2. David

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Je m'étais promis de ne faire qu'une apparition. Je ne pouvais me permettre de rater cette soirée même si à force d'enchainer les soirées le manque de sommeil se faisait cruellement sentir. Je refusais de l'admettre, mais je commençais à avoir du mal à récupérer, mes vingt ans s'éloignaient dangereusement dans le rétroviseur. De seize ans, très exactement.

Tu passes bien prendre les jumelles, hein ? H.

Je souris en découvrant le SMS d'Harry. Mon ami adorait mon job et certains avantages qui l'accompagnaient. J'hésitai un instant avant de répondre.

De quoi tu parles ???

La réponse paniquée ne se fit pas attendre :

Tu plaisantes ? Tu m'avais promis ! Les deux blondes, celles avec des prénoms en A !!!

Je le rassurai et passai ma veste en attrapant les clés de la jaguar. Oui, j'allais passer prendre Tamara et Lula, à moins que ce ne soit Wanda et Tabbata. Peu importait, nous n'allions que peu utiliser leurs prénoms.

Lorsque je passai les portes du bar à cocktail où se tenait la soirée de lancement de notre nouveau site de strip-tease en ligne, encadré par Juanita et Banana, je me surpris à ne pas éprouver quoi que ce soit. Il y a quelques mois encore, être au centre de cette agitation m'amusait. J'avais envie de séduire, soif de reconnaissance. Non, force était de constater que je virais « vieux-beau » ou « vieux-con », car ni les courbettes du patron des lieux, ni le simulacre de haie d'honneur de serveuses pourtant triées sur le volet me fit le moindre effet.

Je soupirai en espérant qu'Harry soit déjà sur place. Je le vis près des rideaux épais délimitant l'espace VIP. En m'apercevant, il pointa du doigt une jolie black plantureuse, son péché mignon, tandis que je levai les yeux au ciel en désignant les jumelles qui ornaient tous les bus de NY, vantant la qualité des strip-teases hauts de gammes qui nous proposions désormais en abonnement.

Dans l'angle mort de ma conscience, j'avisai à côté du sosie de Beyoncé une longue chevelure brune ondulant sur une silhouette gracile. Elle se tourna vers moi l'espace d'un instant ,et la singularité et la finesse de ses traits m'interpellèrent aussitôt. Très brune, un teint de porcelaine, des lèvres d'un rouge putassier sur tout autre, mais simplement pousse au crime sur elle. Blanche-Neige. Je continuai de progresser, conscient d'être au centre de toutes les attentions lorsque la brune lança une boutade à son amie suffisamment haut pour que tout l'état connaisse le fond de sa pensée.

— Je suis sure qu'il a un micropénis !

Ce n'est pas tant le fond que la forme qui m'amusa et réveilla en moi l'instinct de chasseur enfoui sous les tonnes de strings qui s'entassaient dans les tiroirs de ma commode. J'aurais pu l'ignorer, j'aurais pu la foudroyer du regard, je choisis le jeu, ne serait-ce que pour observer comment Blanche-Neige gérait la déstabilisation.

— Je serais ravi de te démontrer preuves à l'appui que ce soupçon est infondé, Blanche-Neige.

Les blondes gloussèrent, et la brune visiblement sous le coup d'un ou deux sex on the beach, se contenta de me dévisager en entrouvrant légèrement la bouche. Ses lèvres étaient délicieusement pleines et généreuses, et je sentis une onde parcourir mon bas ventre. Un frisson de désir autre que celui, mécanique, qui me prenait lorsque je sortais avec les filles qui me courtisaient. Je laissai mon regard glisser le long de son cou. Instinctivement ma mâchoire se contracta en effleurant des yeux ce grain de peau parfait. Je poursuivis néanmoins mon chemin, en plaçant mes mains sur les postérieurs parfaits des voyelles. Beyoncé poussa un soupir à fendre l'âme et je me promis, ne serait-ce par égard pour le penchant d'Harry pour les blacks, de faire entrer ces deux-là dans le carré VIP.

Lorsque nous passâmes le rideau de velours, j'entrevis mon bras droit, Janice, une jolie métisse à la coiffure afro qui défiait l'entendement, près d'un podium sur lequel des gogos bougeaient avec entrain. J'étais à la tête d'un empire du sexe. En off, le roi du porno. Nous faisons tout dans ce domaine, mais rien que du très qualitatif. Porno chic. Luxure pour CSP +++. Du glamour en cuir, du luxe en dentelle, du vibro classieux : jamais je ne me lassais des trouvailles du markéting, mais c'est en suivant cette ligne directrice sans jamais dévier que les chiffres de l'entreprise avaient explosé en dix ans à peine me rendant par la même occasion millionnaire.

À notre arrivée dans l'espace privé, le DJ tamisa un peu plus l'ambiance et poussa les décibels avant de lancer un compte à rebours : Janice leva un pouce en l'air à mon intention et plusieurs hôtesses uniquement vêtues de lingeries et de loups sortirent de l'ombre en lançant aux dizaines d'invités des goodies, bientôt rejointes par une armée de playboy en string qui lançaient des capotes. À ma droite une blonde en A poussa un cri, Harry en preux chevalier se hâta vers nous avant de réprimer un fou rire.

— Mon oeil ! hurla la fille.

Fort heureusement Janice arrivée à notre hauteur me saisit le bras :

— David ! Je dois te présenter le directeur de cette marque de lingerie comestible.

Je laissai Harry gérer l'incident technique.

— Mais qu'est ce qu'elle a à crier comme ça celle-là ? s'enquit Janice d'un ton excédé.

— Tu penses que « godemichet de voyage dans l'oeil » peut passer en accident de travail ?

Janice, imperturbable, haussa les épaules et désigna un coin de la pièce.

— Je vérifierai, mais ce n'est pas gagné. James ! Je vous présente David !

Trente minutes plus tard, James m'abreuvait d'informations époustouflantes tandis que je pensais au prochain match des Knicks. J'avais décroché au moment où mon interlocuteur avait commencé à disserter sur le goût trop prononcé pour être exploitable du chou fleur. Je profitai du passage d'un serveur pour descendre une flute de champagne de plus et mimer discrètement une pendaison à l'intention de Janice, qui ne vint pas pour autant à mon secours.

Tout en hochant la tête régulièrement au monologue du soporifique James, je cherchai sans succès Harry. La fête battait son plein, ceux qui occupaient la piste de danse étaient passablement désinhibés, nos partenaires souriaient : un succès. Soudain je perçus une présence dans mon dos, comme observé. Je me retournai machinalement. Près du bar une jumelle en A en soignait une autre, Harry comptait fleurette à Beyoncé, et Blanche-Neige me fixait intensément. Lorsque je saisis son regard, elle se redressa imperceptiblement sur son tabouret. Cherchant une contenance elle croisa des jambes que je découvrai incroyablement belles. Un peu trop rapidement : l'instant d'après elle était par terre.

En l'admirant, les quatre fers en l'air, je réalisai que je n'avais jamais trouvé une fille aussi sexy de toute ma vie.

New-York Bad Boy Saison 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant