14. Jade

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Présent:
Je pars me promener avec Belle. Nous partons à travers champs, galopant sous le soleil.

Les fleurs jaunes de colza dansent sur notre passage. Je fais passer ma jument au pas et m'allonge sur son encolure.

Elle a l'encolure droite, dans l'alignement de son dos. Mais d'un coup, elle baisse violemment la tête en lançant une ruade.

Je passe par dessus son encolure. J'atteris sur le dos entre les brins de colza.

Elle me fixe. Les oreilles en avant et la tête avancée vers moi. J'essaye de me relever mais impossible de me mettre ne serait ce que à genoux.

Je ne sens plus le bout de mes pieds. Ni mes genoux. Comme si je n'avais plus de jambes.

Et là une scène de Intouchable me revient en tête... Celle où Omar Sy verse de l'eau bouillante sur François Cluzet. Mais il ne sent rien car il est tétraplégique.

 Mais il ne sent rien car il est tétraplégique

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Et si j'avais pareil ? Oh non pitié pas ça !

Je sors mon téléphone de ma poche. Toujours allongée, j'appelle ma mère.

Au téléphone:
Moi: Maman ?

Maman: Ou Jade ?

Moi: Je suis tombée et je... Je sens plus mes jambes. Je suis dans le champ de colza, en allant vers... Euh... Vers chez Valentin. Tu peux venir me chercher ?

Maman: Oh mon Dieu ! Ma chérie on arrive ! Bouge pas on arrive ! Maman est là ne t'inquiète pas ma puce ! Jacques ! Notre fille est tombée magne toi Jacques ! Monte en voiture ! On arrive ma chérie ne bouge surtout pas ok ?

Moi: Bah c'est ça le problème. C'est que je peux pas... Bouger.

Je retiens mes sanglots pour ne pas l'effrayer d'avantage.

Moi: Maman ? Je pense qu'il faudra un médecin.

Papa: Donne le téléphone. Jade ? C'est pas un médecin qu'il faut. C'est aller à l'hôpital.

Moi: Et Belle ? Elle va pas rester seule ?!

Papa: Appelle Valentin. Il vient la chercher, la ramène à la maison et toi on t'emmène aux urgences. On arrive.

Fin de la conversation téléphonique.

J'entends une voiture se garer et des portières claquer. Je repense à Red... Que ressentait-il, lui ? À ce moment là ? Il devait bien se douter que quelque chose de grave allait arriver...

Je ferme les yeux, malgré moi. Mes parents m'appellent... Ils semblent si loin. Je n'ai pas appeler Valentin. Il faut le faire.

J'essaye de dire à mon père de l'appeler.

Moi (chuchotant): Appelle... Valentin... Pour Belle.

Il prend mon téléphone et je l'entend vaguement expliquer à mon ami la situation. Puis... Plus rien.

Trouuuuu noiiiiir... (ça m'a fait rire de le mettre comme ça donc voilà. C'est pas le moment Madeline...)

J'entends des gens parler. Je reconnais ma mère. Elle pleure. Et la voix de mon père, il répète que ce n'est pas possible.

De quoi ? J'ouvre difficilement les yeux. Ils sont seulement entrouverts mais je vois quand même un peu.

Mon père tient ma mère par les épaules. Ils sont debout. Ma mère tient sa tête entre les mains et mon père secoue la sienne en signe de négation. En face d'eux, un homme en blouse blanche.Un médecin sûrement.

Je chuchote un petit Hey. Comme à mon habitude.

Ils se tournent vers moi et me sourient à travers leurs larmes. Ils ont un regard désespéré. Personne n'aime voir ses parents tristes. Alors j'essaye de les faire sourire.

Moi: Bah alors... Vous avez laissé le smile à l'entrée ? Souriez un peu. On dirait que je suis devenue paraplégique.

Mes parents esquissent un sourire triste. Je regarde le médecin. Il demande à mes parents de sortir deux minutes.

Il m'explique que je le suis devenue. Je n'ai pas trop compris comment. En tombant ça c'est sûr... Mais il y a une histoire de vertèbres et de moelle épinière je crois... J'ai jamais été forte en SVT. C'est pas trop mon truc ça.

Enfin bref... C'est comme si je n'avais plus de jambes. Toute ma vie s'arrête. Je ne peux plus monter à cheval.

Clouée dans mon fauteuil, je ne pourrais que regarder les concours hippiques. Sans y participer.

1 semaine plus tard...
Je suis de retour à la maison. Ils m'ont gardée une semaine à l'hôpital. Une infirmière viendra tous les jours pendant 2 semaines, puis une fois par semaine tout le reste du temps.

Papa me descend de la voiture et me pose dans mon fauteuil roulant. Je vais aller voir ma jument.

C'est étrange... 2 propriétaires devenus para' à cause de la même jument. La jument du diable.

Je m'approche de sa barrière. Elle avance vers moi au trot et passe sa tête par dessus la clôture. Elle me sens les cheveux.

J'entends une voiture se garer. Je fais demi tour. Valentin. C'est la voiture des parents de Valentin.

Sa mère descend la première. Elle a ses éternels vêtements africains colorés. Je lui ai toujours envié ces vêtements venus d'ailleurs.

Son père est habillé plus simplement. Il est en habits de bureau. Chemise blanche, pantalon noir et veste noir. Son crâne tout lisse luit sous le soleil.

Valentin descend le dernier. Il a la tête basse et je vois qu'il a pleuré. Il relève la tête, me voit, et cpurs vers moi. Sa mère sur ses talons.

Ils me serrent dans leurs bras, agenouillés dans l'herbe.

Ils s'écartent enfin de moi. Mais Tonton (ils veulent que je les appellent Tonton et Tata. Convivialité africaine qu'ils disent) s'accroupit en face de moi. Il me prend aussi dans ses bras.

Mes parents s'approchent et nous rentrons à la maison.

Nous nous installons à la table à manger. Maman et Tata vont préparer le thé.

Valentin: Tu as pas mal ?

Moi: Bah nan. Je sens plus rien.

Valentin: C'est chaud quand même. Et... Ça guerit un jour ça ?

Moi: Pour certains oui. Comme Grand Corp Malade, le chanteur. Mais moi non, c'est mort.

Tonton: Ah ma fille c'est malheureux ça deh. Mais il faut que tu vivra avec.

J'ai toujours beaucoup aimé son accent et ses petites fautes. J'ai appris aussi à ne pas le reprendre lorsqu'il en fait.

Moi: Oui c'est sûr. En même temps c'est pas trop comme si j'avais le choix hein.

Valentin: Mais du coup... Tu peux plus monter ?

Moi: Non. Je crois que c'est ça le pire. Le cheval, pour moi, c'est fini. Dommage, je venais de trouver une super jument de saut.

Valentin: Tu t'étais tout juste remise de la perte de Red. Je suis vraiment désolé Jade.

On continu à parler pendant une bonne heure puis ils repartent.

Toi + MoiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant