Camille

9.

Le poing contre la porte, Camille pris une grande inspiration pour se donner la force de frapper. Amena devança son ami et frappa franchement. Une voix les pria d'entrer, Camille suivit Amena timidement. Cette dernière découvrit avec bonheur la maison, salua chaleureusement les membres de la famille de Camille et fut rapidement à l'aise. Pour le jeune homme, ce fut bien plus laborieux. Ce ne fut que vers le milieu du repas qu'il commença à se détendre. Tout ce passait bien, il se sentait aimé et heureux d'avoir enfin brisé la barrière qu'il avait lui-même posé et qui l'avait empêché de revoir sa famille.Le repas achevé, il profita d'un moment d'inattention de la part d'Amena pour aller passer du temps avec son petit frère qui était maintenant un adolescent grognon. Ils jouaient à la console dans le salon tout en réapprenant doucement à se connaître. Léo, bien que rancunier, se laissa vite amadouer face au regard sincèrement désolé de Camille. De toute façon, il lui avait pardonné depuis qu'elle avait passé le pas de la porte, c'était sa sœur après tout.

Malgré la bonne ambiance dans la maison, Camille tiquait à chaque fois que sa famille utilisait un adjectif ou un pronom pour le qualifier. En effet, il était déjà 16h et il ne leur avait toujours pas annoncé la « nouvelle ». Amena commençait à être a court de formulation non genrée car elle ne pouvait vraiment pas genrer son ami au féminin, elle aurait l'impression de faire s'envoler tout le respect qu'elle lui porte. Elle décida donc de lui lancer des regards insistant pour l'inciter à prendre son courage à deux mains et à affronter la peur, elle lui prit également la main sous la table pour lui donner du courage. Ce geste ne passa pas inaperçu auprès des parents de Camille et sa mère craqua. Elle n'en pouvait plus de ce suspens autour de la fameuse nouvelle, qui, comme elle en était intimement persuadé, était celle du couple Amena/Camille.

-Bon, alors, vous crachez le morceau ? De toute façon ça se voit, on l'a vu nous hein, dis Camille, tu nous prends pour des aveugles ? On est tes parents quand même, on le voit bien que vous êtes en couple. Si t'es si stressée parce que tu as peur de nous annoncer ton homosexualité, ne le soit pas, nous on s'en fiche, ça ne change rien du tout pour nous.

Pendant un instant Camille cru qu'elle avait compris sa transidentité et commença a sentir tout le poids accumulé sur ses épaules s'envoler doucement jusqu'à « en couple » où tous les kilo envolés revinrent d'un coup. Le ton bienveillant et amusé de sa mère et le sourire de son père l'avaient d'abord touché avant de le rassurer un peu. Il lâcha un petit rire qui fit exploser celui d'Amena et qui sema la confusion dans les esprits des parents.

- Ah non non pas du tout ! Amena et moi on n'est pas du tout en couple, c'est juste une très bonne amie, et jusqu'à preuve du contraire je ne suis pas gay, sûrement bisexuel ou pansexuel mais pas gay ni hétéro ça c'est sûr.

- Pansexuelle ? Demanda doucement son père.

- Oui pan du grec tous/toutes, c'est à dire que je ne fais pas attention au genre de la personne, ou bien c'est simplement plus inclusif pour les personnes non-binaire ou agenre. Non-binaire ça veut dire en dehors de la binarité homme/femme et agenre ça veut dire sans genre, parce que le genre et le sexe sont différents et que le genre est un spectre et donc entre homme et femme y'a une infinité de genre. En gros ...

- ... Tu nous as un peu perdus là mais d'accord, et du coup la nouvelle c'est quoi ? Parce que comme avec ta mère on était persuadés que c'était ton couple avec Amena, on n'a pas imaginé de plan B.

- Ah oui... Euh alors en gros... C'est rien de grave hein, c'est juste pas facile à dire comme ça la première fois... Vous vous souvenez de la période de mon enfance quand je disait tout le temps que je voulais être un garçon ? Ben en fait j'avais pas à vouloir être un garçon puisque j'en suis un...

- ...

- J'suis transgenre, je suis un homme transgenre...

- Je... ouah je ne m'y attendais pas du tout, désolé ma chérie euh mon chéri ? Je ne veux avoir l'air de mal réagir ou quoi, il me faut juste un peu de temps.

Son père était paniqué à l'idée de ne savoir aider sa fille, son fils.

- Tu compte entamer une transition sociale et médicale ?

Son petit frère venait de passer la tête dans le salon et regardait son« nouveau » frère avec un regard qui disait « je le savais, c'est pour ça que j'étais fâché, comment as-tu pu penser que nous allions te jeter à la porte ? ». Camille se senti un peu honteux et baissa les yeux tout en répondant à la question. La discussion reparti sur ce sujet, tout le monde se détendit et Camille sentit des larmes de soulagement lui monter aux yeux, après un câlin collectif et des excuses de toutes part « je suis désolée de ne pas t'avoir aidé avant » « je suis désolé d'avoir voulu couper tout contact, désolé d'avoir pris peur »...

Camille et Amena finirent par repartir après le repas du soir et arrivèrent dans l'appartement de Camille à 22h, ils étaient épuisés alors Amena envoya un rapide sms à sa copine pour la prévenir qu'elle restait dormir chez Camille et la rassurer en lui disant que tout c'était merveilleusement bien passé.