Le barman, le pirate et le fusil à mammouth

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                                                  ... et un scorpion géant

Bob l'Octodian est normalement barman et propriétaire d'un « Metal Bloody Saloon », mais lorsqu'il a besoin d'argent il consent à accepter d'autres emplois en parallèle.

On peut généralement trouver le capitaine Harlock à l'épicentre de la bataille spatiale la plus dévastatrice du quadrant, et presque systématiquement à l'intérieur de son vaisseau, l'Arcadia. En l'occurrence et une fois n'est pas coutume, le capitaine a emprunté un spacewolf pour négocier les habituelles transactions pièces de rechange / cristaux de navigation si chères à Tochiro quand il décide de mettre en place une énième mise à niveau des systèmes d'armes du vaisseau pirate. Harlock a donc quitté l'Arcadia (au dock du côté de Bétâ Pictoris) pour rejoindre les planètes technologiques de la Bordure. Il a eu la malchance de tomber sur la Huitième Flotte de retour de patrouille. Et ce qui n'aurait été qu'un petit accrochage routinier aux commandes de l'Arcadia s'est avéré beaucoup plus problématique avec un de ses spacewolfs...

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Planète Tehujin, quadrant Pegasus, 1304 (heure locale).

Le soleil double était au zénith. La plaine rocailleuse, écrasée de chaleur, miroitait sous l'effet de la brume qui s'élevait. Après avoir bravé le désert toute la matinée, les travailleurs s'accordèrent une pause. Le barman en profita pour proposer quelques boissons rafraîchissantes – ça ne ferait pas basculer le bilan financier de son bar dans le positif, mais qu'il le veuille ou non il était propriétaire du seul débit de boissons de toute cette foutue planète, il n'allait pas fermer boutique sous prétexte que cinquante pour cent des habitants ne possédaient pas l'argent nécessaire à acheter ne serait-ce qu'une bière de Ganymède. Le barman vendait donc la plupart de ses consommations à crédit tout en sachant qu'il ne serait jamais remboursé, et avait offert ses services au Conseil de la ville pour boucler ses fins de mois, lequel s'était empressé d'accepter les bras multiples de l'Octodian.

Le travail ne manquait pas. Les colons espéraient terraformer la planète, mais le désert se défendait bec et ongles. Il fallait sans cesse reconstruire les digues qui empêchaient le sable d'engloutir la ville ou recreuser les fosses qui piégeaient la faune locale à l'extérieur de la zone habitée.

Le sifflement d'un réacteur en détresse se répercuta à travers la plaine. Le barman plissa les yeux pour déterminer la provenance du bruit malgré la lumière aveuglante ; un trait de fumée traversa le ciel au sud et se perdit derrière les formations rocheuses qui bordaient l'horizon.

— 'risque d'avoir des difficultés à repartir, celui-là, commenta quelqu'un.
— Il n'est pas tombé très loin d'ici, fit le barman. On devrait pouvoir le rejoindre en glisseur.

Les autres travailleurs le fixèrent avec une expression incrédule.

— Hors de question que je me risque dans ce désert pour un appareil qui n'est certainement plus qu'une épave calcinée, rétorqua le plus proche.
— Son pilote est peut-être encore en vie, argumenta le barman.
— Plus pour longtemps, en tout cas... 'm'étonnerait qu'il survive à la nuit...
— Raison de plus pour partir maintenant.

Les colons haussèrent les épaules et retournèrent à leurs tâches. Le barman comprit qu'il ne parviendrait à convaincre personne, mais il ne pouvait les en blâmer. Il n'était sur cette planète que depuis quelques mois et avait largement pu constater que, ici plus qu'ailleurs, chaque jour était une lutte féroce pour la survie. Les colons réservaient leur énergie pour construire leur propre futur et ne tenaient pas à mettre en péril ce qu'ils avaient eu tant de mal à bâtir... ni à se lancer dans une opération de sauvetage hasardeuse.

Le barman et le pirateOù les histoires vivent. Découvrez maintenant