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Je m'appelle Damon. J'ai dix sept ans. Je pourrais dire que je suis un mec comme les autres, mais ce n'est pas le cas. Parce que je ne le suis pas.
Je ne suis pas élève au lycée de ma ville, à arpenter les couloirs avec mes potes, à faire peur aux petits nouveaux, à draguer les filles, à me faire virer de cour pour un mot déplacé ou un retard injustifié. Je ne vis pas non plus dans une jolie maison bien entretenue autant à l'intérieur qu'à l'extérieur, avec mes parents et ma sœur. Je n'ai pas de voiture pour me barrer loin d'ici, ou juste pour aller au drive in du coin, pour me balader avec mes potes ou juste pour aller manger un morceau.
J'ai dix sept ans et je vis dans la rue, depuis quelques mois maintenant.
Je pourrais vous dire que j'ai peur de temps en temps, que je ne sais jamais d'avance si j'aurais de quoi m'acheter à manger ou si je trouverai de quoi me nourrir dans les poubelles. Je pourrais vous dire aussi que ma fierté m'empêche de rentrer chez moi parce que je sais ce qui m'attend. Alors je préfère rester dans la rue, même si c'est dur, même si j'ai peur, même si j'ai froid.
Les bons jours, je peux dire que je vais manger à ma faim. Que ce soit en faisant la manche, dans la rue, à des endroits stratégiques. J'évite les beaux quartiers, les endroits où grouillent les hommes d'affaires et les femmes snobinardes à souhait. Ces gens là vous regarde avec tout le mépris du monde. Comme si nous avions la peste alors que nous voulons seulement manger. Ils ont les moyens de donner, de faire un geste, mais ne le font jamais.
Non, ces jours là, je me pose près du centre commercial. La population qui s'y croise est variée. Des jeunes. Des moins jeunes. Peu importe. Mais eux ne vous regarde pas avec du mépris. La plupart ont un sourire, même s'ils ne vous donnent rien. Et ceux qui vous donnent ne le font pas en baissant la tête, comme s'ils avaient peur de croiser votre regard. Ils vous fixent, d'un air sympathique, sans vous juger. Et vous donnent une pièce, un billet ou seulement une parole réconfortante. Rien d'autre mais c'est suffisant.
Souvent, je traine sur les parkings. Vous n'imaginez pas le nombre de gens qui oublient de verrouiller leurs portières. Je ne repars jamais les mains vides, ou alors vraiment rarement. Un stylo, qui la plupart du temps, ne me servira à rien sauf à faire des dessins sur ma peau. En prévision de ces tatouages que j'aimerais me faire quand j'aurais les moyens. Des vêtements desfois, souvent trop grands ou trop petits, mais qui me tiennent chaud l'hiver. De l'argent, des pièces de monnaie sans grand intérêt ou un billet, qui me permettra de m'acheter quelque chose à manger.
A force d'être toujours aux mêmes endroits, je commence à connaître du monde. Et surtout, à connaître ceux qui vivent dans la rue comme moi. Si j'ai pris l'habitude d'être seul la journée, ce n'est pas le cas la nuit. Trop risqué. Le danger guette à chaque coin de rue, entre les dealers, les voyous. Faire connaissance avec quelques gars dans la même situation que moi m'a permis de ne pas rester seul quand le soleil se couche. On se retrouve toujours au même endroit. Squattant un vieil immeuble inhabité. Des cartons dépliés, récupérés un peu partout, des vieux chiffons posés dessus et nous avons un lit de fortune. Certes, pas très confortable mais ne nous plaignons pas. C'est mieux que de dormir à même le sol, sur le bitume du trottoir.