Chapitre 4

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LOUNA

Toujours ce canapé de couleur crème, cette salle assez petite avec des murs d'un rose pâle. Émy me regarde un peu tristement, ça fait déjà 5 minutes que je suis rentrée et je n'ai toujours pas parlé. J'ai le teint encore plus pâle que d'habitude, des cernes plus vifs et aucune expression. À vrai dire ma vie part un peu dans tout les sens en ce moment, je sais plus trop quoi penser.

"Louna, tu sais, tu es là pour parler et moi pour t'écouter. Tu peux me faire confiance."

Elle m'a dit ça avec une telle douceur, j'ai passé ma main dans mes cheveux colorés d'un rouge ternis avec le temps.

"Je... enfin, ce weekend mon père a recommencé..."

Ma gorge se serre puis j'ai repris.

"Il a encore pété un câble. Il a été violent avec ma mère et mon grand frère. Puis il s'est barré, on ne sait pas où"

Emy ne sait pas quoi dire, elle me regarde juste d'un air triste, elle s'inquiète pour moi ça se voit.

"Et toi comment te sens tu ? Comment tu traverses ça ?"
"Mes angoisses arrivent plus souvent..."

J'ai les larmes qui montent, je tremble. Je ne sais même pas pourquoi je me mets dans cet état là. C'est la première fois que je vois ma psy qui perd ses moyens face à moi. D'habitude elle a toujours les mots pour me calmer mais là je voyais qu'elle ne savait pas quoi faire. Elle me tend un mouchoir, note un long pavé sur son calepin et me regarde pleurer. Ça faisait longtemps que je n'avais pas craqué de la sorte, et c'est le genre de crise de larmes qu'on arrive pas à arrêter jusqu'à l'épuisement.

"Je connais ton père, tu sais. Parfois il est impulsif mais je suis sûre qu'au fond il vous aime."
"J'ai jamais eu de reconnaissance avec lui, il me balance toujours des remarques à la figure et ne m'a jamais félicité."
"Il ne sait peut être pas comment faire. Calme toi Louna, ça va aller."

Sortie de la séance je n'arrive toujours pas à me calmer. Je décide alors d'aller au parc pas très loin pour dessiner et me changer un peu les idées. Je cherche un banc pour m'assoir dessus, je n'ose même pas lever la tête je dois être affreuse et avoir les yeux rouges. Vers le fond du parc je prends un banc et m'assois en tailleur avec mon carnet sur mes genoux. Je dessine d'abord ce que je vois autour de moi, c'est à dire du feuillage, des arbres, des enfants qui jouent dans les jeux. Dessiner à vraiment un effet thérapeutique sur moi, je me calme enfin. Je gribouille plusieurs pages de mon carnet déjà bien entamé et un peu abîmé, on voit bien qu'il a été un peu partout. Ça fait déjà une bonne heure que je suis là à respirer l'air frais. D'ailleurs plusieurs personnes ont eu la même idée que moi. Au loin je vois une grande femme avec de longues jambes fines, avec un carré blond et lisse, elle est très très classe. Puis à côté d'elle il y a une jeune fille, je pense qu'elle a mon âge et des beaux cheveux bleus. Ce qui me marque c'est qu'elle est très maigre, j'ai eu l'impression qu'elle est malade. Ses cheveux bleus font ressortir son teint assez blanc presque cadavérique. Dès que cette jeune fille a tourné son regard sur moi j'ai vite regardé ailleurs. Je me suis senti gêné, c'est assez embarrassant de regarder fixement une personne pendant un long moment et qu'elle le remarque. Soudainement la dame qui l'accompagnait s'approche de moi et me sourit.

"Bonjour mademoiselle, vous êtes en art ?"

Assez surprise j'ai à peine réussi à formuler une phrase concrète. Elle m'a sourit et s'est retourné vers la jeune femme à côté d'elle, c'est surement sa fille.

"Eh tu as vu comme elle dessine la jeune fille ?"
"Maman..."

Elle avait l'air exaspérée, c'est vrai que sa mère l'a mise dans une situation gênante autant pour elle que pour moi. La dame blonde regarde ce que je fais de plus près, n'osant plus rien dire je continue de dessiner comme si de rien n'était.

"Oh vous dessinez vraiment bien ! Vous êtes vraiment douée !"

Je hoche la tête timidement. La fille aux cheveux bleus regarde de loin aussi, surement par curiosité. Puis elle baisse les yeux vers moi.

"Ancienne coloration non ?"
"Oui c'est une coloration qui a mal vieilli on va dire... en tout cas ton bleu est super beau."

Première fois de ma vie que je fais un compliment à une inconnue spontanément. Je me suis surprise moi même à ce moment là. Quand j'y pense je n'ai jamais vu cette fille par ici, pourtant je traîne souvent dehors. Quelques minutes plus tard la mère et sa fille partent.

Il est environ vingt heures, je suis dehors avec mon copain et quelques amis. Enfin ce ne sont pas les miens mais ceux de mon amoureux. On va souvent dans cette usine désaffectée se retrouver et parler tous ensemble. J'adore ce genre de moment détente et sans prise de tête. Avec chacun nos petites clopes on débat sur la politique, la société et autres sujets qui fait des disputes. Je parle pas beaucoup, je ne parle presque jamais en fait mais ils ont l'habitude maintenant. Quand je dis quelque chose c'est que je ne suis pas d'accord et j'exprime mon avis, tout en bégayant bien sûr. Ça me rend moins crédible. Très souvent je dessine, enfin, je les dessine. J'ai un carnet spécialement pour eux. Il y a souvent Matt, un gars assez maigrichon et jamais sans un tee-shirt de groupe de métal, des cheveux bruns qui lui arrivent aux épaules. C'est quelqu'un d'ultra gentil, même trop parfois, il se fait souvent écraser par les autres. Il y a Edith, une fille avec des dreadlocks blondes, et des yeux bleus à en tomber par terre. Elle ramène toujours son ukulélé avec elle, elle est adorable. Mais parfois sa santé m'inquiète, elle est anorexique et fait des malaises assez souvent. Du coup je la surveillais souvent à l'heure du repas au lycée. Pour finir il y a Nathan, il est en couple avec Matt depuis quelques mois, enfin officiellement. Au départ ça été difficile pour eux car ils ne voulaient pas reconnaître qu'ils s'aimaient l'un et l'autre. Même aux vingt-et-unième siècle l'homosexualité est toujours tabou et jugée, je ne comprendrais jamais.

Pendant qu'Edith joue avec son ukulélé Matt fait un geste soudain, comme si il venait de penser à quelque chose.

"Hey mais c'est bientôt l'anniversaire d'Arthur ! Vous y allez vous ?"
"Ouais surement" répondit Edith en chantant.

Je regarde Noah, pour attendre son approbation. Il me dépose un bisou sur le front.

"Bien sûr. Je l'aime bien ce gars."

La soirée est dans deux jours, j'avais complètement oublié et on a toujours pas de cadeau.

Vers une heure du matin, tout le monde commence à peu près à s'endormir. Pour moi c'est l'heure où mes démons reviennent. Je tremble et je crise, Noah a l'habitude de gérer ce genre de moment avec moi.

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Bonjour !! c'est la première fois que je vous parle hors de mes chapitres haha. En faite LaRockeuse et moi nous avons décidé quelques fois de publier un chapitre en commun du coup j'espère que ça va vous plaire. Bonne lecture!

Mes démonsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant