Je monte faire ce qu'elle m'a demandé, d'un pas traînant et avec un air désespéré sur mon visage. Est-ce c'est too much ? Hannah Peterson, ma cousine anglaise qui vient passer le reste des vacances chez nous. Ô joie ! Je ne l'ai pas revue depuis des années, mais le souvenir que j'en garde est loin d'être agréable. Une rouquine s'entendant parfaitement avec mon frère mais préférant se moquer se moquer de moi, tout en peinant à aligner deux mots de français. Pire encore, elle est plus âgée que moi.
Ma mère est une anglaise naturalisée après quatre ans de vie commune avec mon père. De sa vie en Grande Bretagne il ne lui reste qu'un léger accent, sa sœur et sa nièce et bien entendu une aptitude à parler anglais formidable. Ma tante Liz a pour habitude de faire escale en Bretagne chaque été, pour une durée de deux jours environ, avant de partir travailler dans le sud.
Elle, c'est une anglaise pur jus ! Quand elle parle français, c'est avec un accent à se tordre de rire, on ne comprend pas toujours ce qu'elle cherche à dire. Et surtout, c'est une adepte de la sauce à la menthe, qu'elle prépare elle-même et elle adore nous faire cadeau de pots entiers à chaque fois qu'elle nous rend visite. Si ma mère aime ça, je crois bien qu'elle est la seule de la famille. Cette mixture est vraiment répugnante, pour ne pas dire totalement dégueulasse.
Ca doit bien faire huit ans que je n'ai pas vu Hannah et je m'en porte très bien. Mais d'après ma mère, elle a fait de l'anorexie l'année passée et Liz ne veux pas la laisser seule en Angleterre. Ma tante est séparée de son mari depuis des années, et étant donné qu'il est lui aussi en voyage, c'est bien sûr nous qui devons accueillir la pauvre petite cousine que ma mère va probablement passer son temps à couver. Je me souviens d'elle comme d'une petite brune un peu ronde. Rien de choquant, mais vu la mentalité des gens, c'est assez pour attirer les moqueries.
Je suis conscient que je devrais compatir, que je suis juste arrogant et égoïste mais je déteste ma cousine. C'est un mot bien trop fort mais je pense que je suis comme ça. Je ressens toutes les émotions à leur maximum et je peine à en contenir deux à la fois. A chaque moment, je ressens qu'un combat acharné se livre en moi. Haine ou compassion, c'est la plus forte qui remporte la victoire et prend toute la place. Peut-être qu'au fond, j'ai envie de savoir ce qu'est devenue Hannah. Est-ce que ça fait de moi un psychopathe ? Et même si c'est le cas, est-ce si grave au fond ?
Une fois le lit pour ma cousine fait, mon père prévenu, il ne faut pas longtemps avant que tout le monde soit réuni à table, si ce n'est que mon père est encore derrière les fourneaux.C'est souvent comme ça. Quand ma mère cuisine, elle crée des saveurs assez douteuses alors que mon père vante les mérites de la cuisine française. Eternel débat dont ma mère sort toujours très vexée parce qu'on n'est pas capable d'apprécier sa cuisine à sa juste valeur. Résultat, c'est mon père qui préparer à manger le plus souvent.
Désolé pour maman, parce que ses galettes bretonnes sont excellentes. Mais si je dis à voix haute, elle va encore râler en prétextant que si papa était un si bon cuisinier, il pourrait faire la pâte lui-même au lieu de les acheter au marché.
Josh nous a rejoints pour manger, évidemment, ce n'est pas lui qui raterait un repas. Je ne sais pas ce qu'il a fait de sa matinée, pendant que je trimais comme un elfe de maison, mais il a l'air reposé lui au moins. Comme toujours, il est assis en face de moi et j'ai cette sensation de contempler un miroir dès que je lui lance un regard. Même yeux bleu foncé, même pommettes saillantes, même crinière chocolat et bouclée.
Est-ce que c'est toujours ça d'avoir un jumeau ? Ce miroir qui vous rappelle perpétuellement que vous existez vous et vos qualités, mais surtout avec tous vos défauts. On est tous les deux dans la même galère. Les gens nous confondent, nous associent forcément l'un à l'autre et ne font pas forcément la différence entre nos deux personnes. On est Josh et Andrew, et pour beaucoup, l'un ne va pas sans l'autre. Mais au moins, dans cette galère, on est deux.
Et de tout façon, à choisir, je ne me débarrasserais du double maléfique qu'est mon frère pour rien au monde.Mon père a toujours bien aimé nous surnommer Doctor Jekyll et Mister Hyde. Selon lui on n'est jamais de la même humeur au même moment, lorsque l'un est joyeux, l'autre est plus sombre. Je lui donne raison, et je crois bien être actuellement d'une humeur de Mister Hyde, comme il aime l'appeler. Je regrette la façon froide avec laquelle je me suis comporté devant la jolie inconnue et j'appréhende beaucoup trop l'arrivée d'Hannah.
-Vous sortez cet après-midi ? nous demande mon père qui s'est enfin installé avec nous.
Ah, maman a décidé qu'elle n'avait plus besoin de moi ? Tant mieux parce qu'un peu plus et je me faisais appeler Dobby.
-Non, répond ma mère à notre place. Ce matin Andrew m'a aidé et cet après-midi c'est au tour de Josh. J'aimerais au moins que la maison soit propre quand Liz et Hannah arriveront.
Elle ajoute en se tournant vers moi :
-Tu fais ce que tu veux mais tu ne sors pas. Tu serais bien fichu d'être en retard et de ne pas être là quand elles seront là.
Super, maman est un mode tyran. Bonne chance Josh, c'est toi qui passe l'après-midi avec elle, pas moi.
A chaque fois que l'on reçoit à la maison, c'est la même chose. Maman se transforme en monstre avide de calme, d'obéissance et de ménage. Et tant que les invités ne sont pas là, impossible de la raisonner, même pour mon père. Dans ces cas là, il vaut mieux se cacher et se faire très petit, dans l'espoir qu'elle ne nous appelle pas. Heureusement, il semblerait qu'aujourd'hui j'ai la chance d'échapper au calvaire qu'est le stress de ma mère.
Une fois les galettes avalées, les pâtisseries dévorées (pâtisseries et galettes achetées par mes soins pendant la matinée), je quitte la table, c'est Josh qui s'occupe de débarrasser. Je vais dans ma chambre où je m'étale lamentablement sur le mini canapé.
Suis-je paresseux et égoïste, saisissant le moindre prétexte pour laisser mon frère s'occuper de tout ? Indéniablement, je serai capable de rester toute une journée installé au même endroit.
Au moins t'es pas un gros allemand qui passe ses journées à bouffer des kebab-frites.
Ai-je des préjugés sur les Allemands? Carrément et il faudra un jour que j'arrête mes remarques déplacées, mais j'avoue que l'idée d'un kebab me dégoûte vraiment. Je visualise la colonne de viande un peu louche et ça suffit à me donner la nausée. Je hais le kebab. Je hais beaucoup trop de choses dans ? J'ai la sensation de n'être que haine et sarcasme en ce moment, et je n'aime pas cette personne que je deviens alors.
Le bleu de ma chambre a un effet calmant. J'aime cette couleur et c'est pour ça qu'elle est présente partout dans la pièce sous différentes nuances. Les murs, ma couette, le canapé, le tapis, rien n'échappe ai bleu si ce n'est les quelques meubles dont la commode, la table de nuit et la bibliothèque.
Cette dernière est presque entièrement remplie. Quelques romans d'aventure, de fantastique et de science-fiction, sans oublier des policiers. Mais surtout, il y a mes livres de mythologie qui sont sans conteste mes ouvrages préférés. Elles m'intéresse toutes, mais celle qui passionne vraiment est la mythologie grecque, elle remporte tous les suffrages en ce qui me concerne. Je me plais à imaginer des dieux aux défauts terriblement humains et des héros bien trop parfaits sur les abords. Ça permet en quelque sorte de les faire vivre dans un monde où les preux chevaliers n'ont jamais vraiment existé. Mais à force de lire ces histoires on se rend bien compte que même ces héros mythologiques ne peuvent pas être qualifiés ainsi. Après tout, Ulysse a rencontré Circé et Calypso avant de regagner Ithaque et de retomber dans les bras de Pénélope.
Tu n'es pas mieux qu'un autre.
C'est ce que me souffle ma conscience et je sais qu'elle a entièrement raison. Je ferme les yeux, je souhaite retrouver mon univers, mon palais. Il sera peuplé de dieux grecs pour cette fois car c'est ainsi que je le veux. Tout pour échapper au garçon plein de défauts que je suis. Finalement , c'est facile d'oublier mais la vérité revient toujours. Je ne suis qu'un humain, je suis le vice.
NDA: Hello! En espérant que ce chapitre vous aura à nouveau plu, je voudrais encore de le dire si tout va bien, de traquer ce qui ne va pas, les défauts et incohérences :)
Le média est en hommage au chanteur des Linkin Park 💙
VOUS LISEZ
L U N E
Teen FictionC'était un jeune homme qui ignorait si le monde était trop mauvais pour lui ou s'il était trop mauvais pour le monde. C'était une jeune fille brisée, une jeune fille qui n'était personne. Une rencontre qui peut changer la donne. Et si sous les décom...