A coeur et à sang - Peter

De toi à moi part 2.

Je le regarde, presque ahurie. Aucun son ne sort de ma bouche. Il m'observe sans un mot quelques instants, immobile. La légère brise fait virevolter quelques mèches de ses cheveux de jais cachant par intermittence ses magnifiques yeux bleus.

- Tu as l'air d'aller mieux, dit-il.

J'affiche une expression de surprise.

- Pourquoi tu me dis ça ?

- Nicolae était inquiet, tu ne t'es pas montrée au repas et tu t'es isolée toute la journée.

- Ah ? Non, pas du tout, j'avais juste envie de me retrouver et de profiter du beau temps.

- Il avait envie de passer plus de temps avec toi j'imagine, dit-t-il d'un ton monocorde.

Je le dévisage quelques instants, mon esprit divagant au rythme des rondes du manège.

- Tu es venu pour me parler de Nicolae ? dis-je avec un sourire mutin.

Il expire un rire dans un soupir gêné tout en détournant ses yeux des miens. Puis il les repose sur moi, une lueur de malice dans le regard. Il sourit et lève le menton pour se donner un air mystérieux. Il contourne mon cheval et marche à contre sens du plancher tournant. Puis disparait derrière le pilier central.

- Non. lâche-t-il de nulle part.

Je continue de le cherchant du regard, lorsque soudain il me fait face. Son visage à hauteur du mien. Il ne dit mot, et attend ma réaction. Il est arrivé si vite, que je ne l'ai pas vu approcher. Je tente de dissimuler mon trouble et de poursuivre le plus naturellement possible cet échange, qui s'annonce plus profond que ce à quoi j'aurais pu m'attendre.

- C'est bien ce que je me disais, dis-je avec audace.

Son regard se fait plus sombre. Il détaille mon visage avec attention, ses yeux glissant des miens, à ma bouche, à mon cou et à mon épaule dénudée, puis capture de nouveau mon regard, tentant de comprendre où je veux en venir.

- Ah, et qu'est-ce que tu te disais ?

Sa voix chaude et trainante provoque en moi un brasier qui se répand dans tout mon bas ventre, exprimant les désirs que je m'efforce de refouler. Mon souffle se coupe, et je tente de rassembler tous mes esprits pour lui donner une réponse à la hauteur du jeu que nous venons de commencer. Puis, lorsque je m'apprête à répliquer, une voix nous interpelle depuis la terrasse de la salle à manger.

- LE REPAS EST PRET ! crie Nicolae, nous forçant, Peter et moi, à mettre fin à notre conversation.

Je descends de mon cheval, ramasse mes affaires et me dirige vers le manoir quand Peter m'interpelle, adossé contre la monture, les bras croisés, d'un air déterminé.

- Tu ne m'as pas répondu, dit-il avec un aplomb inattendu.

- Je me disais... que tu pourrais m'apprendre à jouer du piano. dis-je avec défi.

Il me sourit, acquiesce d'un signe de tête et avance jusqu'à ma hauteur.

- Ta première leçon commence ce soir, après le repas. répond-il avec une fausse autorité, m'arrachant un rire amusé.

- Oui chef !

Il me sourit, et secoue la tête faussement indigné. Nous marchons en silence vers le manoir et mon cœur s'accélère. Je joue un jeu dangereux et je n'arrive pas à m'arrêter. Il m'obsède et je veux passer plus de temps avec lui pour apprendre à le connaitre. J'ai le sentiment que ce que je ressens est réciproque mais je ne peux pas le dire avec certitude. C'est peut-être de la pure gentillesse de sa part. Il m'a vue dans tous mes états hier, peut être souhaite t'il uniquement m'apporter du réconfort et du soutiens dans cette période difficile pour moi... Lorsque nous arrivons dans la salle à manger, le repas est servi et la table est mise. Avant que je ne puisse m'installer, Lorie court s'assoir en bout de table. Je ris intérieurement, voyant toutes les manigances qu'elle met en place pour être au centre de l'attention. Je tire une chaise et m'installe, Peter s'assoie à mes côtés, Drogo et Nicolae nous font face. Je me lève et prends l'initiative de découper la volaille et de servir l'ensemble de la tablée. Voyant le peu de nourriture que chacun a dans son assiette, j'ai l'impression d'être une ogresse et je me sens affreusement gênée. Drogo note mon trouble et ne peut s'empêcher de lancer une pique, comme à son habitude.