Chapitre 1

1.3K 153 13
                                    

-Maman !
-Oui ?
-Tu peux monter s’il te plait ?
-J’arrive.
    Elle attend. Puis entend enfin sa mère qui monte les marches lentement comme à son habitude. Elle veut lui poser une question, mais elle connaît déjà la réponse.
    Sa mère pousse la porte de sa chambre.
-Qu’est-ce qu’il y a ?
    Elle s’apprête à ouvrir la bouche mais la referme aussitôt. Elle se demande si elle doit interroger sa mère une fois de plus. Mais elle veut essayer… encore une fois.
-Que signifient toutes ces marques ?
-Quelles marques ?
    Elle pointe alors du doigt ses bras et fait signe à sa mère de regarder.
-Tu ne vas pas recommencer Gabrielle ! Je t’ai déjà dit que tu n’avais aucune trace sur les bras, ça suffit à la fin. Si tu continues à t’obstiner je vais finir par t’emmener voir une psy !
    Sur ces mots, sa mère se retourne et sort en claquant la porte. Gabrielle savait qu’elle allait réagir ainsi. A force de poser cette question, sa mère va finir par en devenir folle.

    Elle ouvre son armoire et en sort son sac à dos, celui qu’elle s’est achetée il y a trois mois en prévision de ce jour. Elle fait glisser la fermeture éclair et empile dedans tout ce dont elle pourrait avoir besoin : quelques vêtements de rechange, de l’eau, le collier que son père lui a acheté, un peu d’argent de poche, ses écouteurs, son portable etc. « Je me débrouillerai avec ça », se dit-elle.
    Elle ouvre sans faire de bruit la porte de sa chambre, descend silencieusement les escaliers et passe par la baie-vitrée ouverte. Sa mère est dans la cuisine et ne l’a pas entendu sortir de la maison. « Que va-t-elle penser de moi ? » se demande Gabrielle alors même qu’elle file dans la rue sans se retourner.
    Elle a laissé un mot sur son lit, un simple mot pour demander à sa mère de lui pardonner  :

          Maman,
  Je pars car je n’ai plus grand-chose à faire ici. Je vais bientôt avoir dix-huit ans et je peux m’en sortir toute seule. Depuis que papa n’est plus là, on ne se parle presque plus et j’ai besoin d’obtenir des réponses, des réponses que tu ne peux pas me donner. Pardonne-moi de te quitter.
                           Gabrielle

    Gabrielle n’est même pas sûre que sa mère lise son mot aujourd’hui car elle ne monte presque jamais dans sa chambre. Elle espère juste que sa mère arrivera à avancer toute seule. De toute façon il est trop tard pour faire marche arrière, elle le sait. Elle a longtemps réfléchit et a finalement pris sa décision : elle part et ne reviendra jamais dans cette maison.

    Elle court à travers le village, passe devant les maisons sans tourner la tête. Elle regarde droit devant, on ne lit aucune expression sur son visage. « Je ne reviendrai pas, tout ça fait partit de mon ancienne vie » pense-t-elle.
    Elle continue à courir puis s’arrête. En face d’elle, une forêt. Elle est arrivée à la limite du village. Pour la première fois depuis qu’elle a franchi le seuil de sa maison, elle se retourne et observe les habitations qui se situent derrière elle. Elle reste là sans bouger pendant ce qui semble une éternité puis baisse les yeux, ramasse son sac qu’elle avait posé sur le sol, et pénètre dans la forêt.

EmpreintesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant