VI

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Tout se passa très rapidement.
Sans que nous n'échangeâmes un mot, nos gestes s'accordèrent pour camoufler cet acte.

Lisa s'éclipsa un court instant avant de revenir une large valise de cuir noir entre les mains. Elle peina à la trainer jusqu'au lit sur lequel elle déposa l'objet.
Nous observâmes le corps, la valise, le corps démesurément grand par rapport à la mince valise, puis dans un battement de cils, la décision fut prise.

Une fois de plus, le recul rend les événements atroces. Toutefois, nous n'avions pas le luxe de s'octroyer un moment de répit, de réflexion. Il fallait que nous nous débarrassions du corps en vitesse, ainsi que de toutes les traces qui auraient pu nous trahir.
Je ne regrette rien de ce que j'ai accompli ce jour-là, et si c'était à refaire, tout se déroulerait de la même manière.

Dans un silence morbide, ma superbe blonde me tendit un couteau. La large lame luisait sous l'éclairage faiblard de la lampe de chevet et j'empoignai le manche.
Suivant mon instinct, je plantai l'outil de boucher dans l'épaule du cadavre. J'attendis un cri de souffrance et l'absurdité de cette pensée m'arracha un rire, plus nerveux qu'amusé.

Je ne m'étais jamais rendue compte d'à quel point découper une carcasse était difficile et à compter de ce jour, je classais le métier de boucher parmi les professions particulièrement physiques.

Les efforts que je déployais pour séparer les membres du reste du corps avaient recouvert mon front d'une pellicule de sueur, que Lisa vint éponger avec une délicate précaution.
La douceur de ses mouvements ne me choqua pas sur le moment, mais en contant cette histoire sordide, le contraste entre ses gestes et les miens me paraissait affreusement dérangeant. Je n'ai étonnamment jamais considéré nos actions comme dégoûtantes, car il s'agissait à mes yeux de légitime défense, bien que je doute qu'à ceux de la justice, il soit possible d'employer ces termes.

Au terme de longues minutes et d'un remarquable acharnement, je terminai ma tache sanglante. Elle se pencha pour s'emparer des morceaux de "viande" qu'elle déposa dans la valise, après les avoir enrouler dans les draps tâchés de rouge.

Mon esprit flottait au dessus de mon être. Une distance étrange s'était creusée entre ces deux parts de moi. L'une ne considérait que l'aspect purement pratique, tandis que l'autre envisageait les failles de notre plan, qui n'en était pas un.

- Retire tes vêtements.

Lisa me sortit de mon introspection d'une injonction pressante. Je jetai un oeil à mon sweat et y découvris de bien trop nombreuses marques rougeâtres. Je découvris ma peau d'un rapide mouvement, oubliant toute notion de pudeur, chose qui m'était habituellement si chère. Elle saisit le morceau de tissu, le plia consciencieusement et le cala dans la valise. Son large tee-shirt rejoignit à son tour notre accumulation d'objets dont nous devions effacer l'existence.

Le cuir de la valise aurait pu craquer à tout moment alors que je m'asseyais dessus afin de comprimer au maximum le contenu de celle-ci. Je parvins enfin à la fermer et Lisa m'offrit une robe que je me hâtai d'enfiler.

Je me redressai, étirant mon corps engourdi par le sport imprévu que je venais de faire. Un long soupir de relâchement s'échappa de mes lèvres gercées quand elle enroula ses bras autour de ma taille. Ses paumes glacées se glissèrent dans mon dos et elle se lova dans mon cou. Sa respiration s'accélèra quand nos regards se croisèrent.
Mes yeux ne purent s'empêcher de longer ses courbes harmonieuses, couvertes d'un pull de laine bien trop large. Ses jambes sveltes lui donnaient une allure qui attirait trop d'attentions à mon goût, mais toute possessivité n'aurait ici aucun sens.

- On devrait y aller.
- Où ça ?
- Le plus loin possible.
- À la mer ?
- Je ne pensais pas à l'eau…
- Faisons comme tu le souhaites, chuchotai-je dans un souffle.

One More Day - Lisa & RoséOù les histoires vivent. Découvrez maintenant