Éveil

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Il faisait noir. Je remuai mon corps. Il y avait comme une enveloppe collée à ma peau. Je gigotai, encore et encore, mais je n'arrivai pas à sortir. Je remarquai alors que mes mains n'étaient pas liées. Je m'en servis donc pour essayer de trouer ce qui ressemblait à un sac. Je pensai que c'était du plastique car un chiffonnement se faisait entendre à chacun de mes mouvements.
Par chance, je réussis à ouvrir ma prison, et je fus éblouie par une lumière blanche. Je m'extirpai de l'endroit. Autour de moi se trouvait des tas d'instruments. Enfin, ceux que les médecins utilisent. J'étais assise sur une sorte de table d'opération, mais qui ressemblait plus à une table de légiste. Je me relevai, et me dirigeai vers des casiers gris clair. Ils étaient froids. Je serrai la poignée de ma paume moite, puis donnai un petit coup vers la droite afin d'ouvrir cette étrange porte. Un nuage glacial sortit en trombe, me gelant le visage. Était-ce un congélateur ? J'agitai ma main afin de dissiper le brouillard givré, puis j'aperçus une chose bizarre. On aurait dit le haut d'un crâne. Je tirai le tiroir, me dévoilant ainsi un corps, un cadavre congelé depuis quelques jours sûrement. Je refemai tout aussitôt. Mais que faisais-je là ? Et pourquoi étais-je dans ce sac ? Que m'était-il arrivé avant tout cela ? Je n'en avais aucune idée. Je me dirigeai vers ce qui m'avait servi de couche. Il y avait du sang au fond. C'était alors que je fis ce que j'aurais dû faire depuis le début : examiner mes vêtements. Je remarquai aussitôt un gros trou à travers le tissus qui me servait de tee-shirt. Du sang séché s'était agglutiné devant et derrière. J'en avais aussi sur mon pantalon. Je soulevai mon tee-shirt, mais il n'y avait aucune trace, aucune blessure. Je me souviens alors de la branche, et de l'arbre, et de la fenêtre,... et de plusieurs hommes. Tout me revint alors si brutalement, que cela me fit bourdonner la tête. Je m'assis, puis fermai les yeux. Je me concentrai. Donc, des hommes en noir me chercheraient, des anges voudraient me manger, et je me retrouvais dans une sorte de morgue, seule. Et puis, je ne pouvais pas sortir. Si quelqu'un reconnaissait ma tête, normalement je devrais être morte... Je devais m'échapper sans laisser le moindre indice, et faire comme si j'étais décédée. Je remplis alors le sac de diverses choses assez lourdes pour faire croire à un corps, puis je le mis dans les tiroirs de congélation. Je m'apprêtai à partir.

" Eh, toi ! Reviens ici ! "

Je commençais à courir, mais une silhouette apparut devant moi. Elle devait mesurer deux mètres au moins. Costaud, le colosse s'avança, ce qui me fis reculer. D'autres gars arrivèrent. Il y avait des mastodontes, et des plus fins. Un des leurs s'approcha de moi.

" Tu vas venir avec nous. J'ai une mission à te confier. Tu es la seule à pouvoir l'accomplir.
- Et si je ne veux pas ?
- Si tu ne veux pas ? Mais bien sûr que le tu veux. Sinon, tu resteras à pourrir dans une cellule. Qui sait, peut-être que tu seras torturée pour passer le temps. De toute façon, tu n'as pas le choix. Tu es seule, nous sommes dix. Tu veux jouer à la plus maligne, mais tu ne gagneras pas. "

Il approcha sa main de mon visage. Je détournai la tête par réflexe, tout en me reculant d'un pas. Le cercle se rétrécissait autour de moi. Je n'avais plus beaucoup d'espace. Il en profita pour s'approcher un peu plus, puis commença à effleurer mon visage avec le revers de sa main.

" Tu vas nous suivre bien sagement, sans faire d'histoire. Ensuite, tu travailleras pour nous. Et si tu es sage, tu reverras peut-être, je dis bien peut-être, ta chère maison et tes amis. Enfin, si tu en as encore. "

Il esquissa un sourire vicieux, moqueur, tout en me regardant droit dans les yeux. J'étais tétanisée. À vrai dire, je ne pouvais rien faire. J'étais prise au piège. J'acceptai à contrecœur leur invitation, ne voulant pas me retrouver dans de sales draps en me débattant. C'était lui qui parlait au nom des autres, qui donnait les ordres et qui était le seul à me parler véritablement. Il restait près de moi, toujours en me surveillant. Il était grand, les cheveux bruns avec des reflets cacao, les yeux bleu océan, la peau légèrement bronzée, habillé tout en noir. Il avait une démarche assurée et hautaine, toujours sur ses gardes. Il parlait avec tact, distinctement et sans cacher ses pensées. Il avait une franchise assez poussée, cela se voyait à son allure. Rien que sa présence inspirait le respect et la peur.
Nous arrivâmes dehors, passant la porte de service. Il y avait une grosse camionnette noire garée de travers. Je m'arrêtai, par réflexe sans doute, pour observer les issues possibles autour de moi. Rien. J'étais bien trop encerclée. Un des gars me poussa, prétextant qu'il fallait se dépêcher. On me fit monter à l'arrière. C'était assez grand, il y avait beaucoup de place. Le meneur me prit par le bras et m'entraîna vers un des bancs. Il m'attacha les mains derrière et relia les menottes au mur de la camionnette. Deux gars s'installèrent devant, afin de conduire, puis les autres vinrent occuper les bancs vides dans le fourgon. Le chef s'assit près de moi.

" La route va être longue. Je te prierai de te taire. "

Sur ses mots, il s'étala contre le mur, les mains dans les poches. J'observai avec angoisse les autres. Ils avaient l'air de se tenir tranquilles. Le silence s'installa, laissant place à la douce mélodie des pneus roulant sur le bitume.

Si seulement tu savaisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant