Une semaine s'est écoulée depuis mon retour. En me réveillant ce matin, tout ce que je souhaitai est de pouvoir passer une journée paisible sans drame. Mais l'ambiance à la maison est toujours tendue. J'essayai tant bien que mal de me rapprocher de père. Mais ce n'est pas chose facile.
Huit heures il fut quand je décidai de me lever. Rama dormait encore paisiblement dans son lit parapluie et je fis en sorte de ne surtout pas perturber son sommeil.
J'attrapai ma serviette et filai à la salle de bain. Rien de tel qu'une bonne douche froide pour te remettre les idées en place. Je dois dire que Dakar et Miami ont le même climat. De ce fait, la transition ne nous est pas ardue en changeant d'environnement.
Sortie de la douche, je fis mes ablutions et rattrapai mes prières avant de descendre prendre le petit déjeuner avec les parents même si l'effervescence familiale n'est pas au rendez-vous. Quant à ma sœur, Nabou, je ne l'ai toujours pas vue. À croire qu'elle m'évite. Je sors de la chambre en entrebâillant la porte afin de pouvoir entendre la petite au cas où elle se réveillerait. En descendant les escaliers, mon père me suivit du regard. Mère était attablée à côté, en train de lui servir une tasse de kinkéliba aromatisé à la menthe et à la citronnelle, communément appelé douté ou sekhew dans notre langue nationale. Mon père, à part le café Touba, n'est pas amateur de café. Il préfère cette coction par dessus tout. Je me rappelle que tous les matins avant d'aller à l'école, maman nous en donnait mélangé à du lait. Après avoir dit bonjour, je vins m'asseoir à l'autre bout de la table.
Mère :Alors tu as pu récupérer un peu ?
Ansah : Oui si on veut. Disai-je, sourire aux lèvres.
Mère: Mais j'espère que tu n'envisages pas de sortir aujourd'hui. Il vaudrait mieux que tu te reposes. Bi nga gnewé ba légui toggo.
Ansah : Malheureusement si, il faut que j'aille en ville toute à l'heure pour quelques formalités, entre autre l'appartement que je veux louer, il faut que j'aille voir pour l'emménagement...
Entendant ces mots, ils arrêtèrent ce qu'ils faisaient, l'air surpris.
Mère: Ngani lane? Tu projettes d'aller t'installer ailleurs?
Ansah: Oui maman. Je voulais vous en parler. Je ne compte pas rester ici indéfiniment tout de même ! Cheikh m'a aidée pour cela. Ce ne sera pas loin d'ici. Dans un mois je vais commencer mon nouveau travail alors...
Père: As-tu perdu l'esprit? Rétorqua papa sur un ton colérique.
Ansah: Papa, comprends que je veuille prendre mon indépendance vis-à-vis de vous. C'est ce que j'ai fait pendant presque trois ans quand j'étais à Miami. Je me suis prise en main. Travailler en tant que serveuse en dehors de mes heures de cours m'a permis de mettre de l'argent de côté.
Père: Non mais tu plaisantes? Tu te fous de qui ? Dit-il en donnant un si fort coup de poingt sur la table que cela fit valser les assiettes.
Ma mère essaya de calmer le jeu.
Mère: Seydou, contrôle-toi s'il te plait. Ce n'est pas bien ce que tu fais.
Père: Way boulma demander de me calmer wa yow. Elle croit qu'elle est libre de faire ce qu'elle veut. Mais pour qui te prends-tu?
Je n'ai jamais vu mon père de cette façon. Il n'a jamais été aussi amer avec moi. Certes quand je faisais des bêtises, il me grondait mais là c'est hallucinant.
Ansah: Papa, de par ta réaction, tu m'as clairement fait comprendre que je ne suis pas la bienvenue dans cette maison. Alors, pour éviter d'autres désagréments, je vais m'installer ailleurs. Je ne veux pas poser plus de problèmes à la famille.
En prononçant ces mots, sama khol dafa diss. Je relevai la tête et vis papa arborer une expression triste sur son visage pendant quelques secondes.
Mère : Mais tu peux attendre un peu non? Avoir son propre chez toi, c'est une lourde responsabilité. Té nga fomb ton déménagement pour plus tard?
Seynabou: Elle veut partir, laisse la s'en aller. Moi personnellement cela me convient.
Je me retournai et vis ma sœur se tenir derrière moi. J'arrive à peine à la reconnaître tellement elle est devenue transformée. Je n'en croyais pas mes yeux. Nabou qui aimait si bien prendre soin d'elle. Que lui arrive-t-il? Cela se voyait qu'elle avait découché cette nuit vu qu'elle portait encore des habits de soirée. Je me levai de ma chaise pour bien la contempler, stupéfaite de la voir dans cet état. Je la pris dans mes bras. Mais elle sentait l'alcool.
Ansah: Nabou, depuis quand t'es-tu mise à boire. Maman, mais li kagn lako dal? Ki yow la?
Mère hocha la tête l'air dépassée.
Père: Mane je me demande lane la def suñu borom ba mes deux filles soient si irrespectueuses et dépravées.
Mère: Ay nidiay!
Père: Non mais c'est vrai.Tu n'as qu'à les regarder. Nabou trop c'est trop. Tu dégages de ma vue. Monte dans ta chambre.
Les cris de mon père réveillèrent Rama.
Ansah: Papa, je m'excuse du fait d'être une déception pour toi. Maman Rama et moi allons s'installer à l'hôtel dès ce soir en attendant que notre logement soit disponible. Cela ne prendra que quelques jours. Comme à son habitude, par souci de bien faire, elle tenta de m'en dissuader.
Mère: Non lolou yakhoum khaliss la.
Ansah: Yay, je ne me vois pas rester ici sachant que ma présence dérange. Bayil nonou rek.
Je décidai d'aller voir ma fille, de lui donner le bain et à manger. J'entendis maman se disputer avec papa.
Mère: Seydou war nga kholat sa bop. Da gnou naan dom meun na yorel akh wadiouram mais yowit amal nga len akh. Lou way def sa bop nak.
Après le déjeuner, je décidai de contacter l'hôtel pour réserver une chambre. Suite à cela je bouclai nos valises avant d'appeler un taxi.
En quittant cette maison dans laquelle j'ai grandi, j'avais le cœur lourd et meurtri. Mais ce fut la bonne chose à faire. J'embrassai ma mère et la rassurai. Mon père resta indifférent quand je lui disais au revoir.
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ANSANAH:LA TUMULTUEUSE VIE D'UNE JEUNE FILLE
Ficción GeneralRésumé Aujourd'hui Ansanah fête a 20 ans et pour elle cela fait un peu bizarre .Il est dit qu'à cet âge, les choses deviennent plus sérieuses. Mais pour cette jeune Dakaroise, elles le sont dès ses 16 ans. Avoir à supporter une responsabilité aussi...