Chapitre 8

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     - Attends-moi ! Papa !
     Je regardais mon père skier devant moi avec ma mère. J'étais déjà tombée de nombreuses fois et pourtant, l'envie de suivre mon père ne s'arrêtait pas. Il me souriait, me demandant d'aller plus vite. Malgré les larmes qui coulaient sur mes joues, je continuais de me battre pour l'atteindre. J'entendais ma mère qui exprimait sa pitié à mon propos et mon père qui lui conseillait de ne pas m'aider.
     - Elle est si fragile. Si nous ne l'endurcissons pas maintenant, elle risque de souffrir de ce monde horrible et cruel.
     - Mais voyons, elle n'a que trois ans !
     Je ne comprenais pas bien ce que voulait dire mon père à cette époque. Il avait toujours été très protecteur, autant que ma mère. Mais ces derniers jours, il s'éloignait de moi et essayait de me faire grandir sans l'aide des autres. Etait-ce la naissance de mon petit frère qui avait changé mon environnement ?

     - Alors, cette journée de ski ?
     Les yeux bleus de mon paternel se plongeaient dans les miens. Une mine boudeuse, je répondis qu'elle était très douloureuse pour mon fessier. Il rit simplement en frottant doucement ma tête.
     - Tu t'en es bien sortie. Je suis fier de toi, tu es digne d'être ma fille.
     Ces quelques paroles me rendaient si heureuse. Le dîné étant terminé, je me dirige immédiatement vers les fruits pour réalisé le quotidien de mon père et de moi. Je pose alors doucement le saladier sur la table et saisit un citron, le fruit préféré de mon père. Ce goût acide était si agréable, réveillant mes papilles au point de me donner des frissons et de faire pleurer mes yeux. Mon très cher père riait à chaque fois en me voyant ainsi.
     - Dis papa, on joue à Zelda après ?
     Mon père et ma mère jouait à ce jeu depuis des années et s'étaient rencontrés grâce à cela. Mon père m'avait montré des photos de ma mère dans la robe de Zelda dans Skyward Sword. Cette robe rose, imitation de la déesse Hylia, où elle ne portait pas de perruque, laissant naturellement ses cheveux châtains où des ficelles rose clair et vert émeraude tenaient quelques mèches. Elle avait offert son châle à mon père et parfois, elle lui jouait les notes de la lyre qu'elle s'était acheté auparavant, quelques années avant ma naissance.
     - Non, il est bien trop tard...
     - S'il te plaît ! Je souhaite qu'on avance dans Breath of the Wild !
     Mais la réponse était encore négative. Je m'amusais avec mon père et ma mère à joué à Zelda. Bien trop jeune pour savoir lire et combattre, mes parents jouaient et me lisaient l'écran. C'était comme une histoire dans un livre. La princesse Zelda, sous toutes ses formes avait toujours été ma préférée. Et Link, le héros parfait. Pour moi, Zelda et Link étaient mes parents. Leur amour si fort l'un pour l'autre et ce jeu si révélateur ne me mettaient aucun doute. Pourtant, Zelda était mon nom. Trouverais-je moi aussi mon "Link" ?
Les cries de mon petit frère se mirent à raisonner dans la maison. Ma mère criait à l'aide, alors que mon père accourait.
     - Loris est tombé ! disait-elle.
     Par la suite, je ne me souviens plus très bien ce qu'il s'était passé. 

     - Dis papa, on joue à Zelda ?...
     Mon père s'isolait depuis quelques temps. Parfois, je le voyais pleurer, et il séchait rapidement ses larmes pendant que je faisais semblant de n'avoir rien vu. Pourtant, pas grand chose n'avait changé à la maison, hormis le fait que je jouais à Zelda uniquement avec maman. Plusieurs fois, je les entendais crier et cela me faisait peur. Mais quand j'étais seule avec mon père, je pense qu'il essayait de se confier à moi. Il hésitait parfois à parler, comme s'il voulait me dire ce qui le rendait triste. Mais à la place, il me disait souvent "Je t'aime, n'en doute jamais ma fille." ou bien, comme ce soir là, il me demandait d'être forte.
     - Pourquoi est-ce que tu pleures, Zelda ?...
     Je cachais mes yeux avec mes mains pour empêcher mes larmes de couler. Mais ils se mettaient à couler beaucoup plus.
     - Tu ne dois pas pleurer quand tu vois quelqu'un verser des larmes. Même si tu aimes ces personnes, pleurer ne sert à rien et cela montre que tu es faible. Personne ne doit te voir si faible.
     Sa voix était déformée par ses propre sanglots, il me tient doucement par le bras et me met contre lui pour me câliner.
     - Prends toujours soin de ta mère et de ton frère. Ceux qui ne te trahirons probablement jamais.
     Je sentais sur ma chevelure l'eau salée de ses yeux. Il était fort mon père. Aussi fort que moi. Il voulait que je devienne plus forte, certainement pour être meilleure que lui.
     - Viens, on va prendre un citron... chuchote-t-il doucement à mon oreille.
     J'hoche la tête et le suis. Après avoir partagé le fruit, il me conduit dans mon lit et me chante des chansons dont je ne comprends aucun mot. Il m'embrasse doucement la tête, me câline de nouveau.
     - Je t'aime. N'oublies pas d'être forte et surtout de me pardonner.
     Je le regarde s'éloigner de moi et lui dit avec ma tendre voix "A demain, mon papa que j'aime". Mais, le lendemain à mon réveil, il n'était pas là. Mon frère pleurait et mes parents avaient disparu. Je les appelais, ils ne me répondaient pas. Habituellement, ils ne me laissaient jamais seule à la maison. Je me mis à les chercher dans toutes les pièces de notre appartement et j'avais fini par trouver ma mère, en larmes, sur le carrelage de la salle de bain. Ses yeux étaient fatigués tellement ils avaient versé de larmes. Elle semblait complètement détruite. Je lui avais alors fait un petit câlin, lui demandant où était papa. Seul lui était capable de la consoler.
     - Papa ne reviendra plus... avait-elle dit difficilement.
     - Pourquoi ? Papa ne nous laisserait pas tomber maman...
     Elle se mit à pleurer encore plus, très chagrinée. Mes larmes parcouraient mes joues sans que je ne m'en rends compte.
     - Papa à rejoint le ciel, Zelda.
     Rejoindre le ciel, c'était aller à Celesbourg comme dans Zelda Skyward Sword. Mais dans le monde réel, rejoindre le ciel c'était perdre la vie.

     Des voix lointaines arrivaient à mes oreilles. Je ne comprenais pas un seul mot. En ouvrant les yeux, je vis Link et la fée. Où étions-nous ? L'Hylien me parlait. Je ne comprenais rien. Bêtement, je me mis à sourire et des larmes coulaient à nouveau sur mes joues. Mon coeur battait au point de me faire très mal. A ce moment, j'avais promis de ne plus montrer ma faiblesse même à travers ce rêve dans le monde de Zelda. Soixante-douze heures étaient passés. Oui, il était temps de mordre à nouveau dans ce fruit acide, le fruit qui appelait mes souvenirs les plus douloureux.

L'ange déchu et le monde de ZeldaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant