Chapitre 13

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Lundi (suite)

Je viens de lâcher une bombe et elle nous dévaste tous les deux. Je réalise l'ampleur du désastre et ferme les yeux, prise tout à coup par un vertige violent.

- Alors change de nom ! S'emporte soudain Giacomo. Change de nom, ou alors... prends le mien, mais quoi que tu fasses, ne nous sépare pas !

Il est hors de lui, je tente de parler mais il ne m'en laisse pas le temps car il raccroche. Comment faire pour rattraper ça ? Je dois vraiment détruire les livres. D'ailleurs, est-ce qu'ils m'ont été livrés ?

J'ai une furieuse envie de retourner chez moi pour vérifier dans ma boîte aux lettres, mais un rapide coup d'œil sur le site du transporteur me donne la réponse : « Colis livré ».

Dans ma tête tout se bouscule et je m'affole. Dans un geste désespéré, j'appelle Angus pour lui dire ce qui vient de se passer, mais je n'obtiens que son répondeur. Je ne laisse pas de message, à quoi bon, puisque de toute manière, je suis ici, et que je ne peux rien faire techniquement sinon attendre ce soir.

Je vaque à mes tâches professionnelles pour me changer les idées, car tout cela m'obsède. Pourtant, je n'arrête pas d'y penser et je cherche une solution qui pourrait arranger tout le monde. La matinée s'écoule très vite, et enfin, Angus m'appelle.

- Coucou ! Tu as essayé de me joindre ...

- Oui ... c'est la catastrophe !

Et je lui relate les faits.

- En effet, ça se complique sérieusement ...

- Je ne te le fais pas dire, et en prime, Giacomo est fâché, alors pour communiquer ça ne va pas être facile...

- Tu as essayé de modifier ton nom d'auteure sur les brouillons, les documents que tu as envoyés pour la mise sous presse ?

- Heu ... non, bonne idée, je vais le faire.

- OK, et on regarde ce que ça donne d'ici ce soir.

- D'accord. Merci !

- Ce n'est peut-être pas la panacée, mais on va espérer que ça va au moins décoincer la situation et permettre à Synalco de revenir.

- Tu as raison. Je m'y mets tout de suite. A ce soir Choupinou !

- A ce soir Choupinoute !

Je profite de la pause du déjeuner pour procéder aux modifications. Je retire le nom de Synalco de tous les textes et ne laisse qu'une initiale en guide de signature à la place. En le faisant je suis un peu triste, car j'ai la sensation de me punir. Je réalise qu'une force quelque part m'empêche vraiment de me dévoiler. Car au fond, tout tourne autour de ça : l'aveu de mes écrits. A y regarder d'un peu plus près, ce sont mes personnages, qui au final, ne veulent pas me quitter. Tandis que moi, je leur offre la liberté, justement.

Je suis en train de modifier le dernier texte et j'hésite. Et si je ne le faisais pas, si je laissais les choses aller dans l'autre sens. Remettre en ligne les histoires, garder le nom de Synalco en tant que nom d'auteure, ne pas détruire les livres ... et que je parvienne à convaincre mes personnages qu'ils sont libres, et non abandonnés ?

Plus j'y pense, plus je suis sûre de moi, et du bien fondé de ma démarche. Je veux retourner la situation de sorte qu'il ne s'agisse plus de mon droit ou non de publier mes histoires. Ici, les acteurs principaux se sont mes personnages et ils doivent pouvoir évoluer, continuer d'exister ailleurs que dans mon imaginaire exclusivement.

Ma RéalitéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant