Chapitre 2 : entretien

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    Le samedi suivant, alors que j'étais tranquillement allongée dans mon lit et emmitouflée sous ma couette quelque chose de bizarre s'est produit. Faire de drôles de rêves ça arrive à tout le monde mais celui-là je m'en souviens surtout à cause ou grâce-je ne saurais dire-à ce qui s'en est suivi.

Dans mon rêve, j'étais aussi allongée dans mon lit, mon allure était épouvantable mais j'étais quand même mystérieusement heureuse d'être au milieu d'un énorme stade et qu'un entraîneur au visage masqué coure tout aussi joyeusement autour de mon lit sans cessé de souffler dans son sifflet au son horriblement strident.

Tout à coup l'entraîneur s'arrêta de courir et je le vis courir jusqu'à ce que je savais être des vestiaires avant que ,sur le grand écran qui me faisait face, Adèle se mette à chanter son hometown glory. C'est à ce moment là que je me réveillai en comprenant qu'en fait Adèle chantait certes mais qu'elle le faisait dans ma sonnerie de téléphone.

Je ronchonnai en me redressant avec regret dans mon lit sans accepter pour autant d'envoyer valser ma couette.

-Allo mademoiselle Tanay...

- Nataya corrige-je sur un ton aussi bougon que d'habitude qui n'a pas l'air de choquer mon interlocuteur pour autant.

-Oui Nataya reprend-il comme si cela n'avait pas la moindre importance.

Enfin qu'est-ce que j'y peux moi si ma mère n'avait pas la moindre idée de comment m'appeler et qu'au lieu de m'appeler Chloé ou Marine comme beaucoup d'autres filles de ma génération, elle a préféré tirer des lettres au sort jusqu'à obtenir un prénom potable ou du moins qui comportait des voyelles ?

- Seriez-vous disponible vers 15h ? Me demande-t-il en faisant preuve d'une politesse beaucoup trop professionnelle à mon goût.

-Aujourd'hui ? M'enquière-je alors que pour le coup ça paraît évident.

-Oui aujourd'hui mademoiselle, le propriétaire de la boulangerie Chez Fantin aimerait vous voir pour un entretien.

Non, non ! Mais je ne suis pas prête. Tout ça c'était du flan ! J'ai déjà mis un temps indécent à formuler des phrases correctes avant de soumettre mon CV à sa femme alors qu'est-ce que ça va être quand je vais me retrouver devant lui et que je vais devoir répondre à ces questions que j'imagine plus stressantes les unes que les autres ? Après tout je n'ai qu'à dire que je suis malade, ça repoussera l'échéance.

-Oui répondis-je pourtant stupidement avant de me rendre compte que mon interlocuteur vient de raccrocher et qu'il est quatre heures du matin !

**

Moi qui pensais pouvoir profiter tranquillement de mon samedi après-midi sous la couette en me regardant un Tarantino... Le moins qu'on puisse dire c'est que c'est cuit.

Je n'ai pas réussi à me rendormir après ce coup de fil pour le moins matinal. L'homme qui m'a appelé doit être un pâtissier ou un boulanger sous les ordres du big boss. Personne ne pourrait décemment appeler à cette heure un samedi matin sauf peut-être un mec bourré qui se serait trompé de numéro.

Une chose est sûre, ça a été une véritable galère de m'habiller pour ce fichu entretien. Rien dans ma garde-robe n'est adapté à ce genre d'occasion sauf peut-être un déguisement...

J'ai donc dû aller fouiller dans la garde-robe de ma mère pour aller y dénicher une chemise blanche toute simple assortie à une veste noire qui doit être la seule pièce vraiment classe de ma garde-robe et au jean slim le moins délavé que j'ai pu dénicher.

Pour l'occasion, j'ai aussi chaussé des escarpins noirs vernis que je ne mets que pour les grandes occasions qui cela dit se font assez rares.

J'ai sauté le repas du midi tout simplement parce que je n'avais pas faim. D'accord parce qu'en fait mon stress avait formé un énorme ballon de rugby qui prenait toute la place dans mon estomac. Ma mère m'a sermonné mais je n'entendais rien car eminem me hurlait de me perdre dans la musique dans mes écouteurs pendant que je m'imaginais tous les scénarios possibles d'entretien, de questions, d'interlocuteurs et surtout d'échecs. C'était hilarant de la voir lever les bras en l'air avant de mimer mon anorexie proche.

Nataya Où les histoires vivent. Découvrez maintenant