L'épouvante

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Nouvelle rédigée dans le cadre du concours de LoupLig.

Note : Cette nouvelle sort du registre fantastique pour s'ancrer plus profondément dans le paranormal, voire l'horreur si vous êtes particulièrement sensible. ;-)

Je vous rassure dans le cas où vous viendriez à en douter après votre lecture, ma santé mentale est excellente !

La salle est vide, déserte. De son ancienne splendeur, il ne reste que des ruines. La scène délabrée se dresse encore majestueusement devant les sièges miraculeusement intacts, à l'exception de quelques-uns. Seul un rai de lumière éclaire ces vestiges par un trou béant du plafond hors d'âge, comme si il voulait révéler au grand jour un secret enseveli sous les décombres.

Ces lieux, à l'abandon depuis de nombreuses années, attirent de nombreuses personnes comme ils en font fuir. Cependant, jamais le mystère n'a été élucidé : comment cet endroit s'est-il trouvé réduit à l'état de vestiges ? Comme chaque soir, je passe devant ce bâtiment. La rue illuminée par quelques lampadaires offre une vue plongeante sur sa toiture trouée. Cela fait depuis longtemps que je n'y accorde plus d'attention ; à force, on s'habitue à tout, même aux choses les plus insolites. Il possède encore une certaine beauté, malgré l'absence d'entretien pendant une si longue durée...

Cependant, alors que j'arpente la rue comme à mon habitude, j'entends une musique qui, du pianissimo, vire petit à petit à un forte des plus agressifs, comme si celui qui la joue essaie de transmettre une douleur indescriptible. Cherchant la source de ce son de piano, je tourne la tête dans toutes les directions. Mes yeux balaient le cadavre l'ancien théâtre. Étrange... De la lumière émane des fissures du mur. Et la musique semble en provenir ! Pourtant, aucun passant ne semble remarquer le phénomène. Ils poursuivent leur route, leurs yeux torves rivés sur leurs chaussures parfaitement cirées.

C'est désemparé que je décide de me rendre sur place, dans le fol espoir de découvrir je ne sais quoi. Qu'espère-je ? Percer les sombres secrets qui hantent l'endroit ? Sans doute. Le cœur battant, je franchis ce qui a été une double-porte imposante et me retrouve dans la salle à présent méconnaissable. Sur scène, il y a effectivement un piano. Il en sort effectivement une mélodie. Les touches blanches et noires s'enfoncent et se relèvent au rythme de la musique entraînante... Mais aucun pianiste n'est là pour les actionner ! Tandis, que je me fais cette réflexion pour le moins déroutante, je vois l'air s'opacifier au-dessus du tabouret. Lentement, une silhouette se dessine, incertaine puis de plus en plus consistante. Elle me fixe d'un œil ensanglanté, presque fou.

Sans un bruit, le personnage se lève du fauteuil et me fait face, ce qui me permet de le dévisager plus longuement. Le piano, quant à lui, entame une autre mélodie, plus triste, plus mélancolique, sans l'aide du pianiste bien sûr. Celui-ci est vêtu d'un costume en haillons complété par un haut de forme usé. Sa bouche est figée en un rictus inquiétant, son nez tordu, ses yeux écarquillés...

— Depuis... Si longtemps... Que personne... N'est venu ici... annone-t-il dans un râle. Vous... Avez eu... L'audace... Ou la folie...

Je ne sais que répondre à ces parles alarmantes. Il s'agit d'un fou ou d'une mauvaise blague, sans nul doute. Je réponds :

— Écoutez, je suis simplement venu ici pour découvrir d'où venaient la musique et les lumières.

— Mauvaise idée... Mauvaise idée... Personne ne doit...

— J'ignore qui vous êtes mais je ne vous laisserai pas m'intimider ! Cessez de jouer ce rôle ridicule et répondez-moi !

Il éclate de rire. Un rire sinistre, dément, qui vous glace au plus profond de vous.

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