~ 7 - Retour en arrière de cinq ans ~

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Les vacances d’étés étaient terminées depuis deux mois et j’avais recommencé les cours. J’étais toujours autant dans mes habitudes, dans mes études.
Lors du congé forcé, je me suis demandé mille fois comment allait être la prochaine année et si Uta allait encore envahir ma bulle, si elle serait toujours dans mon école. Je l’aurais presque regretté si cela n’avait pas été le cas.

J’avais tout de même tenté de me rendre invisible, de rester éloignée d’elle. Je préférais définitivement regarder de loin que de côtoyer et toucher, mais Uta en a décidé autrement. Elle me poursuivait, j’avais beau me cacher elle réussissait toujours à me retrouver. Je suis presque sûre qu’elle m’aurait et me retrouverais même dans un amphithéâtre bondé de mes sosies. 
Je ne savais plus quoi faire. J’étais presque désespéré. Je l’appréciais, mais elle n’était pas encore une amie, simplement une intruse. Je n’arrivais pas à savoir comment la gérer, elle et son hyperactivité. C’était trop intense pour moi, c’était à la limite si je n’avais pas peur d’elle. En vérité, je crois que je la voyais comme le tyran de ma vie, l’intruse, celle qui ne voulait pas me laisser solitaire dans mon coin morne et sombre. J’avais donc entrepris de trouver quelqu’un pour former un trio en espérant que ça atténuerait l’ampleur de nos échanges.

« Merci d’avoir accepté Fuki. »

C’était une de mes camarades de classe qui, en début d’année, était venue vers moi avec douceur. Elle avait rapidement laissée tomber en voyant Uta autour de moi à cause d’une rumeur qui avait circulé dans l’école. Il ne fallait pas approcher ses proies, les personnes qu’elle désignait pour être ses amis, ou elle viendrait vous intimidez. J’avais longtemps douté que cette rumeur était avérée, mais au fond de moi j’ai toujours su que c’était un immense mensonge qui l’arrangeait.

« Non, ça m’enchante d’avoir la chance de te connaitre. C’est à moi de te remercier. »

Je la vis arriver du coin de l’œil et elle avait l’air surprise de me voir avec quelqu’un d’autre. J’appréhendais déjà sa réaction à ce que je voulais lui annoncer et je ne savais plus si c’était une bonne idée. Tout d’un coup qu’elle le prenne vraiment mal et que ça déchire notre relation ? Paniquant, j’allais dire à Fuki de partir quand Uta m’interrompit.

« Toto-chan qu’est-ce qui se passe ? C’est qui elle ? » grogna-t-elle visiblement inquiète, voire jalouse.

Je m’étais sentie soulagée et je ne pus m’empêcher de rire. Alors elle n’était pas furieuse ou déçue. Ça m’a assez rassuré pour que ma précédente peur s’évanouisse et que mon courage revienne. Les yeux de l’intruse étaient intrigués ne comprenant pas la raison de mon soudain fou rire, ils continuaient à me fixer ignorant ma collègue. J’ai alors vu Fuki nous regarder tour à tour avant d’ouvrir les lèvres pour lui expliquer, mais je la devançais.

« C’est Fuki, une collègue de classe, et… » J’hésita un moment, tout de même inquiète, avant de reprendre en choisissant bien mes mots. « On a une passion commune toutes les trois, on pourrait passer du temps ensemble, tu ne penses pas ? »

Je croisais les doigts à m’en rendre les jointures blanches tellement que j’espérais qu’elle accepte sans faire d’histoires. Pour une fois, je la vis réfléchir pour probablement peser les pour et les contres. Je décidais rapidement de rajouter quelque chose en espérant faire pencher la balance de mon côté.

« Ça pourrait être un bon changement et comme tu te plains toujours que je suis pas assez enthousiasmer sur les nouvelles sorties, elle… Et elle pourrait même te suivre dans les conventions contrairement à moi. »

Uta n’avait pas détournée le regard vers Fuki une seule fois et avait soutenu mon regard sans ciller en prononçant un simple mot.

« Non. »

À la dureté de sa réponse et de son ton si sérieux, malgré sa voix basse et la douceur de son regard, j’eu le vertige et si je n’avais pas été adossé à un mur, j’aurais perdu pied. J’avais trop espéré et je ne m’étais pas suffisamment préparer à essuyer un refus. J’avais tellement peur de cette situation qu’une vague énorme d’anxiété m’avait envahi et je n’avais pas réussi à articuler quoi que ce soit, ce fut ma collègue de classe qui fit écho à mes pensées.

« Et pourquoi ? J’accepte pas ton refus sans une explication. » avait-elle répliquer en me jetant quelques regards inquiets.

Uta ne lui jeta même pas un regard et vint m’aider à mieux me tenir sur mes jambes flageolantes. Elle me chuchotait à l’oreille une multitude de choses que je n’arrivais pas à saisir comme si elle était à des kilomètres de moi. J’étais tellement déçu, tellement triste pour Fuki et tellement confuse face un tel refus que je me suis laisser entrainer. J’entendis une personne crier derrière moi et c’est la réponse d’Uta qui me fit réagir.

« Je te dois aucune explication à toi, je te connais pas. Retourne dans ton monde et laisse nous tranquille. Change de ville un coup parti. »

Comment pouvait-elle être aussi dure et froide ? Ce n’était pas du tout dans ses habitudes, ni dans ses valeurs. Je ne la comprenais plus. Elle qui était si sociable et amicale… Que ce passait-il donc dans sa tête ou chez elle pour qu’elle soit ainsi ?

« Uta ! C’était méchant ! » la réprimandais-je. « Un non suffisait amplement. » ajoutais-je beaucoup plus bas, trahissant ma tristesse.
« Désolé, je me suis emportée… Je te ramène à ta classe. »

C’est d’une voix extrêmement basse et coupable qu’elle m’avait répondu. Je la détaillais pendant un moment avant de baisser le regard. Elle était visiblement beaucoup plus fatiguée qu’à l’habitude et sa tenue avait beaucoup moins d’excentricité. Fuki ne pouvait peut-être pas avoir d’explications, mais moi c’était mon droit et je ne concevais pas de rester dans l’ignorance.

« Pourquoi tu ne veux pas ? » lançais-je avec précaution.
« T’aimeras pas ma réponse. »

Ce n’était pas comme si ça aurait pu être pire et je ne croyais pas qu’elle pouvait vraiment juger à cette instant ce que j’aimerai entendre.

« Je veux savoir. »
« Tu es à moi. Et je veux pas avoir quelqu’un dans mes pattes. »

J’avais donc bien eu raison, elle était jalouse. J’étais heureuse d’une telle réponse même si je n’en comprenais pas toute les nuances à cette époque. Cette révélation avait éclipsé son comportement précédent pendant le reste de la journée, mais je ne lui avais tout de même pas pardonné aussi facilement.

Intempérance EnivranteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant