II. « Life, for all its anguish, is ours, miss Ives. It belongs to no other. »

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– Mr Lyle


Dracula avait raconté la fin de son histoire à la Mère du Mal. « Tu n'es pas morte, mais pas vivante pour autant. Tu n'es plus humaine », lui avait-il dit, « mais tu n'es pas une créature non plus. ».

Il avait fallu cinq années à la Mère du Mal pour émerger de ses propres ténèbres. Cinq années pour que son corps soit à nouveau celui qu'il était. Mais après tout, cinq ans ce n'était rien lorsque l'on possède l'éternité.

L'esprit de la Mère du Mal dérivait vers ses amis, qui l'avaient enterrée. Après avoir combattu des créatures de l'ombre pendant tant de temps, étaient-ils maintenant en paix ? Le vieux gentilhomme avait à nouveau enterré un enfant, il portait à nouveau le deuil ; Frankenstein poursuivait ses recherches peu orthodoxes avec le Docteur Jekyll ; quand à son Loup Protecteur, nul ne savait réellement où ses pieds l'avaient porté.

Dracula prit les mains de la Mère de Mal, les portant à ses lèvres.

— Ton esprit dérive vers tes compagnons, je le sens bien, dit Dracula. Ne pense plus au passé, ma douce, ton avenir est maintenant avec moi. Nous règnerons ensemble sur les ténèbres, en tant que roi et reine. Les créatures de l'ombre, tes enfants, seront nos obligés, ils te feront bien vite oublier ces humains... ce loup de ton passé. Deviens mienne à nouveau, et le monde de la nuit nous appartiendra.

— Et si je refuse ? Le défia la Mère du Mal.

— Tu peux refuser aujourd'hui, mais demain tu reviendras vers moi, tu te rendras vite compte que je suis le seul à pouvoir te sauver.

La Mère du Mal dévisageait Dracula avec méfiance. Le vampire avait ses secrets, des secrets qui pourraient tout changer. L'amour qu'il portait à la Mère du Mal était pur et sincère, elle était sa reine et lui son roi, mais le poids des mensonges et des non-dits était trop lourd pour qu'elle reste à ses côtés.

Dracula lui avait laissé le choix. Elle choisit de partir. Partir pour retrouver la Descendante, cette femme au mental inégalé.

— Va, ma douce, mais n'oublie pas ceci : tu me tournes le dos aujourd'hui, mais tu reviendras vers moi demain. Je t'attendrai, parce que je suis la seule personne à pouvoir te sauver.

— Tu dis vouloir me sauver, mais je ne vois aucun prédateur plus dangereux que toi, dit la Mère du Mal d'une voix chargée de sous-entendus. Comptes-tu me sauver de toi ?

— Pas de moi, de bien pire. Il t'attend depuis toujours. Tu l'as déjà rencontré, mais je suis le seul à pouvoir t'en sauver.

Cette dernière phrase résonna comme un écho lointain dans l'esprit de la Mère du Mal.

☽ ♱ ☾

26 avenue Riverside, Londres. C'était la seule information que m'avait fournie Alexander avant mon départ. Rester à proximité de cet homme n'était pas une option envisageable. J'étais restée quelques jours de plus dans son manoir après mon réveil. Alexander avait fait mettre quelques domestiques à ma disposition. Ils étaient humains, et les marques dans leur cou me prouvèrent qu'ils n'étaient pas réservés à mon seul usage.

Après notre confrontation à mon réveil, je n'avais pas souvent vu Alexander. Il me tenait parfois compagnie lors du dîner, mais je faisais en sorte que nos échanges restent brefs. Il se contentait alors de me parler de ses chevaux ou de la nouvelle garde-robe qu'il m'avait offerte. À mon départ, je n'avais pris que quelques robes, les plus simples et les moins extravagantes. J'avais été impressionnée par le nombre de vêtements qu'il m'avait fait faire, tous étaient parfaitement à ma taille, prouvant qu'il avait minutieusement préparé mon réveil. Comme s'il pensait que je choisirais, que je souhaiterais rester avec lui.

PENNY DREADFUL - LE SANG DU SCORPIONOù les histoires vivent. Découvrez maintenant