Chapitre 1

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LOUNA

Assise sur un canapé de couleur crème, je fixais mes pieds. Mes bras sur mes jambes et mes mains entrelacées, je pensais à ma petite vie. Souvent dans ces moments là, je me rends compte que je suis une personne parmi tant d'autres. Parce qu'il y a plus de 7 autres milliards de personnes différentes mais aussi quelconques les unes des autres.

"Comment tu vas aujourd'hui ?"

Cette voix m'enlève de mes pensées, je lève la tête et je la hoche légèrement.

"Ça va" répondis-je simplement.

Ma psychologue grimaçait. Elle s'appelle Emy, une femme métisse d'une trentaine d'années. Elle note quelque chose dans son carnet. Je me suis demandé ce qu'elle a pu noter à ce moment là, puisque je n'ai encore rien dit.

"Tu as encore eu des crises d'angoisses ces derniers temps ?" M'interrogea-t-elle.

Mes yeux se baissent sur mes mains, elles tremblent légèrement. J'en ai fais 3 en deux jours seulement. Je mordille ma lèvre inférieure.

"Hm, oui, comme toujours."

J'ai soupiré. C'est devenu une habitude maintenant. Mes parents sont désespérés avec moi. C'est pour ça qu'ils m'ont envoyé ici. C'était devenu incontrôlable, surtout pour ceux qui m'entourent. Ça ne me réjouis pas. J'ai un peu l'impression d'être faible et de me plaindre tout le temps. Mais je dois avouer que ça me fait du bien. En sortant de ma séance, je me sens plus légère, mais cela ne dure qu'une soirée, malheureusement. Après l'enfer recommence, au mieux j'ai des douleurs horribles au ventre, au pire je fais une crise de tétanie et je m'évanoui. Ça m'arrive de plus en plus en ce moment. D'ailleurs j'ai perdu des personnes chères à cause de ça. Peut-être qu'ils ont eu peur de moi ? En tout cas je me suis senti complètement abandonnée à cause d'eux et c'est en partie leurs fautes si je suis là.
La séance dure une petite heure, j'ai toujours du mal a me lancer mais après quelques minutes ça va vient doucement. Je parle plus facilement avec elle qu'avec n'importe qui. C'est vrai qu'Emy dégage une aura que j'apprécie. Sa coupe afro lui va à merveille, elle a des yeux assez sombres qui s'harmonisent assez bien avec son teint métissé et un sourire qui rassurait n'importe qui.
Quelques minutes plus tard j'arrive chez moi, j'ouvre la porte et je monte directement dans ma chambre, pose mon sac et enfile mes chaussons. Ma mère toque à la porte et entre dans ma chambre.

"Ohlala l'état de ta chambre, j'ose même pas rentrer. Range un peu tes affaires! Tu viens manger ? Et la psy ça a été ?"

Ma mère est comme ça, speed et curieuse. Je soupire et hoche la tête. À table se trouve mon père et mon grand frère. Je dis un simple bonsoir et je m'assieds sans dire un mot de plus. Ma mère me sert des pâtes et me tend une autre assiette pleine de viande.

"J'imagine que tu n'en veux pas ?"
"Non merci."
"J'aurai espéré."

Ça fait quelques mois que je ne mange plus de chair animal, c'est pour mes principes c'est tout. Mon grand frère, aimant se foutre de ma gueule profita pour me lancer un pique. Je lui réponds discrètement avec mon majeur. On est assez proche tous les deux. On a juste quatre ans d'écart, il a vingt deux ans et moi dix huit.
Ça fait deux ans qu'il ne fait plus d'étude, maintenant il travaille. Ce qui est curieux avec lui c'est qu'on a jamais vu ses petites/petits copains. Il n'en parle jamais. C'est quelqu'un de sociable, il a une bande d'amis qu'il n'a jamais quitté depuis son lycée. On ne se ressemble pas vraiment, il a des cheveux très bruns, des yeux d'un marron très profond. Notre seul point commun physiquement c'est notre nez peut être. En forme de trompette. Du haut de ses un mètre soixante-dix il se lève pour ranger la vaisselle sale.

"Oliver demain tu finis le boulot à quelle heure ?" Demande ma mère tout en mangeant.
"À dix-sept heures"
"Tu pourras venir me chercher à mon travail?"

Il acquiesce.
Me levant pour ranger mon plat, ma mère me demande de l'aider pour le rangement du linge. Après avoir fini ma corvée je monte dans ma chambre. En rentrant je prends mon carnet et gribouille tout ce qui me passe par la tête. C'est une de mes façons pour me calmer. Calmer de quoi ? Je ne sais pas trop. Je sentais juste qu'une crise d'angoisse arrivait. Mon téléphone vibre, je décroche et j'entends la plus belle voix du monde.

"Allo mon coeur ? Comment tu vas ?"

Cette douce voix c'est celle de mon copain, Noah. On est ensemble depuis presque un an maintenant. Il me connaît par cœur, et c'est le seul qui sait me maîtriser quand ça ne va pas. J'ai le sourire aux lèvres.

"Ça va, et toi ?" Dis-je calmement.
"Ouais, le taff me saoule à un point t'imagine même pas, je suis mort."

Je soupire, ça se sentait dans sa voix qu'il était très fatigué. Lui aussi il travaille, pour payer ses études. Ça ne le ravis pas mais il n'a pas trop le choix. D'un côté ça me rassure. Dans son travail il n'y a presque pas de femme, donc je ne me sens pas en danger. Noah me rappelle tout le temps que je n'ai rien à craindre et qu'il n'aime que moi, mais je ne peux pas m'empêcher de penser qu'un jour il me lâchera et la ce sera la fin pour moi.

"Tu finis les cours à quelle heure demain petit coeur ?"
"Vers quinze heure trente, on peut se voir après ?" Demandais-je avec plein d'espoir.
"Bien sûr, mais moi je finis à seize heure, tu devras attendre un peu" répond-t-il tristement.
"T'inquiète."

Une soudaine envie de jouer du violoncelle me prends, mais il est vingt heure, ce n'est pas raisonnable. En plus ma vieille voisine va encore faire des siennes.
Il est maintenant vingt-deux heures trente. Je fixe le plafond en soupirant. Je pense à pleins de choses. Mes mains tremblent, et mes démons reviennent encore plus fort. Pourquoi je me sens comme ça? Pourquoi suis-je si faible ? Pourquoi je suis un poids pour ceux qui m'entourent? Pourquoi je suis moi ?
Les larmes coulent toutes seules sur mes joues. Je repense à mon évanouissement d'il y a quelques semaines devant tout le monde. Je me rappelle aussi quand j'ai ouvert les yeux à l'hôpital. Mes parents paniqués, mon grand frère qui me tient la main à côté de moi.
Je commence à suffoquer, à m'énerver, je me gratte les mains en toussant. En trouvant la force de me lever je prends ma vantoline pour calmer ma respiration. Je m'allonge ensuite dans mon lit, je tends une main tremblante et hésitante pour prendre mon téléphone. Mon copain m'avait dit que si mes crises revenaient il fallait que je l'appelle, mais il travaille beaucoup et est épuisé. Alors je repose mon téléphone en soupirant. Je tiens mes draps le plus fort possible en pleurant. C'est dans mes moments là que vous vous sentez comme quelqu'un de bon à rien.
Mes démons me hantent souvent la nuit, et c'est ces nuits qui sont les pires pour moi.

Mes démonsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant