Chapitre 1 : Mutisme (part 3)

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L'air revient subitement à cette dernière. Les pas s'éloignent. N'avaient-ils pas remarqué le délégué ? La pâle jeune fille se met à tousser fortement. Des larmes embrument sa vision tandis qu'elle s'assied par terre. Nathaniel l'attrape par la taille et l'aide à se relever d'un geste, l'obligeant à le regarder.


- Que se passe-t-il ?! Tout va bien ? Demande-t-il d'une voix inquiète.
- Je... Je ne sais pas j'avais l'impression que... Ma gorge, bafouille-t-elle en reprenant avec difficulté une respiration normale. Tu... l'as entendu toi aussi ? Je ne suis pas folle, tu l'as entendu ? S'empresse-t-elle de demander sans même finir ses explications.
- Oui... Nathaniel laisse la gravité de sa réponse résonner un court moment. Il y avait quelqu'un.


Le délégué tend l'oreille et regarde autour de lui. Le silence règne à nouveau. Il lache la nouvelle arrivante et s'approche des escaliers centraux. Plus aucun bruit ne fait écho, mais il se pourrait que la personne se soit juste arrêtée. Elle pourrait être là, tout prêt, sans même qu'il ne le sache. Le blond ferme les yeux et se concentre du plus fort qu'il le peut. Il ressent la panique de Camille. Le stresse qui l'a lui-même pris d'assaut. Mais il ne ressent rien d'autre. Pas une autre émotion ne lui apparait. Toutefois, pourrait-il discerner quelqu'un qui est capable de se rendre invisible ?


La respiration de Camille lui brûle. Sa tête tourne à nouveau. Elle continue de tousser. Elle ne comprend rien à ce qu'il vient de se passer. Vient-elle tout juste... De se faire attaquer par quelqu'un qu'elle ne peut même pas voir ? C'est impossible. Comment ? Pourquoi ? N'a-t-elle pas vécu assez d'horreurs jusqu'à présent ? Perdre sa famille, ce n'est pas assez ? Il faut sa vie aussi ? Mais qu'a-t-elle fait ?! Qu'a-t-elle fait pour mériter ce supplice ? Elle titube tandis que des larmes de colère et de douleur l'empêche de voir correctement.


Une quinte de toux plus violente et brûlante s'emparant de la demoiselle, celle-ci bascule en avant Les forces lui manque. Elle est fatiguée et a mal physiquement aussi, maintenant. Heureusement, Nathaniel la rattrape avant que Camille ne finisse sa chute dans les escaliers.


- Doucement ! Appuie-toi sur moi, ordonne doucement le jeune homme au regard d'or. Je pense que n'importe qui aurait dû mal à gérer ce genre de... situation. Nathaniel s'arrête un instant et semble songeur, avant de finalement ajouter : même moi.


L'incompréhension le terrasse également. Des questions se bousculent par dizaine, mais il doit se concentrer sur ce qui est plus important pour l'instant. Il est délégué et Camille a besoin d'aide. Le plus intelligent à faire est de l'amener à sa chambre pour qu'elle se repose et se remette de toutes ses émotions. Les questions viendront plus tard. Il en parlera à la directrice.


La jeune fille au regard embrumé reste quelques secondes sans rien dire, surprise et mal à l'aise. Mais le délégué n'a pas tort. Elle a bien le droit d'être un peu désorientée. Peut-être même plus que n'importe qui, finalement. Aussi, Camille finit par relever le visage vers Nathaniel et tente de sourire. Celui-ci est maladroit et bien mince, pourtant, le délégué peut sentir une réelle intention derrière lui. Aussi faible soit-il, c'est au moins l'idée d'un sourire franc. Lorsqu'elle se sent enfin capable de se maintenir sans aide, Camille s'écarte de Nathaniel.


- Merci, chuchote-elle en baissant la tête, assez gênée.
- Je t'en prie, répond ce dernier calmement. Maintenant, allons vite trouver ta chambre. Il commence à se faire vraiment tard et... Les lieux n'ont plus l'air sûrs ici, ajoute-t-il en lançant un dernier regard vers le hall.


Le blond aux yeux dorés tourne les talons et avance enfin jusqu'à l'entrée de l'aile est. Cette-fois ci, il vérifie que Camille reste bien derrière lui. Elle se tient plus proche de Nathaniel. La peur prend le dessus sur la tristesse qui émanait d'elle jusqu'à présent. Il y a malheureusement de bonnes raisons d'éprouver une certaine crainte. Ce qui vient de se passer ne s'était jamais produit au château, avant ce jour. Nathaniel est certain de ne connaitre aucun élève capable de faire cela. Cependant, il ne connait pas non plus tous les élèves. Il y en a bien trop pour cela. Mais les améliorés, tout de même...


Le jeune homme lance un regard de par-dessus son épaule vers Camille. Elle a l'air si banale. Pourquoi quelqu'un tenterait de lui faire du mal ? Il manque de toutes évidences des pièces au puzzle de ce mystère naissant. Ce qui est certain, c'est qu'il faudra faire un sérieux rapport à la directrice quant à cette... Intrusion. Peut-être aurait-il plus d'informations ?


Après un moment dans le plus lourd des silences, les étudiants arrivent enfin dans le couloir indiqué par la gérante de Sweet Amoris. Le dernier de la tour est. Une porte est entre-ouverte et ne laisse pas de doutes. Nathaniel se dirige vers celle-ci et l'ouvre, pour entrer dans une chambre où quelques valises reposent. La jeune fille le suit d'un pas lent et peu assuré. Elle lance un regard rapide à la pièce, avant de baisser la tête à nouveau.


- D'ordinaire ce couloir est réservé aux garçons, déclare le délégué. Mais l'avancée dans l'année et la répartition des chambres déjà données ne laissent plus que ce choix possible. Toutefois, ce n'est pas réellement un problème. C'est ta chambre, personne n'y aura accès sans ta décision. Pour les douches, tu n'auras qu'à descendre à l'étage en dessous.
- D'accord, répond Camille, fébrile.
- Je te montrerais tout cela demain, répond Nathaniel d'un air soucieux.


Le blond tend une oreille vers le couloir. Silence. Aucun bruit ne résonne, le couloir est plongé dans un calme plat. Les pas se sont éloignés mais... La tension est toujours présente.


- Si jamais il y a un souci, ma chambre est la dernière porte au fond, dévoile le blond en plongeant son regard dans celui de la nouvelle.
- Oh... Ça ira, assure celle-ci en détournant les yeux.
- Je t'attendrais devant ta porte demain matin à 7h, si cela te va ? Questionne le délégué d'une voix la plus douce possible.
- O... Oui, merci, chuchote Camille qui triture nerveusement ses doigts. À demain ?
- Passe une bonne nuit.


Là-dessus, Nathaniel sort en fermant la porte derrière lui. La jolie brune reste un moment sans bouger, l'écoutant s'éloigner et fermer la porte de sa chambre, plus loin. Sans plus attendre, Camille se laisse enfin tomber dans son lit sans draps. Elle a le cœur douloureux des blessures encore ouvertes et l'esprit encombré de toutes ces questions qui ne cessent de la traverser. Mais les émotions si fortes et le voyage ont rapidement raison d'elle. Ses yeux brillants d'étoiles transparentes se ferment tout seuls. Sans même qu'elle ne se change, ou n'ait la force de chercher après une couverture, la demoiselle finit par s'endormir... Pour sombrer dans une nuit de cauchemars, reflets de sa vie.

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