4. La caravane

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Shéhérazade se repose calmement. Elle reprend rapidement des forces grâce aux soins de Yasmina qui se révèle très bonne avec elle. Alors que la nuit avance, la jeune femme se réveille. Un bruit a attiré son attention.
C'est encore Amir qui s'est de nouveau faufilé pour venir la voir. Il ne voulait pas la réveiller, juste la regarder car il ne se sent bien que lorsqu'il peut veiller sur elle.

_ Pardon bel ange, je ne voulais pas te faire peur ni te réveiller.

_ Tu ne m'as pas fait peur, jeune Amir, ne t'inquiète pas. Mais tu ne devrais pas être ici, je ne pourrais pas t'éviter une deuxième punition.

_ Tout le monde dort, je ne crains rien. Je voulais te voir, savoir si tu allais bien ?

Shéhérazade comprend ce que ressent l'enfant. Elle n'a peut-être que dix-sept ans mais elle a de l'expérience dans le domaine de l'amour, elle connaît ce regard que porte sur elle Amir, la princesse l'a vu à de nombreuses reprises dans les yeux ses hommes qui la convoitaient au palais, mais jamais avec une telle pureté et une telle innocence. La jeune femme en est touchée.

_ Je vais bien et ta sollicitude me touche, doux Amir. Maintenant pars avant de te faire surprendre. Je ne veux pas t'attirer d'ennuis.

_ Avant je veux savoir pourquoi tu m'as dit que tu étais princesse et pas à mon père. Et ta famille ? Tu as dit ne plus en avoir. Pourquoi ? Il est arrivé quelque chose au palais de l'Oasis de l'Est ?

_ Gentil et bel Amir, ta curiosité est perspicace. J'accepte de te répondre si tu me promets de partir tout de suite après ma réponse, sans tarder ni chercher à en savoir plus que ce que je te dirai. En échange je jure à mon tour de te donner plus d'explications si besoin est mais demain.

_ D'accord.

_ Je n'ai rien dit à ton père parce que je ne souhaite pas qu'il me ramène si jamais il découvre la vérité. Je te l'ai dit à toi car tu m'inspire une grande confiance et que je sais que tu tairas mon secret, mon instinct est fiable sur ce point. Quant à ma famille, il ne lui ai rien arrivé ou du moins pas dans le sens où tu l'entends. Je te dirai tout plus tard. Aller maintenant file, courageux Amir, tiens ta promesse.

_ Bonne nuit bel ange.

_ Bonne nuit petit cœur. Dors bien et à demain.

Le jeune garçon s'en va, content d'avoir obtenu une réponse aussi vague soit elle. Il en demandera plus demain.
Shéhérazade se recouche avec le sourire. Elle aime bien cet enfant. Il lui rappelle quelqu'un qu'elle a bien connu. Elle lui souhaite tout le bonheur du monde avant de dériver dans le pays des songes.
Le lendemain, avant l'aube, dans la douce fraîcheur de la nuit qui se réchauffe à l'approche du jour, la caravane se réveille et se met en mouvement. Les objets divers sont rangés, les tentes repliées et le tout est chargé sur les dromadaires. Shéhérazade qui a repris conscience en même temps que tout le monde aide du mieux qu'elle peut tout en ménageant sa cheville un peu douloureuse. Elle s'affaire à genoux à plier des tissus composant le sol des tentes. Puis quand vient l'heure du départ, elle monte sur une des bêtes avec l'aide d'une autre femme.
Aziz surveille tout du coin de l'œil et il voit qu'elle maîtrise parfaitement l'art de la monte, avec une grâce et une précision montrant qu'elle a reçu des cours. Elle a recouvert des cheveux avec un tissu noir qui lui recouvre en grande partie le visage mais la protège efficacement de la poussière et le sable soulevés par le convoi.
Amir aussi l'observe, prêtant à peine attention à la conversation que lui tient son meilleur ami, Boubarh.
La journée se passe, une pause est programmée à midi pour éviter le plus haut pic de chaleur puis quand la soirée s'annonce, le trajet reprend jusqu'à ce qu'il soit l'heure de s'arrêter et de dresser un nouveau camp.
Une fois tout terminé, Aziz convoque tous les membres de la caravane autours du feu pour leur présenter la nouvelle venue. Tous lui font un accueil chaleureux et charmant, lui souhaitent la bienvenue parmi eux. Shéhérazade apprend aussi qu'ils sont encore à vingt-quatre jours de voyage d'Al Mahara.
Elle dîne, en compagnie de gens prévenants et amicaux, puis s'éloigne avant d'être rejointe par Amir.

_ Bonsoir Shéhérazade, bel ange des cieux.

_ Bonsoir jeune Amir. Que puis-je pour toi ?

Elle sourit et lui aussi.

_ J'aimerai plus de détail sur ton histoire et ta famille. Si ça ne te dérange pas.

Le garçon a perdu son sourire pour un air plus calme et sérieux. Quant à la jeune femme, elle garde un sourire poli et calme, presque attendri. Elle regarde autour d'elle, ils sont assez à l'écart du reste du groupe qui soupe, écoute de la musique et danse.

_ Ce que je vais te dire doit rester un secret absolu, raconte la belle princesse. Donne moi ta parole que tu ne diras rien à personne. Jamais sauf si je t'y autorise.

_ Tu as ma parole. Sur ma vie.

Elle acquiesce puis commence :

_ Le pays de l'Est a bien changé, notre richesse et notre savoir nous sont montés à la tête. Les savants ne font plus rien d'autre que des banquets et des fêtes au moindre prétexte. La vie à l'Oasis de l'Est a bien changé. Mon père le vizir a perdu la raison. Il ne réfléchit plus et ne gouverne pas avec sagesse. Pour échapper à un mariage avec un homme ayant trois fois mon âge, j'ai fui. Je compte bien sauver mon peuple mais pour cela il me faut rentrer avec un pouvoir plus fort que la folie. J'ai besoin de l'aide d'un djinn. J'espère en trouver un à Al Mahara.

_ Shéhérazade, douce Shéhérazade, ton histoire est triste tout comme mon cœur de te voir en peine et en détresse. Permet moi de t'aider, je te promets que je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour... pour...

Amir est à court de mots. La princesse sourit et pose sa main sur celle de l'adolescent.

_ Tu as toute ma reconnaissance brave Amir et c'est avec joie que j'accepte ton aide. Elle me sera précieuse. Merci.

_ Tu m'es précieuse, bel ange. Dès que je t'ai vu, j'ai eu envie de te protéger. Et je le ferai.

ShéhérazadeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant