Une longue et désagréable vibration se fit entendre. Alerte intrusion, conjectura ma logique, toujours remplie de l'activité de mathématiques que je venais de finir. Quinze minutes d'exercices de confinement, et ce serait la fin du cours. Dans un bruit infernal, des tables furent renversées, des feuilles, collées aux vitres sans rideaux, et les rideaux fermés. Moins d'une trentaine de secondes après l'alarme, nous étions allongés sur le sol, derrière nos tables, dans une salle sombre, à espérer que l'intrus ne vienne pas nous exterminer malgré son inexistance. Car ce n'était qu'un exercice. Mais malgré cette vérité, je ne pouvais pas m'empêcher de frissonner au moindre bruit entendu, qu'il soit produit dans la salle où à l'extérieur.
Recroquevillée derrière ma petite table, à moitié cachée sous ma chaise, les quinze minutes de confinement étaient cette occasion que j'avais toujours fui de réfléchir au sens de la vie et de la mort. À quoi servait ma vie, pourquoi avais-je peur de la mort alors que je n'avais jamais demandé à vivre, quand allais je mourir ? Ce genre de questions trottaient dans ma tête. Pourtant, je n'avais jamais essayé de répondre, m'arrangeant pour m'occuper et moins y penser. Mais telles une colonie de fourmis, elles étaient restées, se multipliant pendant que je les ignorais, prêtes à m'assaillir au moindre relâchement de ma part. Et ça avait fini par arriver. Rien que de me voir, les sourcils froncés, les yeux probablement perdus dans le vide, suffisait à comprendre que je me prêtais à une activité hautement inutile et malmenant mon cerveau trop fatigué pour faire ce genre d'efforts.
Les quinze minutes finirent par se terminer, la même sonnerie qu'au début retentit, et après une ou deux minutes de rangement, tout dans la salle était rentrée dans l'ordre. Des sourires étaient échangés entre ceux qui avaient pu remarquer que dans quelques minutes, il ne seraient plus là - ce qui était partiellement vrai. Je leur tournai le dos, et me dépêchai de terminer l'exercice pour ne rien avoir à faire plus tard, chez moi.
J'en étais à mon dernier exercice, quand des pas retentirent dans les escaliers. Étrange, la sonnerie était prévue dans une trentaine de secondes. Ignorant ce bruit de fond, je décidai de continuer mes problèmes, essayant de me concentrer un minimum.
Les bruits de pas s'étaient rapprochés, et je pouvais savoir que les personnes en était la cause étaient devant la porte de la salle.
La plupart avaient continué plus loin, si j'en croyais mes oreilles. Mais au moins un était resté devant la salle. Qu'était-ce...
La sonnerie ne retentit jamais. La porte s'était ouverte dans un fracas au moment même où elle aurait dû nous transmettre son message de fin des cours, dévoilant une personne armée.
Des cris, des bruits de course, de corps qui s'entrechoquent, et des coups de feu. Et moi, dans toute cette pagaille, essayant de garder mon calme.
Quelques pas en direction de la seconde porte, lentement, de façon à ne pas être remarquée. Me glisser dans l'entrebâillement de la porte, ne pas la refermer, espérer que quelqu'un d'autre fuira aussi, et sortir de l'établissement scolaire sans me faire remarquer, sans jeter un regard derrière moi, seulement là où j'allais.
Ça avait réussi. J'étais enfin dehors, j'étais vivante. Traumatisée par ce que j'avais vu malgré moi, mais vivante quand même. Et entière. Aucune blessure. Mais je n'avais plus aucun camarade non-plus.
Un sentiment de désespoir et de culpabilité. Une phrase. J'aurais peut-être pu les sauver, si j'avais essayé.
Fin
Une courte histoire que j'ai imaginé il y a environ un mois, lors qu'un de ces fameux exercices "alerte intrusion".
J'espère qu'elle vous aura plu ...
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ContoDes histoires, des raisonnements bizarres, des suites de mots dans tous les sens ...