5. Andrew

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Des opportunités, il en existe des quantités. Des choix, pas forcément évidents, une possibilité à laquelle on n'avait pas pensé. Parfois, les opportunités ne nous apparaissent pas comme telles. Parfois, on croit en voir là où il n'y en a pas. Peut-être que je suis de ces personnes là, peut-être que je suis prêt à prendre trop de risques. Mais pour l'instant, je suis piégé, je ne sais pas quoi faire.

Je sais où elle habite.

Je l'ai raccompagnée hier soir. Quand je pense que c'est Josh lui-même qui l'a invitée au café. Ca ne peut pas être une simple coïncidence de l'avoir vue deux fois en une seule journée. J'ai pu lui parler. Je veux la revoir, la connaître.

Je veux l'embrasser, poser mes lèvres sur les siennes.

Je ne peux pas être amoureux d'elle, je sais à peine qui elle est. Et pourtant, je crois que je l'aime déjà. Sa voix légère, ses cheveux trempés transformés en cascade couleur miel, le résidu de chocolat chaud laissé au dessus de sa lèvre supérieure, son regard orageux rempli d'incertitude. J'ignore tout d'elle, mais j'ai déjà capté le plus important. Elle est une étoile, venue briller de son éclatante lumière dans mon ciel noir empli de monotonie. Mon étoile. Une constellation plus précieuse qu'aucune ne l'a jamais été. Mais voilà déjà que je m'avance trop sans même m'être posé la plus importante des questions. Pourrait-elle accepter et me rendre ce que je suis prêt à lui donner ?

Et puis il y a cette aura de mystère qui lui colle à la peau. Je ne peux pas me résoudre à l'appeler Anaïs. La façon même dont elle a prononcé ce nom m'a tout de suite fait réaliser que quelque chose n'allait pas. J'ai été le seul à déceler les mensonges qui ont suivi. Anaïs n'est qu'une façade, j'en suis persuadé. Je veux découvrir ce qui se cache en dessous à tout prix.

Une personne frappant à la porte de ma chambre m'interrompt dans ma réflexion.

-Je suis occupé.

Hannah entre, même si je ne lui en ai pas donné la permission. Elle est d'un pénible. Autant elle est beaucoup plus sympathique que dans mon souvenir, autant elle me prend toujours pour un gamin.

-Ce n'est pas ce que j'appelle être occupé, déclare-t-elle.

Je suis confortablement installé dans mon canapé, les jambes en tailleur. En apparence je ne fais rien du tout, mais Hannah ne me connait pas. Elle ne peut pas savoir que derrière mon air calme, mes pensées sont tumultueuses. Malgré tout, je n'en dis rien, je ne ressens pas le besoin de me justifier.

-Qu'est-ce que tu veux Hannah ? dis-je, un brin agacé.

-Si je te réponds rien, tu me crois ?

-Bien que non.

-Dommage. Eh bien, je tente de m'acclimater parmi les singes, en reproduisant leur mode de vie.

-Ah, ah, ah. C'est très drôle et très fin. Est-ce que tu es au courant que si ma mère est ta tante, logiquement toi aussi tu es un singe.

-Qu'est-ce qu'on a à foutre de la logique !

-Dis voir, ton français est presque parfait Hannah.

-Ecole européenne, cours intensifs et meilleur ami français, voilà la recette. Mais plus sérieusement, c'est ta mère qui m'envoie, la mienne est sur le point de partir.

Si Liz a passé la nuit chez nous, elle repart aujourd'hui pour son boulot. C'est comme ça tous les ans. Il ne restera bientôt plus d'autres traces de ma tante dans la maison que celles du reste de sauce à la menthe qui n'a pas été versé sur le poulet de la veille.

-Alors, elle va te manquer ta petite maman ? dis-je pour taquiner Hannah.

-Tu parles, bonjour la liberté ! Surtout qu'à vingt ans je pourrais vivre seule. Mais comme ma fac n'est pas loin, ma mère a refusé que je loue un studio, elle dit que c'est inutile. J'aurais pu partir en vacances avec des potes, mais non, impossible, maman poule toujours au poste !

L U N EOù les histoires vivent. Découvrez maintenant