Sable

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Il voulait prendre du sable alors, pour ce faire, il trempa sa pierre dans l'eau boueuse et la fit rouler sur le sable. Il étala sur elle plusieurs couches alternées de terre et de sable, avant de considérer qu'elle serait suffisamment lourde. Il n'avait pas mangé grand chose. Il mâchait des morceaux d'écorce choisis avec soin, tandis qu'il suivait un chemin descendant qu'il avait trouvé à force d'errer dans la forêt. Le soleil s'était caché à deux reprises, mais la lune avait été invisible avec l'épaisseur des feuillages. Voir sans source de lumière est une expérience surprenante, qui rend une scène surréaliste.

Le ciel devenait visible, il pouvait voir que la nuit n'était plus loin. L'imposant morceau de lune était déjà présent et éclairerait bientôt davantage que l'astre que les arbres cachaient de plus en plus. Il voyait quelques rochers. Un cairn. Les blocs qui le constituaient avaient des contours naturels, mais s'encastraient à merveille et son sommet de quelques mètres semblait atteignable, en escaladant méthodiquement le tas. Il avait ôté la majeure partie de son armure, ne gardant que de quoi protéger ses articulations. Il montait.

Il voyait son village. Le brouillard était moins épais alors et il discernait des lumières qui, dans cette région montagneuse, ne pouvaient être que les siennes. Il regardait à nouveau le ciel... Vu la lune, cela faisait trois jours qu'il était parti...

Il lui vint à l'esprit que, de là où il se trouvait, il voyait le village, mais que la forêt était invisible à ses habitants, sans quoi il en connaîtrait l'existence. Ça ne devait pas être loin, il pourrait y être avant le matin... Il était redescendu, mais s'était coupé à la cheville droite. Il laissait les végétaux derrière lui, ne récupérant que la poche de cuir qu'il attachait à sa droite. Il se frottait avec la pierre argileuse et sentait le sable sur sa peau. Le cairn était probablement là pour ça, aussi il l'appelait dans une langue surprenante, l'invoquait pour se protéger...

Il descendait la pante, tantôt ralentissant, tantôt accélérant à nouveau... Il était pressé de descendre et une excitation étrange était en train de le saisir... Il n'arrivait plus à marcher, il se retrouvait à jongler entre les vitesses sans cesser de courir, ça allait vite...

Il était au village.
On l'emmenait coucher.
Il ne savait pas ce qui s'était passé.
Sa peau tachetée de minuscules grains avait attiré les regards.
Il avait été lavé.
Le cuir, il ne l'avait plus. Ni la pierre.
Il était fatigué...

Les MarcheursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant