Marqués

12.

Je pivote doucement, et explose rire. Adrien sait choisir les "punitions" !

Mes yeux tombent d'abord sur leurs pieds : des chaussures immenses, au moins du 49.

Mon regard remonte doucement, découvrant 2 leggings à rayures horizontales jaunes et noires, des chemises aux manches bouffantes jaunes - je les mettrais dans le top 3 discrétion - et, le plus hilarant, des serres têtes à antennes avec des boules noires au bout. Parfait !

Des ricanements fusent dans la salle.

Je regarde enfin leur tête : ils me fusillent du regard. Enfin, Surtout Ethan. Enzo a une lueur d'amusement dans les yeux.

Je lui fais signe de me suivre en ignorant Ethan, prends un plateau et on va tous les deux s'asseoir avec les filles, qui elles aussi sont hilares :

- Ça n'arrive pas souvent, mais c'est tout le temps tellement ... (elles rigolent) Tellement drôle de voir leur têtes à chaque fois !

Elles continuent de se marrer, et s'arrêtent en regardant le regard humilié d'Enzo.

Ali s'excuse :

- Désolée, on ne voulait pas se moquer. C'est juste que c'est surprenant. Mais si tu veux savoir, ça te va très bien !

Elle lui lance un regard désolé mais pétillant de malice. Même moi qui suis une fille, je trouve ce regard adorable. Je ne sais pas pourquoi, mais l'innocence de ce regard m'irrite un peu ...

Je vois malheureusement très bien ce qu'elle veut dire : le legging, même s'il est ridiculement ridicule, le moule et accentue le putain de cul qu'il a - et oui, les filles regardent aussi les fesses ...

Le serre tête lui va comme un gant : le noir sur ses cheveux blonds est juste trop mignon !

Damn. Je parle comme une fillette qui fond dès qu'elle voit un beau gosse - ce que je ne suis pas du tout, on le sait tous.

Enzo lance nonchalamment la conversation :

- Vous allez au feu de camp, ce soir ?

Le feu de camp ? Quel feu de camp ?

- Bien sûr que oui ! En plus, un samedi par mois, c'est une sorte de soirée thème ! Quasiment tous les élèves du lycée y vont ! Ça fait au moins ... (elle fait mine de réfléchir) je sais pas trop combien de personnes, mais dans tous les cas, beaucoup de monde, réponds Ali avec un sourire léger.

Ah oui ... Adrien en a vaguement parlé hier je crois. Ali continue :

Ce soir, le thème est ... Attention tenez vous bien ...
"Les animaux" !
Elle se tourne vers moi. Un énorme sourire éclaire son visage.
Oh non. Je ne le sens pas ...
Je sais parfaitement où on va trouver nos vêtements !

Maintenant, elle se tortille d'excitation et tiens à peine en place.
Elle observe mon plateau et celui d'Enzo, à peine commencés, puis se lève d'un bond, suivie d'Alex :

On va dans le bungalow, tu nous rejoins quand t'as fini ? On t'attend pour y aller.

Je hoche la tête en les suivant des yeux jusqu'à la sortie, tout comme Enzo.
Un silence gênant s'installe et, quand j'ai enfin rassemblé assez de courage, je me lance :

- Je suis désolée pour hier, Enzo ... j'étais un peu sous le choc je pense, mais ça n'excuse en rien le comportement que j'ai eu avec toi. J'ai été sèche, égoïste, et surtout ingrate. Je suis vraiment désolée ...

Je baisse les yeux. Je m'excuse très souvent, même pour de toutes petites choses, et je culpabilise souvent pour rien, mais là j'ai vraiment déconné. Sa réponse, remplie de gentillesse, renforce encore plus ma culpabilité :

- C'est moi qui suis désolé. Pendant qu'on se battait avec Ethan, je t'ai aperçue par terre. J'ai eutellement peur de t'avoir blessée ... plus tard j'ai appris que c'était Ethan et pas moi, mais je suis tout de même coupable ... si on ne c'était pas ...

Je l'interromps :

- Arrête ça tout de suite. Ce n'est pas ta faute. D'ailleurs, pourquoi vous vous êtes battus à la base ?

Je suis étonnée. Avec ma curiosité à tendance maladive, je ne me suis même pas posée la question une seule fois.
Je suis une putain de petite fille égoïste.
À cette brusque prise de conscience, mes épaules s'affaissent légèrement.

Celles d'Enzo se crispent, je vois sa mâchoire se serrer et ses traits se durcir :

- Il a fixé bien trop effrontément une certaine partie de ton anatomie tout en te traitant de salope et en assurant quelque chose que tu ne préfères pas entendre et dont je ne veux pas me rappeler.

Il me regarde dans les yeux et je culpabilise.
Il s'est battu pour me défendre. Il s'est battu pour moi. Un sentiment étrange m'envahit.
Sauf que je ne comprends pas ... ce n'est que moi. Je ne vaut pas la peine que l'on se batte pour moi. Il a dû déceler mes pensées dans mes yeux, car il me dit :

Ne t'avises surtout pas de dire que je n'aurais pas dû. Je ne regrette pas une seule seconde, même si je dois porter ce truc - il montre sa superbe tenue - pendant la journée entière.

Ses mots me touchent. Bien plus qu'ils ne le devraient. Damn it. Je m'apprête à le remercier quand j'entends une voix derrière moi :

- Alors Mae, tu sais déjà quel animal tu veux être ce soir ?

J'ignore Monsieur Glace et regarde Enzo :

- Je vais dire ce que tu ne veux pas, parce que c'est la vérité. Tu n'aurais pas dû. Je ne ...
Oups, j'ai faillit me dévoiler un peu trop.
Bref, merci beaucoup en tout cas.
Je regarde l'heure - 13:30.
Je vais aller rejoindre les filles, elles sont surement déjà prêtes.

- Yes, pas de soucis. J'ai fini moi aussi de toute façon. À ce soir j'espère !

Je lui fait un clin d'œil, et juste avant de sortir de la cafet, j'entends encore SA voix :

- J'ose espérer apercevoir les fesses d'une certaine petite tigresse ce soir !

Je me fige, imperceptiblement, puis continue ma route. J'espère qu'il n'a pas remarqué mon trouble. Comment ce petit con bipolaire a pu savoir en quoi je voulais m'habiller ?!
Bref. On s'en fou. Fini de potasser.

Mes lèvres esquissent un sourire en coin. Il veut voir une petite tigresse ?
Il va la voir, sa tigresse.
Et pas qu'un peu ...