Chapitre 6 : La mort avant le déshonneur.

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« Ce sera tout ? me demande tristement Mirajane en déposant les deux pintes de bière devant moi.
- Oui, réponds-je de manière neutre.
- Tu devrais me parler plutôt que de boire, me conseille-t-elle gentiment.
- Que veux-tu que je te dise ? répliqué-je, cinglante. On s'est embrassé, amusé sous la couette - dans la tente, plutôt - mais c'est tout, ce sont des choses qui arrivent... Cela n'était en aucun cas sérieux ».

Je prends une pause, fascinée et étonnée par la capacité que j'aie à mentir.

« Sois honnête avec toi-même, reprend Mira, plus sérieusement et fermement, cette fois-ci.
C'était tout sauf non sérieux. Vous partagiez tous deux d'intenses sentiments, ce qui vous a détruit.
Grey n'a pas totalement fait le deuil de Juvia, ses sentiments pour toi étaient naissants uniquement. Quant à toi, tu te consumais - et j'imagine que c'est toujours le cas - d'amour pour lui.
- Mouais, c'était peut-être ça, hésité-je, nonchalante.
- Tu refuses d'admettre, cela doit donc être pour une raison bien plus complexe », réfléchit Mira à voix haute.

Elle vient tout juste d'endosser sa casquette de psychanalyste.

Soudain, elle lève le doigt et affiche une mine éclairée, comme si une ampoule s'était allumée au dessus de sa tête à cet instant.

« Ne serait-ce pas à cause du fait que tu utilises l'alcool comme remplissage et comble-manque d'affection ? ».

Je vide la première pinte, cul sec, avant de répondre avec détachement :
« Je ne vois pas du tout de quoi tu parles.
- Bingo ! s'exclame-t-elle, satisfaite d'avoir su mettre le doigt sur mon mal-être. Puisque c'est ça, tu vas commencer par vider cette pinte dans l'évier.
- Vider une pinte dans l'évier ? bégayé-je. Jamais ! ».

Le bout de mes doigts se met à trembler. Je m'avance vers l'évier, vacillante, et incline le verre.
Quelques gouttes viennent terminer leur route dans l'évier, mais celui-ci est encore aux trois quarts plein.

« Je vais te donner un coup de main », rétorque Mira en attrapant mon poignet de manière violente et versant le reste de la pinte dans l'évier.

Je me rends alors compte de la rapidité avec laquelle l'évier engloutit la bière, semblable à la mienne. Je suis un évier de cuisine.

Elle me serre ensuite dans ses bras.

« Ferme les yeux, susurre-t-elle. Ça s'arrangera, et il reviendra. Autrement, c'est qu'il se foutait de toi et qu'il ne te méritait pas.
- Pourquoi faut-il que tous les mecs de mon entourage soient des salauds ? demandé-je, de façon rhétorique. Pourquoi faut-il que ce soit eux qui m'attrapent par le bras, me jurent de ne jamais s'en aller et disparaissent la seconde d'après ?
- Parfois, ce sont les filles qui s'en vont, affirme catégoriquement Jellal, qui vient de rentrer dans la pièce. Leur fierté les tue. Elles te font succomber, te prennent dans leurs filets pour finalement t'abandonner sans le moindre regret ».

Suite à ces mots, Mira dévisage Jellal, des questions plein la tête. Erza l'avait-elle quitté, lui aussi ?

« Là n'est pas la question, nous coupe la barmaid.
Kanna, tu dois changer. Tu dois être dure, tu dois être coriace, tu dois être plus forte.
- Je le suis déjà », renchéris-je, de mauvaise humeur.
Afin d'appuyer mon propos, je vise le verre le plus proche avec Fairy Glitter et le désintègre littéralement.

« Peut-être, mais il faut que tu le deviennes encore plus. C'est pourquoi nous allons nous affronter ! »

Mon champ de vision se rétrécit. Mirajane est la femme la plus puissante de la guilde et même en ayant acquéri Fairy Glitter, je ne suis pas sûre de pouvoir la surpasser, ni même l'égaler.

Elle m'entraîne dehors, dans un espace vert et vide.
Jellal nous suit, il sera le seul et unique spectateur de notre combat.

« Commencez ! ordonne-t-il.
- SATAN SOUL ! » hurle Mirajane en ouvrant les hostilités.

La blanche se transforme en une démone sexy, forme que je ne connais que trop bien.
Quant à moi, je sors mes cartes, en embrasse une - l'as de cœur, comme par hasard - avant de prononcer à mon tour :
« FAIRY GLITTER ! ».
Nous nous fixons du regard. Je peux lire l'envie d'en découdre dans son regard, ce qui est plutôt inquiétant.

Je la vise avec le rayon lumineux qu'elle parvient à esquiver savamment.
Elle se déplace rapidement, à la manière d'un aigle.
Je continue à m'agiter dans tous les sens, ce qui semble la faire sourire.

Je parviens à la toucher aux jambes en premier lieu, ce qui ne l'affaiblit pas, bien au contraire.
Elle se nourrit de la douleur.
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Après plusieurs heures de combat effréné, les premiers signes de fatigue pointent le bout de leur nez.
Il fait extrêmement froid, et je rêve de m'installer près de l'âtre dans la guilde, un mug de vin chaud à la main.

Afin d'en finir au plus vite, je tente le tout pour le tout.
Je secoue la carte en direction de Mirajane, en espérant l'enfermer dedans.
Trou noir.
                                         ~
Allongée sur la pelouse gelée, je regarde autour de moi.
Jellal appuie sur ma poitrine, l'air affolé.
Je ressens une terrible douleur lorsqu'il retire ses mains, j'essaie de reprendre un rythme cardiaque normal en inspirant et expirant longuement.

« Que s'est-il passé ? formulé-je.
- Mira a utilisé l'Avaleur des Âmes. Je lui avais pourtant dit de te ménager... Comment te sens-tu ?
- C'est-à-dire que... Je préférerais mourir plutôt que d'être dans la position dans laquelle je me trouve actuellement ».

"La mort avant le déshonneur", mon credo.

« Ne dis pas n'importe quoi, me réprimande-t-il.
Tu es une femme extraordinaire, Kanna. Il te manque simplement un peu de technique et d'entraînement, mais ça s'acquiert avec le temps ».

Sur ces mots, il me relève et me prend dans ses bras.

« Reste forte, Kanna.
Ne laisse personne t'affaiblir, pas même Grey.
Tu existes par toi-même uniquement ».

Jellal me prend la main et m'emmène dans la guilde, près de l'âtre, où m'attendent un thé et un plaid.

- Je vais te laisser, tu sais où me trouver si jamais tu as besoin de quoi que ce soit, murmure-t-il.

Il s'en va. Silencieusement, et tristement.
Je remarque la plaie sur mon côté droit, y passe le bout de mes doigts.
Et je sais que comme chaque blessure douloureuse, celle-ci cautérisera et se refermera, en souvenir de ce qu'on appelait l'amour.

Quête de vengeance et éruptions de sentimentsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant