Chapitre 4

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《Nous allons commencer avec quelque chose de simple voulez-vous bien? Un petit croquis au fusain, rien de bien compliqué. Il faut que j'apprenne vos traits, qu'ils me deviennent familier. Asseyez-vous, tenez-vous droite, un léger sourire. Ayez l'air naturelle, le moins crispée possible.》

Marguerite s'empressa d'obéir tandis qu'André fouillait dans ses tiroirs afin de sortir le matériel nécessaire. La jeune fille inspira et laissa son esprit divaguer, le peintre effectua un petit sourire face au regard vide et rêveur de la jeune fille. Elle était en voyage dans les tréfonds de son esprit. Il saisit le fusain et se mit au travail. Elle avait une mâchoire délicate, qu'il voulait reproduire à la perfection. Quelques cheveux échappaient à son chignon et se dressaient sur sa tête, il accentua ce détail qui donnait l'air plus vivant au modèle. Comme si elle revenait d'une folle course dans le parc du château ou comme si elle avait ouvert la fenêtre et qu'une bourrasque l'avait saluée.
Il ne voulait dessiner que son visage pour l'instant, se concentrer sur son regard particulier. Il sentait comme une main invisible guider son fusain, il se laissait faire, c'était presque trop facile que de faire un croquis de Marguerite. Et c'était aussi plaisant car en la dessinant, une foule d'idées déferlait sur lui. Il voulait faire d'elle mille portraits. Il ne voyait plus qu'elle sur ses tableaux.
      Marguerite faisait preuve de patience et tentait de rester impassible, de ne pas laisser voir le fourmillement d'excitation qui montait en elle. Elle devenait de l'art! Elle se sentait sublime dans cette atelier, reine au milieu de ses terres, heureuse. Une sorte de catharsis, la vidant de tout et la laissant d'un calme plein et bienheureux. Le temps les dévorait, ils se laissaient faire.

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<Bien chère Alcée,

Je suis arrivée au château de Guermantes il y a près d'une semaine. Si seulement tu voyais cette merveilleuse demeure! Un énorme château en brique rouge et entouré d'un parc. Je commence bien assez vite à prendre mes marques mais je ne suis pas encore partie explorer le parc dans son ensemble. En revanche, je suis souvent sur la terrasse, à lire les sonnets de Shakespeare offerts gentiment par M. d'Ambreville.
       Venons-en au plus intéressant: les séances de peinture. C'est assez irrégulier mais je me suis vite habituée à cet emploi du temps chaotique. Parfois nous peignons sans cesse et d'autres fois j'ai toute la journée de libre. Mme d'Ambreville, la mère de mon employeur commence à me tolérer. Il lui arrive de sortir sur la terrasse et de s'asseoir sur une chaise à mes côtés. Elle me donne des conseils pour mettre en valeur ma figure, je lui en suis reconnaissante! La bougie ne devrait pas tarder à s'éteindre, aussi je te laisse ma petite soeur. Dis à maman et papa que je ne tarderai pas à leur écrire.
Je vous embrasse tous affectueusement,
                          Marguerite>

Elle plia la lettre et la glissa dans une enveloppe avant de souffler la bougie. Demain elle demanderait à André comment envoyer une lettre. Peut-être faudrait-il se rendre au village? Ce qui lui permettrait de visiter un peu les alentours du château.
     À travers les volets en bois la lune perçait, éclairant faiblement la chambre de Marguerite. La jeune fille se jeta dans son lit et remonta la couverture. Elle n'arrivait pas à trouver le sommeil, probablement à cause de la clarté de la lune, les nuits de pleine lune elle avait un sommeil quasi inexistant.
      Le château dormait et dans la solitude de la nuit, Marguerite entendit un craquement. L'imagination fantasque de la jeune fille la fit se cacher sous les draps, elle semblait avoir oublié que la nuit le parquet craque et le bois travaille. Son regard se dirigea vers le mur à sa gauche sur lequel il lui sembla voir passer une ombre. D'ordinaire, elle arrivait toujours si bien à dormir! Pourquoi les esprits malins avaient-ils choisi cette nuit pour se manifester.
N'y tenant plus, la jeune fille, mue par une atroce curiosité se leva et alluma sa bougie.
     La porte grinça et devant elle, le long couloir muet s'étalait. Prudente, elle se mit en marche, découvrant le château sous un angle qui lui était inconnu. Les portraits de la famille d'Ambreville grimaçaient à la lueur des flammes, les yeux exorbités, le sourire tordu. Marguerite frissonna mais continua son exploration. Derrière une porte, il lui sembla entendre un murmure. La jeune fille s'arrêta, alerte, l'oreille tendue. Mais l'esprit avait décidé de se taire. Le coeur battant, elle s'enfonça plus encore dans les couloirs sombres. Son imagination la guidait.
 
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《Avez-vous bien dormi?, demanda Mme d'Ambreville.
- Les nuits de pleine lune j'ai toujours du mal.
- Vous êtes comme moi alors. André a plus de chances, il n'a pas ce genre de problèmes.》

Marguerite hocha la tête avec un pâle sourire en mordant dans sa tartine. Elle avait passé une bonne partie de la nuit à errer dans la demeure, à la recherche du surnaturel comme dans ces nouvelles anglaises du siècle dernier qu'elle prenait plaisir à lire.
Marguerite s'était laissée prendre au jeu et désormais elle pensait le château hanté. Elle était persuadée que quelque événement sombre y avait eu lieu autrefois.
《Aujourd'hui nous sortons de l'atelier, il fait beau. J'aimerais vous peindre près du bassin., annonça André, la sortant de ses réflexions.
- Mais il y a du vent...
- Le vent n'empêche pas de dessiner. rétorqua-t-il》

        Il voulait que Marguerite regarde le bassin, l'air naturel et qu'elle feigne d'être intéressée. Il exigeait de la concentration dans son regard et elle lui obéit. Tendue vers le bassin comme si c'était son univers, son centre elle se penchait légèrement.
《Très bien. Ne bougez plus.》

Le vent agitait ses cheveux et ses jupes.  Sur le bassin, des vaguelettes frémissantes se créaient.

  Sur le bassin, des vaguelettes frémissantes se créaient

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⏰ Dernière mise à jour : Jan 16, 2017 ⏰

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Marguerite, muse de la Belle Époque Où les histoires vivent. Découvrez maintenant