête sur le côté et me hausse à mon tour pour l'aider. Mon geste, pourtant anodin, est accueilli d'un air soupçonneux.
- Quoi? je demande en lui tendant une paire de chaussette.
- Rien, c'est juste que je pensais que tu allais partir. Rien de plus.
Je souris pour moi-même alors qu'elle prononce ces mots.
- Ce n'est pas mon genre. Je m'appelle Nicolas.
- Acia, me répond t-elle en se relevant après avoir fermée sa valise. Je suis nouvelle.
- J'avais cru remarquer.
Alors qu'elle s'apprête à reprendre sa valise, je la lui subtilise et entame l'ascension des marchés, chargé comme un mulet.
- Rends-moi ça, s'écrie t-elle en me suivant.
- J'ai pas envie que tu te casses quelque chose. Laisse-moi te la porter jusqu'en haut au moins!
Elle me bouscule violemment  et récupère son bagage avec vivacité.
- Je n'ai pas besoin d'aide, siffle t-elle. Je suis pour l'égalité des sexes.
- Et moi de même, seulement tes convictions ne confondraient  t-elles pas galanterie et sexisme?
- Absolument pas. J'ai juste pas besoin d'aide.
Elle termine sa phrase d'un ton me signifiant clairement que la discussion est close, et accélère le pas pour me distancer.
Je remarque alors un petit sachet blanc oublié en bas de l'escalier. Sans hésiter, je redescend le prendre et le met dans ma poche, avec pour ferme intention de le rendre à Acia lorsque nous nous reverrons.

We only live twiceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant