Âme esseulée

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Atraon regagna le Sanctuaire Mort-Sang et chercha du regard Fréalia. Il se mit à la chercher assidument et la trouva vers le forgeron. Il attira son attention et souffla.
- J'ai vaincu la première Âme Sombre...
Fréalia fit les gros yeux.
- Tu as l'air blessé... Ôte ton casque.
- Ça ne faisait pas partie du...
Il s'écroula soudain sur le sol dans un bruit sourd qui résonna. La femme se rua sur lui et retira son casque. Elle aperçut les veines bleues et le sang désormais coagulé. Elle hurla qu'on amène un soigneur immédiatement. Ils l'étendirent sur un lit et le soigneur prit un air grave.
- Il a puisé dans une énergie magique puissante, révéla-t-il. Sa fiole d'Estus était entièrement vide quand il est parti. C'est un jeune sot. Il affronte le monde seul...
Le jeune homme entrouvrit les yeux et toussa quelques gerbes de sang.
- J'ai tenu ma promesse, sourit-il. J'ai vaincu le Démon de l'Asile. Qui est le prochain?
- Pour l'instant, tu dois te reposer, abruti, répondit Fréalia. Tu vas finir par te tuer et tous nous condamner. Il faut que nous fabriquions de l'Estus.
Atraon sombra dans un profond sommeil, brinquebalé d'atroces cauchemars: ceux de sa réalité.
Je me suis toujours demandé à quel moment le monde qui nous entoure a décliné dans les plus sombres ténèbres. Ce roi que l'on prétend imbattable au duel à l'épée... cet Ornstein... ne peut-il pas nous sauver? Peut-être qu'il a sombré lui aussi dans la folie. De toute façon, tout ce qui se trouve dehors veut ma mort. Je l'ai compris en accompagnant mon père acheter des provisions. Les morts sont sortis de terre, les animaux sont devenus monstrueux et agressifs... Pour de simples emplettes, il fallait avoir une épée. Et parmi eux, des monstres encore plus puissants... Les Marchetombes, nos supérieurs et gardiens de la foi les ont appelés les "Âmes Sombres". Ils renferment un incroyable pouvoir que des aventuriers semblent vouloir capturer dans un calice. Ils sont fous. Pour rien au monde je n'affronterai ces atrocités. Elles ont tué mon père. Je suis seul, dans cette cabane en ruines. Les ténèbres m'encerclent. Je suis seul et j'ai peur. J'ai une épée. Qu'est-ce que je fais? Je lutte ou je me tranche la gorge? Quelle musique serait plus douce que celle de la mort, en ce moment où l'enfer déferle sur moi? J'ouvre les yeux. Je suis déterminé. La seule musique qui m'apaise est celle du sang, celui de mes ennemis, expulsé hors des artères et des veines. Celle des os qui se tordent et craquent sous mes coups. Celle de la chair qui se déchirent, les ligaments qui cèdent... Oui... quelle douce mélodie... Pourtant je n'ai jamais abandonné. Je me suis toujours relevé. Quand mes os craquaient, je tenais debout. Quand mon sang dégoulinait, je me blessais davantage. Voilà qui je suis. Un homme qui aime le combat, confronté à la mort à chaque instant. Parti en quête des Âmes Sombres.
Atraon se réveilla après quelques jours de soins intensifs. Fréalia était restée à son chevet à changer le linge humide. Lorsqu'il revint à lui, elle sourit.
- Tu l'as éliminé, n'est-ce pas?
- En effet, annonça-t-il.
- Tu as peut-être un don qui te permettra de nous sauver. Je tiendrai ma promesse, Atraon d'Escurd. Je t'accompagnerai désormais.
Enveloppée dans son armure, elle se tenait droit comme un piquet. Une fine rapière était accrochée à sa taille et elle souriait de toutes ses dents.
- Je n'ai jamais mis les pieds dehors, cependant. Je suis née ici. Je ne sais pas ce qui nous attend.
Atraon était quasiment déjà dehors de la chapelle. Il se retourna à demi et sourit.
- Ne vous inquiétez pas, Dame Fréalia. J'ai toujours l'habitude d'improviser. D'habitude je me blesse gravement mais je tiens le coup.

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