Le sourire de vainqueur, narquois, qu'il affichait au début de mon service avait disparu pour laisser place à un visage fermé et en colère. J'étais aux anges, je jouissais littéralement d'avoir pu lui faire perdre de sa superbe, de sa morgue et de sa suffisance à mon égard.
Il me répondit sans desserrer les dents et je filais immédiatement aux cuisines pour donner la commande, pour qu'il ne puisse voir sur mon visage la délectation du moment qui s'y lisait.
Je remontais un peu plus tard avec l'ensemble des mets commandés pour la première entrée, tous disposés sur mon chariot mobile. En me voyant arriver, ils se déplacèrent tous avec un grand sourire, de leurs canapés ou fauteuil en cuir vers la table de la salle à manger. Mon très cher monsieur Anderson m'ignorait royalement et essayait d'attirer l'attention de chaque convive dès que l'un d'eux m'adressait un compliment. Le fait que deux de ces messieurs avaient l'air plus intéressés par ma petite personne que par ce qu'il leur disait ne faisait qu'attiser sa colère de plus en plus palpable. Il riait de plus en plus bruyamment, parlait de plus en plus fort et n'hésitait pas à me dénigrer (je n'avais pas besoin de savoir ce qu'il disait à l'oreille de ses convives pour comprendre que cela n'était pas très respectueux à mon égard ...) presque sans se cacher.
Je m'arrangeais donc pour accélérer le service et disposer le plus rapidement possible les mets raffinés sur la table.
Le sommelier était arrivé et s'occupait de faire goûter aux hommes d'affaire le vin qu'il leur proposait pour accompagner le hors d'œuvre.
J'étais sur le point de m'éclipser avec mon chariot pour aller chercher la suite du repas, quand j'entendis un couvert tomber. Je me retournais et me rendis compte que c'était ce bellâtre prétentieux qui faisais mine d'avoir été maladroit. La mort dans l'âme, sachant d'avance ce que j'allais devoir faire, je m'avançais vers sa place pour ramasser sa fourchette par terre. J'étais en train de me relever quand cet imbécile se retourna brusquement vers moi, comme s'il ne m'avait pas vu, et renversa sur mon chemisier le verre de vin qu'il venait de tendre au sommelier pour qu'il le lui remplisse à nouveau.
Espèce de gros con ! Comme s'il ne m'avait pas vu et qu'il ne l'avait pas fait exprès!
Il se confondit aussitôt en excuses trop obséquieuses pour être sincères et se leva aussitôt pour m'aider à me relever tout en essayant d'éponger avec sa serviette, le vin qui tachait mon chemisier et s'étendait vers ma jupe noire ...
« -Pardonnez moi mademoiselle, mais je ne peux me résoudre à vous laisser dans cet état là ... toute mouillée. » Il se croyait malin et spirituel à faire un jeu de mot aussi navrant ? Remarquez, vu les deux ou trois rires que j'entendais, il avait un public qui se délectait de l'incident. Mais ils ne me connaissaient pas et ils allaient en avoir pour leur argent !
« - Ce n'est rien monsieur, ne vous inquiétez pas, des clients maladroits alors qu'ils n'ont bu qu'un demi verre de vin, ça arrive souvent. » répondis-je sèchement. Aussitôt j'entendis un ou deux sifflets admiratif. Quelques uns devaient avoir compris que l'atmosphère entre nous n'était pas des plus cordiales ...
Mais il continuait à m'éponger comme s'il ne m'entendait pas tout en me tenant d'une main à la taille. Il se retourna alors vers ses convives et leur dit le plus calmement du monde :
« -Excusez moi messieurs, mais je pense que vous allez terminer la soirée sans moi. Ma galanterie ne peut accepter de laisser cette jeune femme seule et désemparée après la bêtise que je viens de commettre. Mon Vice-président se chargera de vous exposer mon plan.
- Mais monsieur, je ne peux ... » Et je ne pu rien dire de plus. Sa main s'était fortement refermée sur ma hanche et m'emprisonna si fortement qu'une douleur fulgurante m'empêcha de continuer ma phrase. J'essayais néanmoins de garder bonne figure, je n'allais pas me mettre à pleurer devant ce fils de pute.
Et lui de me chuchoter après avoir approché sa tête de la mienne :
« - Tu te tais et tu me suis ! »
Et à haute voix pour que le sommelier l'entende ainsi que les invités :
« - On va lui chercher de quoi se changer. »
Sa poigne était puissante et ferme, impossible d'arriver à s'en échapper. Mais en même temps, le désirais-je vraiment ? Ma hanche gauche sentait la chaleur de sa main à travers le fin tissu de mon chemisier blanc. Nous sortîmes de la Suite Présidentielle, lui me gardant sous son bras, moi serrée, contre le creux de son épaule, tout contre lui. Nous ne nous disions rien et j'étais bien. Sa chaleur irradiait contre mon corps et la sensation de force qui s'émanait de lui était plus qu'agréable. Mais quand il appuya sur le bouton pour appeler l'ascenseur spécialement dédié aux Suites, je revins brusquement à la réalité et une appréhension grandit dans mon esprit. Je devinais ce qui allait se passer dedans. Et pourtant, mon corps n'appréhendait rien du tout ... Lui, ce traitre de ma personne physique, de mon intégrité et de ma dignité morale, attendait avec impatience que les portes de l'ascenseur s'ouvrent. Pour que Monsieur Anderson et moi, nous nous retrouvions seuls dedans. Pour qu'il m'embrasse, me touche, me caresse, me presse contre lui encore et encore ... Mais bon sang, qu'est-ce qui se passait en moi ? J'étais devenu dingue de ce connard ou quoi ? J'inspirais fortement et repris rapidement mes esprits, prête à en découdre et à ne pas me laisser faire aussi facilement. Non mais dis donc, tu crois que je t'appartiens vraiment ? Tiens, d'ailleurs je vais le lui dire directement !
J'arrivais à me dégager de lui alors que la porte s'ouvrait et qu'il allait rentrer dedans et lui dis pleine de défi :
« - Arrêtez votre petit jeu avec moi espèce de cinglé ! Je ne vous crains pas et je ne vous appartiens pas non plus ! Et je n'ai pas peur de vous non plus ! »
Je restais planté devant l'ascenseur, les bras croisés, alors qu'il me regardait fixement de dedans, son beau sourire de playboy aux lèvres. Sa voix grave et suave s'envola vers mes oreilles et les mots qu'il dit me désarmèrent complètement.
« - J'espère bien ma jolie Emily que tu n'as pas peur de moi. Ca m'ennuierait vraiment que notre belle relation commence si mal ... »
J'étais estomaquée. Belle relation ? Mais de quoi il parle ? Putain mais qu'il est beau et séduisant ! Ca l'ennuierait ? L'ennuyer ? Alors que devant ses connards d'hommes d'affaires il était prêt à m'écharper vu les regards assassins qu'il m'avait envoyé ? Et cette voix ... Omg, mais faut tout de suite qu'il arrête de me parler aussi gentiment sinon j'vais pas arriver à lui résister ...
J'en étais là de mes divagations de jeune fille complètement chamboulée quand il m'attrapa un bras et me tira rapidement à l'intérieur de l'ascenseur. Il me plaqua contre la paroi du fond et me colla un baiser mémorable qui fit exploser les dernières réserves que mon esprit avait à son égard. Pas mon corps ceci dit, j'ai l'impression qu'il lui était acquis depuis ce matin ... Traitre !
Les portes se refermèrent et l'ascenseur commença à descendre que nous nous embrassions encore. Je dis nous cette fois, car j'étais devenue un peu moins passive et je l'attirais pour le coller contre moi en le tenant à la taille qu'il avait ferme. Et puis ma bouche, ma langue répondait à son baiser ... Oh mon dieu que c'était bon ! C'est pas possible comme il embrassait bien ... Ou alors c'est parce que j'étais totalement vierge de ces choses là et que la nouveauté faisait que c'était forcément bien ? Mais arrête de réfléchir espèce d'idiote et profites-en !
Le baiser fut de courte durée cependant. On avait à peine descendu deux étages que le beau brun ténébreux se dégageait de notre étreinte et appuyait sur un bouton. L'ascenseur se stoppa net.
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Tu m'appartiens ..
RomanceAprès la mort de mes parents , je vis seule chez moi , je travaille le matin en tant que vendeuse dans une boutique et la nuit serveuse dans un hôtel .. Tout était bien, une vie paisible et sans problème .. Jusqu'à ce qu'il soit apparu .. lui .. Ce...