Engel

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C'était étrange. Je sentais comme une présence dans la pièce. Je me retournai. Mon sang se glaça.
Une ombre était tapie dans le coin de ma chambre, et me fixait. Elle était contre mon armoire.

" Qui êtes-vous ? "

Elle se redressa aussitôt qu'elle m'entendit. Je voyais quelqu'un se rapprocher de moi, avec d'immenses choses qui ressortaient de son dos. Il s'avança vers moi.

" Elle est sympa ta chambre. Je sens que je vais bien me plaire ici. Ça ne te dérange pas que je prennes le lit ? "

Il me regarda d'un air moqueur. D'où venait-il pour squatter chez moi ? Et comment était-il rentré ? Comment avait-il pu franchir les limites que j'avais mises en place ? Était-il le seul ou d'autres l'avaient-il suivit ?

" Je ne crois pas que ça va être possible... " lui dis-je, intimidée.

Il scruta du regard la fenêtre fermée, puis après un court instant, il dit :

" Je pense qu'il vaut mieux pour toi que je reste. Pour ta sécurité et la mienne. "

Il reprit son sérieux, puis il se retourna vers moi. Je m'étais assise sur le lit. Engel m'observa, puis examina le reste de la pièce. Je décidai alors d'aller mettre mon pyjama. Je me levai et me dirigeai vers la salle de bain, qui était à l'opposé d'Engel. Je pris mes affaires au passage, et m'enfermai. Je me changeai, puis me regardai à travers le miroir. Un ange... un ange était bel et bien là, dans l'autre pièce. Il n'y avait qu'une petite porte qui nous séparait. Un sentiment me transperça. La fuite. Je voulais m'enfuir, me cacher dans un coin perdu, mais je savais bien qu'ils me retrouveraient, d'un jour à l'autre. Je pris une grande inspiration, puis poussai la porte. Ce n'était donc pas un rêve. Il était toujours là. Je le dévisageai. L'être angélique était allongé sur mon lit, sur le côté, et semblait dormir. Sa respiration de plomb posait les temps, comme une contrebasse. Ses ailes prenaient toute la place. Je contournai le lit. Je vis son visage caché par une de ces mèches. Il avait l'air d'être sous l'emprise d'un profond sommeil. C'était peut-être le moment rêvé pour s'échapper de cette prison ! Je saisis cette chance et me dirigeai vers la liberté, autrement dit la porte de sortie. Je me mis sur la pointe des pieds, puis j'avançai sans bruit, en limitant mes mouvements. Quand j'atteignis la poignée, je posais avec délicatesse et méfiance ma main dessus.

" Tu ne devrais pas sortir. De toute façon, j'ai fermé à clé. "

Je m'étais figée. Il me parlait tout en ayant les yeux fermés. Je me retournai alors vers lui.

" Et pourquoi ?
- Je te l'ai déjà dit."

Sur ses mots, il se retourna, laissant ses ailes en dehors du lit, au dessus du sol, libérant ainsi la deuxième place de mon lit.
J'examinai ses ailes, tout en faisant attention de ne pas les toucher. Rien que de penser au fait qu'il ait la force d'au moins vingt hommes, j'en avais la chair de poule. Son visage était de l'autre côté, et je ne savais pas s'il dormait ou faisait semblant. Je m'avançai vers la partie du lit vide.
J'étais tellement fatiguée que je tenais à peine debout. Je m'assis, ne le quittant pas d'une seule seconde du regard, puis je me mis sous la couette. Je m'endormis en un rien de temps.

Le lendemain matin

J'entrouvris les yeux. Le silence pesait dans la pièce. Je me redressai, lentement, et j'examinai tout autour de moi. Il n'y avait personne. C'était un rêve ? Une hallucination ? Je préférai essayer d'oublier ce qu'il s'était passé et filai vers la douche. J'emportai mon pantalon noir en jean, avec un tee-shirt rouge de style rock. J'entrai dans la salle de bain, puis ouvris le robinet de la douche. L'eau était froide, pour ne pas dire gelée. Je m'empressai de me laver pour ensuite m'habiller. Je ne savais pas ce que j'allais faire aujourd'hui. Je n'avais reçu encore aucun message de mes amis, alors que nous avions prévu une sortie au parc. Je fouillai mon téléphone, mais toujours aucune nouvelle. Je m'écroulai sur mon lit et écoutai le vide, le néant, les bruits non existants. Je n'avais pas remarqué mes fenêtres. Elles étaient toutes barricadées, sauf une. Une seule et unique ouverture dans ma forteresse. Mes souvenirs me revinrent. Tout était vrai, Engel était bien là hier. Mais il avait comme qui dirait disparu, envolé. Mon corps fit un bond vers la fenêtre et je passai ma tête à travers. Il faisait beau, le soleil cognait mais l'air était plus humide.
Une camionnette roulait au bout de la rue, en direction de ma maison. Leur logo me rappelais quelque chose, mais je ne me souvins pas de quoi. Les pneus crissaient sur le bitume neuf de trois semaines. La route était flambant-neuve, mais elle n'allait pas tarder à être salie de traces de pneus. Le véhicule roulait à toute allure, comme s'il avait perdu le contrôle. Vers cinq ou six mètres, la voiture fit un créneau, en tournant au moins trois fois sur elle-même, puis se stoppa devant mon portail. Quatre hommes apparurent, tous habillés de noir, regardant en ma direction, par l'ouverture dans le mur qui me servait de fenêtre. Ils s'avancèrent, forçant sur leur passage le portail souillé de rouille. Je ne les quittais pas des yeux, tout en me reculant prudemment, jusqu'à les perdre de vu. J'entendis ma porte toquer. Trois grands coups. Comme si on enfonçait un clou dans une planche bois. Je ne fis plus aucun geste. J'attendis. Quelques secondes s'écoulèrent jusqu'à un nouveau rappel.

" Ouvrez s'il vous plaît. Nous devons vous poser quelques questions. "

*Silence*

" Je vous préviens, nous avons un mandat. À trois, on enfonce la porte. Ouvrez nous et vous serez en sécurité. "

*Silence*

" Un........ Deux.......... "

Je n'entendis pas le dernier mot. La porte reçu de terribles coups violents. Malgré les meubles qui empêchaient son ouverture, la porte commença à céder. Que devais-je faire ? Leur voix commencèrent à résonner dans le salon, et la panique s'empara de moi. Que me voulaient-ils ? J'avais déjà répondu à quelques questions de la part d'une certaine agence... ATAA... ou DFAA... je ne m'en souvenais plus. Prise d'angoisse, je tentait de sortir discrètement par la fenêtre. C'était assez haut. Tomber de cette hauteur pouvait être fatal, surtout avec les arbres en dessous. Leurs branches étaient pointues, et je pouvais facilement me faire empaler. Mais où était Engel ? Jamais là quand on avait besoin de lui en tout cas. Pour une fois que j'espérai le voir, surtout pour me sauver la vie, en tout cas. Je vis le chêne en face de moi, et pris de l'élan pour m'accrocher à une de ces branches. Je sautai. L'air me porta, et je me sentis voler. Au moment où je tendis les bras pour atteindre la branche, je compris qu'il était trop tard. Nous étions séparés d'un mètre environ, et la chute n'était pour moi plus qu'inévitable. On pouvait dire que la chance ne me souriait pas aujourd'hui. Une branche me traversa la poitrine, ressortant de mon dos, et fut tachée de rouge. Un beau rouge écarlate, comme un coulis de fruits rouges fraîchement mixés. La douleur ne se fit pas prier, et je gémis de souffrance. Je me sentis partir, ma vision était brouillée, l'obscurité commença son ascension.

Si seulement tu savaisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant